Vivre en direct la condition de spectateur en bénéficiant du bonus offert d'une critique savoureuse des faits, gestes et motivations diverses et variées de "la bête de salle" qu'est ledit spectateur, telle est l'expérience proposée in situ. Enchainant avec vélocité les différents cas de figure, "la bête de scène" qu'est Jérôme Rouger, dont l'animalité vive de routard des plateaux produit irrésistiblement son effet hypnotique sur l'assistance, déroule ses observations à l'usage des spectateurs, partie prenante de ce qui va advenir dans le présent partagé de cette représentation.
En effet, s'il est une évidence c'est celle de la consanguinité du couple acteur-spectateur d'un soir, accouchant ensemble de par son union (contre nature ?) d'un spectacle unique, différent de ceux qui l'ont précédé et de ceux qui le suivront. Et ce miracle de la Nativité "spectaculaire" n'a rien à envier à celui de la Nativité christique tant la dose d'illusions partagées est à la source du miracle à venir.
En effet, s'il est une évidence c'est celle de la consanguinité du couple acteur-spectateur d'un soir, accouchant ensemble de par son union (contre nature ?) d'un spectacle unique, différent de ceux qui l'ont précédé et de ceux qui le suivront. Et ce miracle de la Nativité "spectaculaire" n'a rien à envier à celui de la Nativité christique tant la dose d'illusions partagées est à la source du miracle à venir.
Oscillant entre humour vif et critique de la raison pure appliquée à l'objet spectacle, l'acteur de tréteaux va s'amuser (et nous amuser) à rapprocher les paradoxes inhérents aux arts vivants. Ainsi, savoir accueillir l'ennui au théâtre n'est-il pas promesse inépuisable de joie intense… lorsque la représentation arrivera à son terme, la chute étant alors synonyme de la délivrance attendue ? De même, pour éviter de "mourir de rire", comme cette malheureuse spectatrice restée inerte dans son fauteuil alors que la salle s'était vidée de ses âmes vivantes, l'humoriste humaniste ne se doit-il pas (ce sera le cas ce soir…) de supprimer les parties trop drôles de son spectacle ?
Poursuivant son exégèse de la représentation théâtrale, l'humoriste, ayant au préalable juré fidélité au serment de Shakespeare, se lance dans une sociologie de l'entité "Public" propre à décoiffer les têtes majoritairement chenues des "assistants émotionnels" venus là… (l') assister. Le public donc, pris comme un conglomérat d'individus sans autre cohésion que de se retrouver dans la même salle, le même soir, mais avec des attentes et regards singuliers, va alors pouvoir bénéficier de ses précieux conseils.
D'abord, pour rendre hommage à sa grand-mère privée trop tôt d'école, mais aucunement d'intelligence, et en fonction des pouvoirs qu'il s'accorde ici et maintenant, le maître des chimères artistiques décrète la règle de la primauté du féminin, renvoyant aux oubliettes de l'Histoire la règle des accords grammaticaux consacrant la primauté du genre masculin. Mine de rien, en déminant là un terrain occupé par les tenants d'un ordre conservateur entendant perpétuer au travers de la langue le pouvoir de domination du patriarcat, et s'adressant désormais aux "spectatrices" que nous sommes tous et toutes devenues, l'humoriste rejoint la tradition de celles et ceux qui s'appuient sur le ridicule existant pour mieux le faire rejaillir en pleine face.
Quant à la qualité des publics, elle est, comme celle des produits de première nécessité, soumise à variations… "Il arrive que le public soit mauvais, fatigué, ou pire… bête". Et l'humoriste de passer en revue la typologie des "spectatrices". Des consommatrices (qui revendiquent d'avoir rien préparé, laissant cette charge au bouffon sur scène), aux molles et éteintes qui donnent envie de s'endormir sur scène.
Un sort particulier sera réservé aux élues, dont l'appel ce soir aboutit à la conclusion d'un certain désintérêt pour la chose culturelle. Les "spectatrices" du premier rang, elles aussi, auront droit à un traitement de faveur ; prises comme "mur émotionnel" où vient s'écraser le reste de la salle, prisonnière de leurs réactions, elles seront rendues pleinement responsables de la réussite ou de l'échec de la performance.
Poursuivant son exégèse de la représentation théâtrale, l'humoriste, ayant au préalable juré fidélité au serment de Shakespeare, se lance dans une sociologie de l'entité "Public" propre à décoiffer les têtes majoritairement chenues des "assistants émotionnels" venus là… (l') assister. Le public donc, pris comme un conglomérat d'individus sans autre cohésion que de se retrouver dans la même salle, le même soir, mais avec des attentes et regards singuliers, va alors pouvoir bénéficier de ses précieux conseils.
D'abord, pour rendre hommage à sa grand-mère privée trop tôt d'école, mais aucunement d'intelligence, et en fonction des pouvoirs qu'il s'accorde ici et maintenant, le maître des chimères artistiques décrète la règle de la primauté du féminin, renvoyant aux oubliettes de l'Histoire la règle des accords grammaticaux consacrant la primauté du genre masculin. Mine de rien, en déminant là un terrain occupé par les tenants d'un ordre conservateur entendant perpétuer au travers de la langue le pouvoir de domination du patriarcat, et s'adressant désormais aux "spectatrices" que nous sommes tous et toutes devenues, l'humoriste rejoint la tradition de celles et ceux qui s'appuient sur le ridicule existant pour mieux le faire rejaillir en pleine face.
Quant à la qualité des publics, elle est, comme celle des produits de première nécessité, soumise à variations… "Il arrive que le public soit mauvais, fatigué, ou pire… bête". Et l'humoriste de passer en revue la typologie des "spectatrices". Des consommatrices (qui revendiquent d'avoir rien préparé, laissant cette charge au bouffon sur scène), aux molles et éteintes qui donnent envie de s'endormir sur scène.
Un sort particulier sera réservé aux élues, dont l'appel ce soir aboutit à la conclusion d'un certain désintérêt pour la chose culturelle. Les "spectatrices" du premier rang, elles aussi, auront droit à un traitement de faveur ; prises comme "mur émotionnel" où vient s'écraser le reste de la salle, prisonnière de leurs réactions, elles seront rendues pleinement responsables de la réussite ou de l'échec de la performance.
Toujours sur un ton (faussement) détaché fuseront des considérations sur le public des scènes nationales dont le portrait-robot épingle en creux les travers de la culture de l'entre-soi et du mieux-disant culturel propres à d'autres structures… pour faire ressortir que, si, là aussi, on trouve de gros lourdauds (le féminin n'existerait-il pas ?), ils sont éduqués. Ainsi, tout en restant bienveillant, par pointes ajustées, l'humour se fera un brin plus critique des comportements et motivations rencontrés chez les "spectatrices", même si, dans l'instant même, des numéros de cabarets joyeux viendront recolorer en rose (vif) le spectacle.
On se délecte de l'humour (r)affiné de Jérôme Rouger, expert en l'art de démonter les ressorts animant le sérail constitué par le chœur des "spectatrices", son allié envers et contre tout. On sourit et rit de bon cœur à ses saillies délivrées avec un naturel confondant et une bienveillance au-dessus de tous soupçons.
Cependant – ah décidément, il y aura donc toujours un spectateur en-vieux trouvant à redire… –, même si on apprécie à sa valeur la richesse de ses points de vue aiguisés sur le monde du spectacle et de ses adeptes, on se prend parfois à regretter que l'humoriste semble retenir ses flèches… Il est vrai que l'humour noir et la causticité sans retenue, propres au mentor de l'humour cité en préambule, se sont au cours des temps édulcorés, signes d'une époque (cf. les humoristes débarqués de France Inter pour avoir exercé sans filtre l'art de leur humour débridé) où l'on tient à ménager – coûte que coûte – l'artistiquement correct.
◙ Yves Kafka
Vu le mercredi 12 novembre 2025 au Carré-Colonnes de Blanquefort (33).
On se délecte de l'humour (r)affiné de Jérôme Rouger, expert en l'art de démonter les ressorts animant le sérail constitué par le chœur des "spectatrices", son allié envers et contre tout. On sourit et rit de bon cœur à ses saillies délivrées avec un naturel confondant et une bienveillance au-dessus de tous soupçons.
Cependant – ah décidément, il y aura donc toujours un spectateur en-vieux trouvant à redire… –, même si on apprécie à sa valeur la richesse de ses points de vue aiguisés sur le monde du spectacle et de ses adeptes, on se prend parfois à regretter que l'humoriste semble retenir ses flèches… Il est vrai que l'humour noir et la causticité sans retenue, propres au mentor de l'humour cité en préambule, se sont au cours des temps édulcorés, signes d'une époque (cf. les humoristes débarqués de France Inter pour avoir exercé sans filtre l'art de leur humour débridé) où l'on tient à ménager – coûte que coûte – l'artistiquement correct.
◙ Yves Kafka
Vu le mercredi 12 novembre 2025 au Carré-Colonnes de Blanquefort (33).
"Conseils aux spectateurs"
Texte : Jérôme Rouger.
Mise en scène : Jérôme Rouger.
Avec : Jérôme Rouger.
Lumières : Mathieu Marquis.
Regard intérieur : Patrice Jouffroy dit Jouf'.
Par Cie La Martingale.
Durée : 1 h15.
Représenté mercredi 12 et jeudi 13 novembre 2025 à la Scène nationale du Carré-Colonnes de Blanquefort (33).
Tournée
25 novembre 2025 : Théâtre Béhéria - Les Escales, Réseau 535, Bidart (64).
14 janvier 2026 : Le Moulin du Roc - Scène nationale, Niort (79).
29 janvier 2026 : Espace des Augustins, Montauban (82).
31 janvier 2026 : La Saison Sud-Hérault - L'Étape, Pierrerue (34).
6 février 2026 : Le Pays Valois - Communauté de Communes, Lévignen (60).
28 février 2026 : R2B, Vouneuil-sous-Biard (86).
13 mars 2026 : Festival Quand on conte, Nouaille-Maupertuis (86).
21 mai 2026 : Rencontres Théâtrales, Saint-Jean-de-Boiseau (44).
4 juin 2026 : Festival Ah !, Parthenay (79).
Mise en scène : Jérôme Rouger.
Avec : Jérôme Rouger.
Lumières : Mathieu Marquis.
Regard intérieur : Patrice Jouffroy dit Jouf'.
Par Cie La Martingale.
Durée : 1 h15.
Représenté mercredi 12 et jeudi 13 novembre 2025 à la Scène nationale du Carré-Colonnes de Blanquefort (33).
Tournée
25 novembre 2025 : Théâtre Béhéria - Les Escales, Réseau 535, Bidart (64).
14 janvier 2026 : Le Moulin du Roc - Scène nationale, Niort (79).
29 janvier 2026 : Espace des Augustins, Montauban (82).
31 janvier 2026 : La Saison Sud-Hérault - L'Étape, Pierrerue (34).
6 février 2026 : Le Pays Valois - Communauté de Communes, Lévignen (60).
28 février 2026 : R2B, Vouneuil-sous-Biard (86).
13 mars 2026 : Festival Quand on conte, Nouaille-Maupertuis (86).
21 mai 2026 : Rencontres Théâtrales, Saint-Jean-de-Boiseau (44).
4 juin 2026 : Festival Ah !, Parthenay (79).

























