Les Avant-Postes, en lien étroit avec le tnba (Théâtre national de Bordeaux Aquitaine), nous invitent à franchir le seuil de leur théâtre niché au cœur du quartier Saint-Michel de Bordeaux pour rencontrer la nouvelle création de l'autrice, metteuse en scène et interprète de "Carte noire nommée désir". Dans cette forme intimiste – éloignée de celle spectaculaire pour huit actrices noires ayant défrayé la chronique du Festival IN d'Avignon 2023, tant la pertinence impertinente de son propos était sans appel – l'expression joyeuse est de mise, mâtinée d'une touche savoureuse de complicité avec le public pris pour allié.
Après un prélude savoureux où la voix off de Rébecca parodie la présentation sirupeuse d'une quelconque série – "Tout est calme… Les lois de la nature sont respectées… La Sainte Famille se reproduit… Rien ne bouge… Tout est sous contrôle" – les enjeux sont précisés sous une forme à forte connotation humoristique… "Mais Sandra rêve de créer une gouineraie. Elle rêve que Rébecca la rejoigne ; mais elle a théâtre…". Le ton est donné et l'arrivée improbable des deux gouines sur un attelage de tracteur tout droit extrait d'un catalogue de Jouéclub confirme que ce soir on ne va pas être à court de surprises décalées.
Après un prélude savoureux où la voix off de Rébecca parodie la présentation sirupeuse d'une quelconque série – "Tout est calme… Les lois de la nature sont respectées… La Sainte Famille se reproduit… Rien ne bouge… Tout est sous contrôle" – les enjeux sont précisés sous une forme à forte connotation humoristique… "Mais Sandra rêve de créer une gouineraie. Elle rêve que Rébecca la rejoigne ; mais elle a théâtre…". Le ton est donné et l'arrivée improbable des deux gouines sur un attelage de tracteur tout droit extrait d'un catalogue de Jouéclub confirme que ce soir on ne va pas être à court de surprises décalées.
Ainsi, pendant que Sandra – la gouine des champs – s'affairera à la construction d'étagères pour accueillir Rébecca – sa bienaimée d'un 50 m² parisien –, l'extravagante gouine des villes, revêtue d'une robe motif peau de vache, rehaussée d'un vert à lèvres et de boucles d'oreille que "La Vache qui rit" aurait enviées, va s'employer à défaire ses cartons étiquetés "Fleurs, Plants de gouines", tout en faisant crier à tue-tête, sur un électrophone vintage, un 33 tours de Joe Dassin. Très vite, elle troquera sa robe pour une chemise (trop courte) de Sandra, dévoilant là son imposant fessier n'ayant d'égal en dimensions que celui de son QI imposant…
Juchée en haut d'un escabeau offrant une perspective de premier plan sur les arrières de sa généreuse anatomie exhibée avec fierté, Rébecca s'emploiera longuement, très longuement, à enduire le mur de colle afin d'y apposer des lés de tapisserie échouant dans la salle… reliée ainsi au plateau pour "faire communauté". L'opération dure, dure, jusqu'à créer un sentiment d'ennui vite réévalué… Et s'il s'agissait là d'un sas offert pour se déconditionner de nos existences réglées comme du papier à musique, nous corsetant dans un temps qui n'est pas le nôtre, mais celui d'une société consumériste faisant profit de nos vies ?
Les prises de paroles – à résonances poétiques et politiques – autant de Rébecca que de Sandra au micro mettront magistralement en abyme l'humour assumé de la représentation scénique et la profondeur de la réflexion induite par les choix humanistes de ces deux femmes hors normes. Promouvant une liberté incluant leurs sœurs et frères humains sans distinction de genre, de couleur de peau ou autres différences à relents identitaires, elles apparaissent comme les adeptes (généreuses et modestes…) d'un art de vivre expurgé de tous diktats, que ce soient ceux imposés par un patriarcat gardien immémorial d'un ordre inique ou ceux, plus branchés, d'injonctions new-âge porteuses dans leurs plis séduisants de dérives liberticides.
Sandra disposant religieusement des vierges de plastique autour d'une église miniature et s'aspergeant d'eau bénite à sa sauce, Rébecca s'enduisant le corps entier de colle avant d'y apposer des morceaux de tapisserie la faisant se confondre magnifiquement avec le décor, ou encore Rébecca recevant entre ses cuisses puissantes le collier trophée tête de cerf offert en cadeau par sa compagne… Autant de péripéties surréalistes au service d'une cause elle bien réelle : seule une maison bancale et bruyante, composée de pièces qui s'enfilent, et peuplée de visiteuses et visiteurs de tous genres – "les brebis égarées de l'hétérosexualité" sont conviées, elles aussi – est de nature à combler le besoin vital de désirs authentiques.
Juchée en haut d'un escabeau offrant une perspective de premier plan sur les arrières de sa généreuse anatomie exhibée avec fierté, Rébecca s'emploiera longuement, très longuement, à enduire le mur de colle afin d'y apposer des lés de tapisserie échouant dans la salle… reliée ainsi au plateau pour "faire communauté". L'opération dure, dure, jusqu'à créer un sentiment d'ennui vite réévalué… Et s'il s'agissait là d'un sas offert pour se déconditionner de nos existences réglées comme du papier à musique, nous corsetant dans un temps qui n'est pas le nôtre, mais celui d'une société consumériste faisant profit de nos vies ?
Les prises de paroles – à résonances poétiques et politiques – autant de Rébecca que de Sandra au micro mettront magistralement en abyme l'humour assumé de la représentation scénique et la profondeur de la réflexion induite par les choix humanistes de ces deux femmes hors normes. Promouvant une liberté incluant leurs sœurs et frères humains sans distinction de genre, de couleur de peau ou autres différences à relents identitaires, elles apparaissent comme les adeptes (généreuses et modestes…) d'un art de vivre expurgé de tous diktats, que ce soient ceux imposés par un patriarcat gardien immémorial d'un ordre inique ou ceux, plus branchés, d'injonctions new-âge porteuses dans leurs plis séduisants de dérives liberticides.
Sandra disposant religieusement des vierges de plastique autour d'une église miniature et s'aspergeant d'eau bénite à sa sauce, Rébecca s'enduisant le corps entier de colle avant d'y apposer des morceaux de tapisserie la faisant se confondre magnifiquement avec le décor, ou encore Rébecca recevant entre ses cuisses puissantes le collier trophée tête de cerf offert en cadeau par sa compagne… Autant de péripéties surréalistes au service d'une cause elle bien réelle : seule une maison bancale et bruyante, composée de pièces qui s'enfilent, et peuplée de visiteuses et visiteurs de tous genres – "les brebis égarées de l'hétérosexualité" sont conviées, elles aussi – est de nature à combler le besoin vital de désirs authentiques.
Des confidences de l'une et de l'autre se succéderont, confidences où il sera question sans fard – avec parfois gravité et souvent humour – de leur parcours personnel marqué par les heurs et malheurs d'existences vécues pleinement. Comment l'une a eu affaire à un père afro-américain policier gueulard, comment l'autre issue d'une classe moyenne conforme sous tous rapports est devenue une "lesbienne à gosses" (qu'elle aime)… Il ressortira de leurs témoignages – en plagiant Pierre Bourdieu – que "la vie est un sport de combat". Et même si son issue est par avance connue, la seule option offerte est de mener cette traversée terrestre en accord avec nos désirs profonds.
Quant à la chute – à découvrir ! –, elle constitue, au-delà de la tendresse palpable, un tableau de maître(sses)… à ne pas mettre peut-être (ou si justement !) sous les yeux des unes et des uns coincés du cul… Vivre sans temps mort, vivre ses désirs dans le respect du consentement… Mantra précieux d'un théâtre généreux mettant en jeu – avec intelligence, finesse et humour débridé – "le dur désir" (Paul Éluard)… d'être.
◙ Yves Kafka
Vu le vendredi 12 décembre 2025 aux "Avant-Postes", en relation avec le tnba (Théâtre national Bordeaux Aquitaine).
Quant à la chute – à découvrir ! –, elle constitue, au-delà de la tendresse palpable, un tableau de maître(sses)… à ne pas mettre peut-être (ou si justement !) sous les yeux des unes et des uns coincés du cul… Vivre sans temps mort, vivre ses désirs dans le respect du consentement… Mantra précieux d'un théâtre généreux mettant en jeu – avec intelligence, finesse et humour débridé – "le dur désir" (Paul Éluard)… d'être.
◙ Yves Kafka
Vu le vendredi 12 décembre 2025 aux "Avant-Postes", en relation avec le tnba (Théâtre national Bordeaux Aquitaine).
"La Gouineraie"
Texte : Sandra Calderan et Rébecca Chaillon, artiste associée au tnba.
Mise en scène : Sandra Calderan et Rébecca Chaillon.
Avec : Sandra Calderan et Rébecca Chaillon.
Régies : Suzanne Péchenart.
Collaboration artistique et aide à la dramaturgie : Céline Champinot.
Collaboration à la scénographie : Camille Riquier.
Traduction, surtitrage : Lisa Wegener.
Déconseillé aux moins de 15 ans.
Compagnie des Hauts Parleurs et Compagnie dans le Ventre.
Durée version française : 1 h 40.
Durée version avec surtitres : 1 h 50.
Contient des scènes de nudité.
A été représenté du 9 au 13 décembre 2025 aux "Avant-Postes" de Bordeaux, en collaboration avec le tnba (Théâtre national Bordeaux Aquitaine).
Tournée
Du 12 au 21 mars 2026 : T2G, Gennevilliers (92).
Du 25 au 28 mars 2026 : Théâtre Sorano, Toulouse (31).
Spectacle disponible en tournée sur la saison 26/27.
Mise en scène : Sandra Calderan et Rébecca Chaillon.
Avec : Sandra Calderan et Rébecca Chaillon.
Régies : Suzanne Péchenart.
Collaboration artistique et aide à la dramaturgie : Céline Champinot.
Collaboration à la scénographie : Camille Riquier.
Traduction, surtitrage : Lisa Wegener.
Déconseillé aux moins de 15 ans.
Compagnie des Hauts Parleurs et Compagnie dans le Ventre.
Durée version française : 1 h 40.
Durée version avec surtitres : 1 h 50.
Contient des scènes de nudité.
A été représenté du 9 au 13 décembre 2025 aux "Avant-Postes" de Bordeaux, en collaboration avec le tnba (Théâtre national Bordeaux Aquitaine).
Tournée
Du 12 au 21 mars 2026 : T2G, Gennevilliers (92).
Du 25 au 28 mars 2026 : Théâtre Sorano, Toulouse (31).
Spectacle disponible en tournée sur la saison 26/27.
























