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Lyrique

Mariage de raison entre le Festival d'Aix-en-Provence et le Beijing Music Festival

Alors que Bernard Foccroulle entame son avant-dernière saison comme directeur général du Festival d'Aix, il vient de conclure avec le festival de Pékin un accord de collaboration de cinq ans. En patron avisé, il contribue ainsi au développement d'un des plus réputés festivals lyriques au monde avec ce mariage qui jette un pont entre cultures occidentale et orientale.



"Songe d'une nuit d'été" de Benjamin Britten © Pascal Victor/Artcomart.
"Songe d'une nuit d'été" de Benjamin Britten © Pascal Victor/Artcomart.
Cet accord avec le Beijing Music Festival, un des plus importants de l'Empire du Milieu, débutera en octobre 2016 avec la présentation, au Poly Theatre de Pékin, de la fameuse production aixoise de Robert Carsen du "Songe d'une nuit d'été" de Benjamin Britten. Totalement enthousiasmant, ce spectacle est régulièrement repris dans le monde (dont Aix l'an dernier) depuis sa création.

L'autre grande réussite en 2012 du Festival d'Aix, sous le mandat de Bernard Foccroulle, le "Written on Skin" de George Benjamin, mis en scène par Katie Mitchell, sera programmé en 2017 pour les vingt ans du festival chinois. Les chefs Steuart Bedford (pour le Britten) et Franck Ollu (pour le Benjamin) seront à la tête du China Philharmonic Orchestra à Pékin.

Le Beijing Music Festival, dirigé par le chef Long Yu (1) depuis sa création en 1998, reprendra également en 2018 la très prometteuse production du "Pelléas et Mélisande" de Debussy que l'anglaise Katie Mitchell propose cette année à Aix. Ce sera sans doute une première en Chine pour le drame créé à l'Opéra Comique en 1902 à Paris. Partageant valeurs et objectifs communs, les deux festivals s'allient donc en vue de favoriser de nombreux échanges dans divers domaines. Deux commandes d'œuvres sont d'ores et déjà prévues à l'horizon 2019-2020 - dont une à un compositeur chinois.

© DR.
© DR.
Rappelons que l'édition 2016 du plus emblématique festival d'art lyrique français met à l'affiche cinq nouvelles productions sur six opéras et oratorios. Outre le "Pelléas", dirigé par Esa-Pekka Salonen avec Stéphane Degout et Barbara Hannigan, sont prévus un nouveau Mozart revisité par le cinéaste Christophe Honoré ("Cosi fan tutte") et un "Oedipus Rex" d'Igor Stravinsky vu par le grand Peter Sellars (2).

Plus rares, des œuvres de Haendel ("Il Trionfo del Tempo e del Disinganno", sorte de psychomachie opératique avec Sabine Devielhe et Franco Fagioli)) et de Jean-Philippe Rameau ("Zoroastre", dirigé par Raphaël Pichon à la tête de son Ensemble Pygmalion) seront proposées à la curiosité du public. Sans oublier une création mondiale, "Kalîla wa Dimna" de Moneim Adwan (chanté en arabe et parlé en français), qui réunira heureusement en ces temps troublés les deux bords de la Méditerranée.

(1) Le chef Yong Lu, formé au conservatoire de Shanghaï et à la Hochschule der Kunst de Berlin, est directeur musical du China Philharmonic Orchestra et du Guangzhou Symphony Orchestra.
(2) À l'oratorio co-écrit avec Jean Cocteau seront adjoints des extraits de "Antigone" de Sophocle et la "Symphonie des Psaumes" du compositeur russe.

Festival d'Aix-en-Provence
Du 30 juin au 19 juillet 2016.
Palais de l'Ancien Archevêché, Aix-en-Provence (13).
Renseignements : 08 20 922 923 (12 cts €/min) dès le 5 janvier 2016.
>> festival-aix.com

Christine Ducq
Lundi 29 Février 2016

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Concerts | Lyrique







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"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024