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Avignon 2017

•Avignon Off 2017• Deux femmes dans un huis clos : l'une fille de bourreau, l'autre fille de victime

"L'Hiver de la Cigale", Artéphile, Avignon

Quand l'heure d'ouvrir le coffre scellé des souvenirs sonne, il faut se tenir prête. C'est peut-être ce que veut exprimer l'auteur de ce texte, Pietro Pizzuti. Faire fi de son passé, l'écarter soigneusement de sa conscience grâce à une frénésie d'activité, oublier le drame d'où l'on vient pour réussir à vivre sa vie, c'est ce que fait l'un des personnages de cette pièce.



© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
L'autre invente aussi (elles partagent cela toutes deux), elle s'invente une identité mais dans un but contraire : celui de résoudre un drame de son enfance, de retrouver son identité, en réglant ses comptes et ceux de la justice.

Elles se rencontrent là, sur le plateau, dans une prison, un parloir. L'une, Laura Welter, prisonnière accusée de meurtre, l'autre Nathalie Franchi, avocate spécialiste de la Convention des droits de l'Homme. Mais cette rencontre n'est pas le fruit du hasard. Elle a été planifiée depuis des années. Des années que Laura Welter sait que ce jour-là, elle se retrouvera en face de cette avocate-là, et que l'explication devra avoir lieu.

La scène se déroule dans une prison d'Europe mais l'histoire s'est passée dans un pays d'Amérique du Sud. C'est depuis ce continent que l'action, que le meurtre a été organisé. Une exécution en fait. L'exécution décidée par un tribunal populaire. L'exécution du dictateur, du bourreau aux mains rougies. Une exécution accomplie en Europe pour que la rencontre à laquelle nous assistons puisse avoir lieu et que le crime soit proclamé acte de justice. Il s'agit aussi de cela. Terrorisme ou Justice ? Qui peut le dire ? La frontière est diaphane, parfois, dépend du point de vue.

© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
Je m'empêche de dévoiler plus loin le récit. Un récit particulier qui met en acte l'héritage des parents fait aux enfants, l'héritage du bourreau, l'héritage de la victime et la légitimité ou non de l'exécution du monstre. Du droit des victimes, du droit des coupables. De l'acte de justice fait en dehors de voies de justice.

Le texte de Pietri Pizzuli se construit à l'aide de thématiques et de situations qui se croisent dans l'espace comme des axes de pensées : l'axe des dictatures et des massacres et des tortures, l'axe de la mémoire, des mémoires, celles de l'Histoire, celles des individus, l'axe de la cour de justice internationale, celui de l'Europe face à celui de l'Amérique du sud, l'axe de la vengeance, l'axe de l'insupportable héritage…

Cela forme un treillis riche, entrecroisé, qui parsème le dialogue vif et intime des deux personnages qui se déroule par entrevues successives bien rythmées par des changements rapides et efficaces du décor et des respirations musicales courtes et dynamiques, très rock.

© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
Maria Cristina Mastrangeli, qui a mis en scène et interprète le rôle de l'accusée, est d'une vérité extrême, le corps planté au sol, forte, elle incarne avec pertinence l'être blessé mais aussi guerrier qu'est son personnage. Elsa Bosc crée une avocate internationale un peu moins affirmée, cantonnée durant un temps dans une indifférence administrative, mais qui se dévoile peu à peu et finit par soutenir le défi lancé par sa partenaire.

Et le propos du texte, la question du rôle que l'on doit jouer au monde, la question de la culpabilité, la question de l'acte à faire pour se réaliser pour être en accord avec ce auquel on croit, la question de l'héritage paternel ensuite, toutes ces questions tournent et emplissent l'espace du théâtre, et tournent encore longtemps après.

"L'Hiver de la Cigale"

© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
© Yu.Ta (Jutta Sammel-Mastrangeli).
À partir de 12 ans.
Texte : Pietro Pizzuti (Lansman Éditeur).
Mise en scène : Maria Cristina Mastrangeli.
Avec : Elsa Bosc, Maria Cristina Mastrangeli, et la voix d'Armand Gatti.
Chanson originale : "Burning lies" de Andrea Galeazzi, interprétée par Ruppert Pupkin.
Création lumière : Jean-Pierre Michel.
Régie lumière : Vera Martins.
Scénographie : Boris Dambly.
Durée 1 h 15.

•Avignon Off 2017•
Du 7 au 28 juillet 2017.
Tous les jours à 19 h 45 (relâche le mercredi).
Artéphile, Salle 1,
7, rue du Bourg Neuf, Avignon.
Réservations : 04 90 03 01 90.
>> artephile.com


Bruno Fougniès
Samedi 22 Juillet 2017

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À Découvrir

"Différente" Carolina ou "Cada uno es un mundo (Chacun est un monde)"

Star internationale à la frange rouge, Carolina est de retour en France, après sa tournée mondiale. Heureuse de retrouver son public préféré, elle interprète en live des chansons populaires qui touchent le cœur de toutes les générations.

© Audrey Bären.
Mais qui est donc cette incontournable Carolina ? Ou, plus exactement, qui se cache derrière cette artiste plutôt extravagante, à la folie douce ? De qui est-elle l'extension, au juste ?

L'éternelle question autour de l'acte créatif nous interpelle souvent, et nous amène à nous demander quelles influences l'homme ou la femme ont-ils sur leurs "créatures" fabriquées de toutes pièces ! Quelles inspirations les ont portées ! Autant de questions qui peuvent nous traverser particulièrement l'esprit si tant est que l'on connaisse un peu l'histoire de Miguel-Ange Sarmiento !

Parce que ce n'est pas la première fois que Carolina monte sur scène… Décidément, elle en a des choses à nous dire, à chaque fois. Elle est intarissable. Ce n'est pas Rémi Cotta qui dira le contraire, lui qui l'accompagne depuis déjà dix ans et tire sur les ficelles bien huilées de sa vie bien remplie.

Rémi Cotta, artiste plasticien, graphiste, comédien, chanteur lyrique, ou encore metteur en scène, sait jouer de ses multiples talents artistiques pour confier une parole virevoltante à notre Carolina. Il suffit de se souvenir du très original "Carolina Show", en 2010, première émission de télé sans caméra ayant reçu de nombreux artistes connus ou moins connus ou le "Happy Show de Carolina", ainsi que les spectacles musicaux "Carolina, naissance d'une étoile", "Le Cabaret de Carolina", ou encore " Carolina, L'Intelligence Artificielle".

"Différente" est en réalité la maturation de plusieurs années de cabarets et de spectacles où Carolina chante pourquoi et comment elle est devenue une star internationale tout en traversant sa vie avec sa différence". Miguel-Ange Sarmiento.

Brigitte Corrigou
08/11/2024
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"Tout va très bien !" Le Grand Orchestre du Splendid, bon pied bon œil, revient avec de la musique sur tous les fronts

Voir les choses en grand tout en restant léger ! Prendre du plaisir et, surtout, en donner ! Voilà la philosophie du Grand orchestre du Splendid qui régale le public depuis 1977. Bientôt 50 ans… Bientôt le jubilé. "De la musique avant toute chose" et vivre, vivre, vivre…

© Aurélie Courteille.
En 1977, quelques amis musiciens professionnels se retrouvent entre eux et décident de s'amuser en réinterprétant des classiques tels que ceux de Ray Ventura ou de Duke Ellington. Ce qui ne devait être qu'un plaisir entre copains devient vite un succès immédiat qui dure depuis presque 50 ans. Mais quel est donc le secret de cette longévité entre rythmes endiablés, joyeuses cadences et show totalement désopilants ?

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Brigitte Corrigou
13/11/2024
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"Jacques et Chirac" Un "Magouille blues"* décapant et burlesque n'occultant pas le mythe du président sympa et séducteur

Une comédie satirique enjouée sur le pouvoir, le mensonge et la Cinquième République portée par une distribution tonitruante et enthousiaste, dégustant avec gourmandise le texte de Régis Vlachos pour en offrir la clownesque et didactique substantifique moelle aux spectateurs. Cela est rendu aussi possible grâce à l'art sensible et maîtrisé de l'écriture de l'auteur qui mêle recherche documentaire affinée, humour décapant et bouffonnerie chamarrée pour dévoiler les tours et contours d'un Jacques sans qui Chirac ne serait rien.

© Fabienne Rappeneau.
Portraitiste décalé et impertinent d'une Histoire de France ou de l'Humanité aux galbes pas toujours gracieux dont surgissent parfois les affres de notre condition humaine, Régis Vlachos, "Cabaret Louise" (Louise Michel), "Dieu est mort" (Dieu, mieux vaut en rire)"Little Boy" (nom de la bombe larguée sur Hiroshima), revient avec un nouveau spectacle (création 2023) inspiré d'un des plus grands scandales de notre histoire contemporaine : la Françafrique. Et qui d'autre que Jacques Chirac – l'homme qui faisait la bise aux dictateurs – pouvait être convoqué au "tribunal" du rire et de la fantaisie par l'auteur facétieux, mais doté d'une conscience politique aiguë, qu'est Régis Vlachos.

Le président disparu en 2019 fut un homme complexe composé du Chirac "bulldozer" en politique, menteur, magouilleur, et du Jacques, individu affable, charmeur, mettant autant la main au cul des vaches que des femmes. Celui-ci fut d'abord attiré le communisme pour ses idéaux pacifistes. Il vendra même L'Humanité-dimanche devant l'église Saint-Sulpice.

La diversité des personnalités importantes qui marquèrent le début de son chemin politique joue tout autant la complexité : Michel Rocard, André Malraux et, bien sûr, Georges Pompidou comme modèle, Marie-France Garaud, Pierre Juillet… et Dassault comme portefeuille ! Le tout agrémenté de nombre de symboles forts et de cafouillages désastreux : le bruit et l'odeur, la pomme, le cul des vaches, les vacances à l'île Maurice, les amitiés avec les despotes infréquentables, l'affaire ELF, etc.

Gil Chauveau
03/11/2024