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Théâtre

Apparaît, dans une parade discrète, la virtuosité de funambule d'Aurélia Thierrée

"Murmures des murs", Théâtre du Rond-Point, Paris

La scène de théâtre vue par Victoria Thierrée-Chaplin est un bonheur pour régisseur fou et une source d'enchantement pour le spectateur. Boîtes d'escamotages qui engloutissent les acteurs, accessoires qui se perdent et réapparaissent inopinément, maisons de toiles peintes sur châssis se mouvant, appelés, reculés, par des chariots invisibles mais qui brinquebalent (quelque peu) et ouvrent ou ferment l'espace en rideau…



© Richard Haugton.
© Richard Haugton.
Tous éléments de décors qui, par leur apparence primitive et leur évidence, traquent les comédiens, retiennent l'attention du spectateur et magnifient hautement un jeu de transformation et d'illusion.

La fable de "Murmures des murs" est simple. Elle est celle d'une jeune fille (pauvre orpheline bien connue du mélodrame et des films de Charlie Chaplin) obligée de déménager. Sa maison vétuste et ancienne est vouée à la démolition. La ville pourrait être le vieux Venise, le vieil Istanbul ou tout autre site à l'urbanité forte dont le poids des murs est la chair des souvenirs.

La jeune occupante perd ses nerfs, erre et bascule dans un état de résistance avec la complicité apparente de toutes les ressources de l'âme des objets inanimés qui l'accompagnent. De venelles en venelles, par une succession d'hallucinations, elle parvient à un point de non-retour. Ces murs mourant murmurent trop fort pour elle.

© Richard Haugton.
© Richard Haugton.
Le spectateur est captivé par la succession de saynètes qui, centrées autour de l'art de la pantomime, avec changements de costumes et mime au présent (avec accessoires)*, glisse progressivement et souplement d'un univers vériste à celui du merveilleux, tout en passant discrètement en revue un répertoire qui va de Jean-Baptiste Deburau à Méliès et Chaplin.

Ce théâtre réussit un subtil mélange entre fantasmagorie et drame, retient le rire tout en lui préservant la liberté de jaillir spontanément. Il a la force du conte qui sait décrire tout à la fois la tragédie de la vie et la foi enfantine en la forêt enchantée.

Dans cette histoire, les comédiens touchés par la grâce escortent, dans une parade discrète, la virtuosité de funambule d'Aurélia Thierrée qui transcende le genre et danse au-dessus du vide. Sublime. Aux murs mourant est opposée c'est sûr la force de l'amour.

*À l'opposé de la tradition de Marcel Marceau qui fait du mime à l'absent.

"Murmures des murs"

© Richard Haugton.
© Richard Haugton.
Conception et mise en scène : Victoria Thierrée-Chaplin.
Avec : Aurélia Thierrée accompagnée de Jaime Martinez, Antonin Maurel.
Scénographie : Victoria Thierrée-Chaplin.
Lumières : Thomas Dobruszkès.
Costumes : Véronique Grand, Jacques Perdiguez, Monika Schwarzl, Victoria Thierrée-Chaplin.
Chorégraphie : Victoria Thierrée-Chaplin, Armando Santin.
Durée : 1 h 20.

Du 4 mai au 23 mai 2015.
Du lundi au samedi à 21 h, dimanche à 15 h.
Relâche le dimanche 10 mai et les 5 mai , 8 mai , 9 mai , 14 mai et 18 mai 2015.
Théâtre du Rond-Point, salle Renaud-Barrault, Paris 8e, 01 44 95 98 21.
>> theatredurondpoint.fr

Jean Grapin
Mercredi 13 Mai 2015

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