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Lyrique

Le Détachement féminin rouge attaque le Châtelet

Le Ballet national de Chine revient à Paris pour deux spectacles : "Le lac des Cygnes", un ballet classique, jusqu’au 29 septembre et "Le Détachement féminin rouge", un ballet populaire chinois des années Mao, du 1er au 3 octobre au Théâtre du Châtelet.



© DR.
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Fidèle du Théâtre du Châtelet et sensation de ce début d’automne, c’est le retour du Ballet national de Chine à Paris. Réputé pour son exigence et son excellence, le Ballet fondé en 1959, seule compagnie nationale de danse en Chine à ce jour, a toujours su mêler les cultures chorégraphiques occidentales et orientales, russe, chinoise, acrobatique. Les artistes qui le composent sont recrutés dans tout le pays sous la houlette de l’ancienne étoile devenue maître de ballet puis directrice artistique, Feng Ying.

Aussi à l’aise dans les tutus des grands classiques du ballet comme "Le Lac des Cygnes" de Tchaïkovski, chorégraphié par Marius Petipa, que dans les uniformes des spectacles de propagande de la Révolution culturelle sous Mao, les danseurs, littéralement époustouflants, brillent par la virtuosité et la perfection de la technique. Qui a vu "Le dernier Empereur", la très belle fresque de Bernardo Bertolucci, peut témoigner de la durable fascination que cet art exerce sur les Occidentaux. En 1972, c’est ce ballet "Le Détachement rouge féminin" que verra Richard Nixon, lors de sa visite officielle dans l’Empire du Milieu.

© DR.
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Quel est l’argument du "Détachement féminin rouge" ? Dans les années trente en Chine, la guerre civile fait rage, opposant les forces gouvernementales aux Kuomintang dirigé par le général Tchiang Kai-Chek et aux combattants communistes de Mao. Le parti communiste clandestin chinois décide de créer une armée féminine pour défendre la cause, ce qu’elle fera pendant deux années. Plus de deux cents femmes se battront sur plusieurs fronts et se sacrifieront sur le long chemin de la Grande Marche maoïste au pouvoir.

C’est cette histoire que raconte le ballet, créé au Théâtre du Tianqiao en 1964, d’après un film éponyme, et sous les auspices de la femme du Grand Timonier, Jiang Qing, qui le commandite - elle qui était une ancienne actrice. La qualité proprement cinématographique de ce ballet n’est pas étrangère à la réussite du film de Zhe Jun retraçant cette épopée féminine. De là l’admiration que vouent deux grands réalisateurs tels Chen Kaige et Zhang Yimou au film comme à l’opéra ballet chinois. À voir absolument.

© DR.
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Spectacles les mardi 1er, mercredi 2 et jeudi 3 octobre 2013 à 20 h.
Théâtre du Châtelet, 01 40 28 28 40.
1 place du Châtelet, Paris 1er.

"Le Détachement féminin rouge",
d’après le scénario de Liang Xin.
Musique : Wu Zuqiang, Du Minxin, Dai Hongwei, Shi Wanchun, Wang Yanqiao.
Musique du chant de propagande : Huang Zhun.
Chorégraphies : Li Chengxiang, Jiang Zuhui, Wang Xixian.
Scénographie : Ma Yunhong.
Lumières : Liang Hongzhou.
Orchestre national d’Ile de France.
Avec : Zhang Jian, Lu Na, Zhu Yan, Hong Changqing, Li Jie, Lu Di, Wang Qi, Wang Ye, Zheng Yu, Zhou Zhaohui.

Le Détachement féminin rouge attaque le Châtelet

Christine Ducq
Vendredi 27 Septembre 2013

Concerts | Lyrique







À Découvrir

"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024