La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Festivals

Tours Circus : Sous l’œil de verre des sentinelles de béton... le parvis devint cirque

06/09 au 08/09/2012, La Défense - Tours Circus, Hauts-de-Seine

Début septembre, c'est encore un peu les vacances... Ou, du moins, feignons de le croire si le soleil daigne encore nous gratifier quelque peu de sa présence. Ici, c'est au milieu des géants de béton de La Défense que se déroule la deuxième édition de ce jeune festival des arts de la rue et du cirque... proposant une dizaine de spectacles gratuits sur trois jours. Point d'orgue de cette manifestation, le spectacle "TRANSITion" de la Compagnie allemande Pan.Optikum dont le "gigantisme" sera à la démesure des monstres architecturaux guettant de leurs hauteurs le parvis.



Cie Pan.Optikum "TRANSITion" © Matthias Kolodziej.
Cie Pan.Optikum "TRANSITion" © Matthias Kolodziej.
Organisé par le Conseil général des Hauts-de-Seine et Defacto (Établissement public de gestion, d’animation et de promotion de La Défense) avec le soutien du Réseau Déambulation, le festival La Défense Tours Circus invite donc une dizaine de compagnies de rue de renommée internationale... histoire de dérider les hommes d'affaires en-cravatés des tours avoisinantes et régaler les spectateurs qui avaient déjà répondus présents et nombreux lors de la 1ère édition.

Les cadres en costumes trois pièces pourront d'ailleurs compter sur la Brigade d’Intervention Poétique Briseuse d’Idées Plates (La Cave à théâtre) pour leur fournir, avec humour et entrain, toutes les informations dont ils ont besoin - "Quand arrive la BIP BIP, tout s’éclaire, tout s’explique, car c’est l’info qui rapplique !".

Annibal et ses éléphants "Le film du dimanche soir" © DR.
Annibal et ses éléphants "Le film du dimanche soir" © DR.
Parmi les autres compagnies invitées, arrivant presque tout droit du festival d'Aurillac, Annibal et ses Éléphants présentera, avec son "film du dimanche soir : The Wild Witness", sa vision burlesque, ludique et fantaisiste du cinéma forain. Le Cirque Baroque, quant à lui, jouera aussi la partition burlesque avec "Happy End", revendiqué comme "un nouveau cirque à l'ancienne" où les artistes s'amusent à revisiter leurs numéros, entre tradition et contemporanéité, mettant pour cela en scène l'histoire de descendants d'un historique cirque des années trente, détenteur d'une grande mais classique tradition de la piste confrontés à l'urgence de créer un spectacle "moderne".

Cie Pipototal "Basculoscopia" © Bénédicte Deramaux.
Cie Pipototal "Basculoscopia" © Bénédicte Deramaux.
Un des moments forts du festival sera sans aucun doute la monumentale et impressionnante machine - et aventure galactique et féérique - de la Cie Pipototal, tout droit sortie de l’imaginaire de Jules Verne. Cette structure mécanique et métallique, "Basculoscopia", digne des dessins de Léonard de Vinci, est composée de mécanismes permettant de générer de l'acrobatie et a pour machinerie centrale un Basculoscope autour duquel sont disposés des plateaux accueillants des agrès et des instruments de musiques à percussions... L'ensemble est fixé sur une "tournette" géante effectuant une révolution d'une heure... correspondant à la durée du spectacle. Le temps d'un véritable voyage dans un pays imaginaire à bord du vaisseau du "Magister" et de son équipage !

Cie Pipototal "Basculoscopia" © Bénédicte Deramaux.
Cie Pipototal "Basculoscopia" © Bénédicte Deramaux.
Également programmés : "Allure Verticale" de la Compagnie Alto, pièce chorégraphique et musicale, terrienne et aérienne, où se rencontre acrobates et danseur pour un échange rythmé tout en souplesse et élégance, avec la corde comme objet central, en rotation comme le pendule de Foucault... symbole du cosmos continuant à tourner... avec ou sans nous ;
"Où est Stern" par le Collectif Le Muscle, un western de rue surgissant du grand écran pour une mise en jeu au cœur du quotidien. Une histoire insolite qui prend le public comme acteur secondaire mais indispensable, et joue sur un comique de situation très "monty pythonien" et une mise en scène aux accents "moriconiens" ;
Midi 12 et sa "Fanfare électrique", six guitaristes au répertoire rock implacable, emmenant les spectateurs dans un voyage musical énergique et humoristique où sont revisités le gospel, la musique de film et les classiques populaires ;
Tibodypaint et "Les Folmaloïdes Dracos", ses créatures immenses, étranges et fantastiques venues d'ailleurs, et ses terriens acrobates. Une légende oubliée d'une civilisation d'un autre temps, entre domptage et apprivoisement, parlant du désir de retour... dans un monde de feu, où l'homme est "pictural"... une histoire de reconquête ;
En prélude à chaque journée, le Bonimenteur (Cie Les Bonimenteurs), reconnaissable à son chapeau et à son costume rétro, beau parleur et toujours de bonne humeur, annoncera les spectacles du jour avec une verve très fleurie. Un moment rare de poésie absurde.

Cie Pan.Optikum "TRANSITion" © Matthias Kolodziej.
Cie Pan.Optikum "TRANSITion" © Matthias Kolodziej.
Enfin, pour clore le festival, est convié sur le parvis, à l'ombre des géants de béton, le spectacle "TRANSITion" de la Compagnie Pan.Optikum. Ce spectacle grandiose, étonnant et envoûtant est inspiré de l’œuvre de Wajdi Mouawad, "Le soleil ni la mort".

Dans les métamorphoses d’Ovide, les êtres humains ou les demi-dieux sont transformés en animaux, en plantes ou en constellation pour un comportement précédent, qu’ils soient fautifs ou innocents. Refusant de changer d’idée ou de réviser leurs conceptions, les hommes sont ainsi mêlés dans des guerres et des combats, bien que ou justement parce que chacun travaille continuellement à se construire un nouveau monde "meilleur" pour soi-même. Construit sur le mythe du devin Teiresias qui observe les hommes dans leur lutte pour survivre, "TRANSITion" visualise, met en scène, en espace, en flamme, le besoin des hommes de croire inlassablement (utopie ?) en la construction d'un monde meilleur. Usant d'une machinerie imposante et spectaculaire, d'artifices lumineux, d'un son énergique et puissant, Pan.Optikum (associée pour ce spectacle avec EFIMER, groupe d'artistes catalans) n'en néglige pas pour autant la théâtralité du jeu, la qualité d'un texte riche mais accessible.

Tours Circus : Sous l’œil de verre des sentinelles de béton... le parvis devint cirque
"TRANSITion", théâtre/performance de rue vibrant comme un écho de la recherche d'un monde meilleur pourrait bien avoir une résonance particulière sur ce parvis soumis au regard des "Tours d'affaires" environnantes, sentinelles d'un "pouvoir" économique... qui aujourd'hui nous gouverne... D'où la nécessité du spectacle comme catharsis... comme une libération !

Du 6 au 8 septembre 2012.
La Défense Tours Circus,
2e édition du Festival des arts de la rue et du cirque.
Parvis de La Défense, Paris La Défense, Hauts-de-Seine, 01 41 91 26 79.

>> ladefense.fr
>> vallee-culture.hauts-de-seine.net

Cie Pan.Optikum "TRANSITion" © Matthias Kolodziej.
Cie Pan.Optikum "TRANSITion" © Matthias Kolodziej.

Gil Chauveau
Mardi 28 Août 2012

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | À l'affiche ter


Brèves & Com


Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À découvrir

"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
08/09/2023
Spectacle à la Une

"Hedwig and the Angry inch" Quand l'ingratitude de la vie œuvre en silence et brise les rêves et le talent pourtant si légitimes

La comédie musicale rock de Broadway enfin en France ! Récompensée quatre fois aux Tony Awards, Hedwig, la chanteuse transsexuelle germano-américaine, est-allemande, dont la carrière n'a jamais démarré, est accompagnée de son mari croate,Yithak, qui est aussi son assistant et choriste, mais avec lequel elle entretient des relations malsaines, et de son groupe, the Angry Inch. Tout cela pour retracer son parcours de vie pour le moins chaotique : Berlin Est, son adolescence de mauvais garçon, son besoin de liberté, sa passion pour le rock, sa transformation en Hedwig après une opération bâclée qui lui permet de quitter l'Allemagne en épouse d'un GI américain, ce, grâce au soutien sans failles de sa mère…

© Grégory Juppin.
Hedwig bouscule les codes de la bienséance et va jusqu'au bout de ses rêves.
Ni femme, ni homme, entre humour queer et confidences trash, il/elle raconte surtout l'histoire de son premier amour devenu l'une des plus grandes stars du rock, Tommy Gnosis, qui ne cessera de le/la hanter et de le/la poursuivre à sa manière.

"Hedwig and the Angry inch" a vu le jour pour la première fois en 1998, au Off Broadway, dans les caves, sous la direction de John Cameron Mitchell. C'est d'ailleurs lui-même qui l'adaptera au cinéma en 2001. C'est la version de 2014, avec Neil Patrick Harris dans le rôle-titre, qui remporte les quatre Tony Awards, dont celui de la meilleure reprise de comédie musicale.

Ce soir-là, c'était la première fois que nous assistions à un spectacle au Théâtre du Rouge Gorge, alors que nous venons pourtant au Festival depuis de nombreuses années ! Situé au pied du Palais des Papes, du centre historique et du non moins connu hôtel de la Mirande, il s'agit là d'un lieu de la ville close pour le moins pittoresque et exceptionnel.

Brigitte Corrigou
20/09/2023
Spectacle à la Une

"Zoo Story" Dans un océan d'inhumanités, retrouver le vivre ensemble

Central Park, à l'heure de la pause déjeuner. Un homme seul profite de sa quotidienne séquence de répit, sur un banc, symbole de ce minuscule territoire devenu son havre de paix. Dans ce moment voulu comme une trêve face à la folie du monde et aux contraintes de la société laborieuse, un homme surgit sans raison apparente, venant briser la solitude du travailleur au repos. Entrant dans la narration d'un pseudo-récit, il va bouleverser l'ordre des choses, inverser les pouvoirs et détruire les convictions, pour le simple jeu – absurde ? – de la mise en exergue de nos inhumanités et de nos dérives solitaires.

© Alejandro Guerrero.
Lui, Peter (Sylvain Katan), est le stéréotype du bourgeois, cadre dans une maison d'édition, "détenteur" patriarcal d'une femme, deux enfants, deux chats, deux perruches, le tout dans un appartement vraisemblablement luxueux d'un quartier chic et "bobo" de New York. L'autre, Jerry (Pierre Val), à l'opposé, est plutôt du côté de la pauvreté, celle pas trop grave, genre bohème, mais banale qui fait habiter dans une chambre de bonne, supporter les inconvénients de la promiscuité et rechercher ces petits riens, ces rares moments de défoulement ou d'impertinence qui donnent d'éphémères et fugaces instants de bonheur.

Les profils psychologiques des deux personnages sont subtilement élaborés, puis finement étudiés, analysés, au fil de la narration, avec une inversion, un basculement "dominant - dominé", s'inscrivant en douceur dans le déroulement de la pièce. La confrontation, involontaire au début, Peter se laissant tout d'abord porter par le récit de Jerry, devient plus prégnante, incisive, ce dernier portant ses propos plus sur des questionnements existentiels sur la vie, sur les injonctions à la normalité de la société et la réalité pitoyable – selon lui – de l'existence de Peter… cela sous prétexte d'une prise de pouvoir de son espace vital de repos qu'est le banc que celui-ci utilise pour sa pause déjeuner.

La rencontre fortuite entre ces deux humains est en réalité un faux-semblant, tout comme la prétendue histoire du zoo qui ne viendra jamais, Edward Albee (1928-2016) proposant ici une réflexion sur les dérives de la société humaine qui, au fil des décennies, a construit toujours plus de barrières entre elle et le vivant, créant le terreau des détresses ordinaires et des grandes solitudes. Ce constat fait dans les années cinquante par l'auteur américain de "Qui a peur de Virginia Woolf ?" se révèle plus que jamais d'actualité avec l'évolution actuelle de notre monde dans lequel l'individualisme a pris le pas sur le collectif.

Gil Chauveau
15/09/2023