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Festivals

Soutenir et développer la professionnalisation du Festival Off d'Avignon 2017

Les nouveaux objectifs de l'association Avignon Festival & Compagnies - 1ère partie

Le 20 mars dernier avait lieu la conférence de presse de l'association Avignon Festival & Compagnies qui présentait les actions qui seront mises en place lors de l'édition 2017 du festival OFF. Celles-ci, dans la continuité du projet collectif validé en février 2016, visent à une plus grande et meilleure professionnalisation du Off. Nous vous en donnons ici les grandes lignes.



© AF&C/Cédric Delestrade-ACM.
© AF&C/Cédric Delestrade-ACM.
Cette rencontre avec les journalistes et les professionnels (CNV, théâtre Pandora, Sacem, etc.) était l'occasion pour la nouvelle équipe (1) d'exposer les chantiers en cours et les premières mesures prises (pour l'instant à titre expérimental) pour aider les compagnies et les théâtres à appliquer un maximum de professionnalisme dans leurs pratiques durant leur présence au festival Off ; ainsi que d'expliquer la dynamique du conseil d'administration pour les trois mois à venir.

Le point le plus important est sans aucun doute le chantier de la professionnalisation. Chaque année, nous assistons à une augmentation du nombre de spectacles (1 416 spectacles présentés en 2016) qui, si elle garantit la vitalité artistique du festival, n'en demeure pas moins problématique concernant les conditions de travail des artistes et les questions de l'emploi, toujours préoccupantes dans le domaine de l'intermittence. De nombreuses compagnies se servent des salaires comme variable d'ajustement. Ainsi lorsqu'elles ont payé tous les frais, elles n'ont plus d'argent pour salarier les comédiens.

Le conseil d'administration, bien que ne voulant pas s'immiscer dans les choix artistiques des compagnies et dans les rapports qui les lient aux théâtres d'Avignon, a considéré qu'il ne pouvait pas, en tant qu'association responsable, rester sans agir. Ayant mis en place en 2016 un projet collectif, elle a souhaité concrétiser certains points en 2017 afin de ne pas voir la situation se dégrader.

Compte tenu de la complexité des problèmes à résoudre, plusieurs chantiers ont été mis en place dont quatre seront progressivement réalisés cette année. Le premier concerne la création d'un fonds de professionnalisation ; le deuxième est un travail de réflexion sur les publics - l'économie des spectacles étant indissociable du public - ; troisièmement, une réflexion sur la mutualisation de l'affichage et sur la problématique de "l'écofestival" ; enfin quatrièmement, sur la formation des artistes.

Le fonds de soutien à la professionnalisation

© AF&C.
© AF&C.
Celui-ci a pour objectif d'aider à l’exploitation des spectacles au festival OFF d’Avignon (aide aux salaires artistiques pour les représentations ayant lieu pendant le festival).

Si l'on veut que les artistes appliquent le droit du travail et soient dans une logique d'emploi pérenne, il faut peut-être qu'ils bénéficient d'un accompagnement. L’association Avignon Festival & Compagnies et ses partenaires, considérant que cela fait partie de leurs prérogatives, ont donc décidé de créer et de financer ce fonds, à titre d'essai, d'un montant de départ d'environ 200 000 euros. Cette somme sera alimentée tout d'abord par les cartes d'accréditations professionnelles qui deviennent payantes. Celles-ci sont au nombre de 3 000 en moyenne, ce qui représentera un montant de 70 000 euros (25 euros la carte).

Ensuite, la commission prélevée sur le service "ticket’OFF" (0,95 € par place vendue) - habituellement reversée en partie aux compagnies, en partie à l'association - sera entièrement versée au fonds (30 000 euros). Autre apport : l'institution du Off ayant un fonds de réserve, 30 000 euros seront pris sur celui-ci. Enfin, les différents partenaires que sont la Sacem, la SACD, le CNV, la STP, la Spedidam, etc., contribueront dans une fourchette allant de 20 000 à 30 000 euros chacun (2).

Quid de ce fonds ?

© AF&C.
© AF&C.
L'utilisation de ce fonds va se concrétiser par une aide de 1 000 euros par artiste, plafonnée à 4 000 euros par projet. Cela veut dire qu'une compagnie désirant bénéficier du fonds de soutien doit présenter un dossier de demande d'aide et elle ne pourra le faire que si elle répond à certains critères d'éligibilité, définis tant au niveau de la structure que du projet lui-même.

Commençons par la structure. Tout d'abord, un seul dossier par structure. Celle-ci doit être titulaire de la licence d’entrepreneur de spectacles vivants de catégorie 2 (et 3 si la structure est responsable de la billetterie). Elle doit fournir des attestations de compte (URSAFF/AUDIENS/PES) à jour et être à jour du paiement de la taxe fiscale (si redevable), des droits d’auteur et des droits voisins. Elle doit appliquer l’une des conventions collectives du secteur (CCNEAC ou CCNESPSV) et ne pas passer par le GUSO pour le paiement des salaires.

Concernant le projet, cela doit être une création de l’année, avec au maximum 12 représentations de rodage. Le spectacle sera issu de la création contemporaine : auteur, compositeur ou chorégraphe contemporain - au sens du code de la propriété intellectuelle -, c'est-à-dire auteur vivant ou mort depuis moins de 70 ans.

Le respect des minima en vigueur au sein des deux conventions collectives du secteur, CCNEAC ou CCNESPSV, est obligatoirement appliqué (soit paiement aux cachets, soit mensualisation au minimum syndical) ; avec garantie du paiement des taxes et des droits. Le projet sera accompagné d'un budget prévisionnel équilibré et établi sur la totalité du festival. Enfin, il ne doit pas avoir obtenu l’aide à la création en tournée de l’ASTP (Association pour le Soutien au Théâtre Privé).

À partir de quand ?

Dans quelques jours ! Selon l'annonce faite lors de la conférence, l'AF&C a indiqué que les dossiers de demande d’aide du fonds de soutien seront téléchargeables mi-avril 2017 sur le site du OFF >> avignonleoff.com.

Le dossier sera composé d’un descriptif de projet à remplir, de plusieurs onglets budgétaires et d’une présentation permettant d’apprécier sa cohérence et sa faisabilité économique. L’aide sera versée en deux temps : 40 % à l’acceptation du projet au mois de juin et 60 % à la remise des pièces justificatives au mois de novembre.

Les pièces justificatives demandées seront les bulletins de salaire des artistes, les justificatifs du paiement des droits et taxes, le budget réalisé et les différentes attestations de compte à jour.

(1) Changement de la présidence (Pierre Beffeyte, nouvel élu) et d'une partie du conseil d'administration, il y a quatre mois. Bureau : Bertrand Hurault, Vice-Président (collège des théâtres) ; Nikson Pitaqaj, Vice-Président (collège des compagnies) ; Antoine Colnot, Secrétaire ; Claire Wilmart, Secrétaire adjointe ; Jacques Hélian Bauduffe, Trésorier ; Patrick Journaut, Trésorier adjoint.
(2) SACEM : 30 000 € ; SACD : 30 000 € ; SPEDIDAM : 30 000 € ; CNV : 22 000 € ; ADAMI (en cours) ; Association pour le Soutien du Théâtre Privé (en cours).


>> Lire la suite : Festival Off d'Avignon 2017… Éco-responsabilité et nouveaux publics à l'ordre du jour !

Gil Chauveau
Mardi 11 Avril 2017

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"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

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C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

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Brigitte Corrigou
08/09/2023
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"Hedwig and the Angry inch" Quand l'ingratitude de la vie œuvre en silence et brise les rêves et le talent pourtant si légitimes

La comédie musicale rock de Broadway enfin en France ! Récompensée quatre fois aux Tony Awards, Hedwig, la chanteuse transsexuelle germano-américaine, est-allemande, dont la carrière n'a jamais démarré, est accompagnée de son mari croate,Yithak, qui est aussi son assistant et choriste, mais avec lequel elle entretient des relations malsaines, et de son groupe, the Angry Inch. Tout cela pour retracer son parcours de vie pour le moins chaotique : Berlin Est, son adolescence de mauvais garçon, son besoin de liberté, sa passion pour le rock, sa transformation en Hedwig après une opération bâclée qui lui permet de quitter l'Allemagne en épouse d'un GI américain, ce, grâce au soutien sans failles de sa mère…

© Grégory Juppin.
Hedwig bouscule les codes de la bienséance et va jusqu'au bout de ses rêves.
Ni femme, ni homme, entre humour queer et confidences trash, il/elle raconte surtout l'histoire de son premier amour devenu l'une des plus grandes stars du rock, Tommy Gnosis, qui ne cessera de le/la hanter et de le/la poursuivre à sa manière.

"Hedwig and the Angry inch" a vu le jour pour la première fois en 1998, au Off Broadway, dans les caves, sous la direction de John Cameron Mitchell. C'est d'ailleurs lui-même qui l'adaptera au cinéma en 2001. C'est la version de 2014, avec Neil Patrick Harris dans le rôle-titre, qui remporte les quatre Tony Awards, dont celui de la meilleure reprise de comédie musicale.

Ce soir-là, c'était la première fois que nous assistions à un spectacle au Théâtre du Rouge Gorge, alors que nous venons pourtant au Festival depuis de nombreuses années ! Situé au pied du Palais des Papes, du centre historique et du non moins connu hôtel de la Mirande, il s'agit là d'un lieu de la ville close pour le moins pittoresque et exceptionnel.

Brigitte Corrigou
20/09/2023
Spectacle à la Une

"Zoo Story" Dans un océan d'inhumanités, retrouver le vivre ensemble

Central Park, à l'heure de la pause déjeuner. Un homme seul profite de sa quotidienne séquence de répit, sur un banc, symbole de ce minuscule territoire devenu son havre de paix. Dans ce moment voulu comme une trêve face à la folie du monde et aux contraintes de la société laborieuse, un homme surgit sans raison apparente, venant briser la solitude du travailleur au repos. Entrant dans la narration d'un pseudo-récit, il va bouleverser l'ordre des choses, inverser les pouvoirs et détruire les convictions, pour le simple jeu – absurde ? – de la mise en exergue de nos inhumanités et de nos dérives solitaires.

© Alejandro Guerrero.
Lui, Peter (Sylvain Katan), est le stéréotype du bourgeois, cadre dans une maison d'édition, "détenteur" patriarcal d'une femme, deux enfants, deux chats, deux perruches, le tout dans un appartement vraisemblablement luxueux d'un quartier chic et "bobo" de New York. L'autre, Jerry (Pierre Val), à l'opposé, est plutôt du côté de la pauvreté, celle pas trop grave, genre bohème, mais banale qui fait habiter dans une chambre de bonne, supporter les inconvénients de la promiscuité et rechercher ces petits riens, ces rares moments de défoulement ou d'impertinence qui donnent d'éphémères et fugaces instants de bonheur.

Les profils psychologiques des deux personnages sont subtilement élaborés, puis finement étudiés, analysés, au fil de la narration, avec une inversion, un basculement "dominant - dominé", s'inscrivant en douceur dans le déroulement de la pièce. La confrontation, involontaire au début, Peter se laissant tout d'abord porter par le récit de Jerry, devient plus prégnante, incisive, ce dernier portant ses propos plus sur des questionnements existentiels sur la vie, sur les injonctions à la normalité de la société et la réalité pitoyable – selon lui – de l'existence de Peter… cela sous prétexte d'une prise de pouvoir de son espace vital de repos qu'est le banc que celui-ci utilise pour sa pause déjeuner.

La rencontre fortuite entre ces deux humains est en réalité un faux-semblant, tout comme la prétendue histoire du zoo qui ne viendra jamais, Edward Albee (1928-2016) proposant ici une réflexion sur les dérives de la société humaine qui, au fil des décennies, a construit toujours plus de barrières entre elle et le vivant, créant le terreau des détresses ordinaires et des grandes solitudes. Ce constat fait dans les années cinquante par l'auteur américain de "Qui a peur de Virginia Woolf ?" se révèle plus que jamais d'actualité avec l'évolution actuelle de notre monde dans lequel l'individualisme a pris le pas sur le collectif.

Gil Chauveau
15/09/2023