La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Paroles & Musique

Lili Cros et Thierry Chazelle… Artistes distillateurs de chansons de vie aux saveurs poétiques et pétillantes

"Peau neuve", Ciné XIII Théâtre, Paris et en tournée

Avec la bonne humeur accrochée en bandoulière et le sourire affiché comme une signature, Lili Cros et Thierry Chazelle, dans une harmonie en habit de duettiste, font "Peau neuve" pour unir leur poétique et charmeuse fraîcheur en un vocal et musical duo de music-hall.



© Éric Vernazobres.
© Éric Vernazobres.
Dès le début, le ton est donné. On sait qu'on va passer un bon moment, que des éclairs de poésie vont illuminer ce spectacle-concert et que des traits d'humour dessineront des sourires sur nos visages, mais aussi que les textes de chansons et les répliques échangées auront parfois une teneur plus sérieuse, abordant la vieillesse ("Le vieux chien"), la mort d'un ami ("L'éclaireur") - tout en tristesse et tendre beauté, où la voix de Lili bouleverse -, la séparation ("L'anneau"), les problèmes sociaux ("Les petits attributs"), l'enfance meurtrie ("Le petit soldat")…

Mais "Le rythme est amour" et l'harmonisation des voix de Lili Cros et Thierry Chazelle régale, telle une douce friandise, nos pavillons auditifs qui hissent haut… et naviguent - entre acoustique et électrique, entre rire et émotion - sur des musiques au groove chaloupé et sur des phrasés limpides et volubiles, voire aériens et riches en couleurs tonales.

Et l'une des particularités de leur approche artistique de la composition est une pratique bien particulière de la cadence avec des appuis marqués de la voix sur les syllabes accentuées, marquant la répartition rythmique des éléments d'une phrase et créant un système de percussions vocales bâti spécifiquement pour chaque chanson où le procédé est utilisé.

© Éric Vernazobres.
© Éric Vernazobres.
C'est tout à fait remarquable, notamment avec une petite comptine enfantine à la pointe d'humour acide en forme d'avertissements aux parents… "Les petits ça pousse"… Eh oui, "ça pousse tellement qu'à la fin t'es plus qu'un p'tit père ou une petite mère".

Cela donne à l'ensemble du spectacle une incroyable dynamique, une réelle fraîcheur et une ambiance souriante, joyeusement impertinente, et d'une insolente jeunesse. Les influences musicales jouent la transversalité et puisent sans vergogne mais de manière jouissive dans la country, le rock, le blues, le folk, le flamenco, etc., ce qui n'est pas sans rappeler avec bonheur une façon de jouer et de chanter (chaleureuse et communicative) développée par nos amis québécois, cette dernière étant souvent flagrante vocalement chez Lili ; qui pratique également la podorythmie (ou le foot tapping)*.

Sur le plateau, pas de décor, pour une sobriété allant à l'épure. Seules deux planches posées au sol pour le foot tapping et une création lumière audacieuse et élégante, créant les univers adaptés à chacune des chansons, que ce soit des balades ou des compositions puissantes agrémentées de riffs rock très efficaces.

© Stella K.
© Stella K.
Sur cette base, le spectacle se construit avec originalité sur les échanges, parfois vifs et humoristiques, parfois complices et riches de la faconde du conteur, des deux artistes dont l'intelligente entente (et intimité) réjouit le spectateur.

Ainsi quelques intermèdes et petits numéros ponctuent le concert comme une version épicée de l'histoire des Trois Baudets - ou comment le sex-shop Érotika est redevenu la célèbre salle de spectacle créée originellement par Jacques Canetti -, un délicieux dévergondage en mode bon-enfant, ou le solo de Lili façon trompette ou encore une prestation de choriste "allumée" aux érotiques vocalises…

"Peau neuve" est le résultat de la parfaite union de deux artistes aux talents multiples, tout deux auteurs compositeurs interprètes et musiciens hors pair, Thierry Chazelle virtuose de la mandoline et de la guitare, Lili Cros à la basse. Le tout agrémenté d'une exceptionnelle pratique de percussions effectuées sur le corps ou au pied. En résumé, un spectacle-concert jouissif, remède anti-dépressif, qui rend le spectateur heureux et rechargé à l'énergie festive, qui ressort radieux et épanoui.

* Podorythmie : mot inventé par Alain Lamontagne, musicien conteur québécois, reconnu comme en étant le spécialiste.

"Peau neuve"

© Stella K.
© Stella K.
De et avec : Lili Cros et Thierry Chazelle.
Mise en scène : Fred Radix et François Pilon.
Design sonore : Florian Chauvet.
Lumière et scénographie : Éric Planchot.
Costumes : Amélie Gagnot.
Paroles et musiques : Lili Cros et Thierry Chazelle.
Durée : 1 h 30.

Du 10 octobre 2017 au 24 avril 2018.
Mardi à 20 h.
Ciné XIII Théâtre, Paris 18e, 01 42 54 15 12.
>> cine13-theatre.com

Tournée

© Stella K.
© Stella K.
15 avril 2018 : Le Cadran, Ensues-la-Redonne (13).
17 avril 2018 : Ciné 13 Théâtre, Paris (75).
20 avril 2018 : salle des fêtes, Gisors (27).
21 avril 2018 : La Lucarne, Arradon (56).
24 avril 2018 : Ciné XIII Théâtre, Paris 18e.
27 avril 2018 : L'Iris - salle Barbara, Francheville (69).
4 mai 2018 : La Loco, Mézidon-Canon (14).
15 mai 2018 : Espace Culturel le Palace, Surgères (17).
17 mai 2018 : MJC Moulin à vapeur, Olivet (45).
18 mai 2018 : L'Atelier à spectacle, Vernouillet (28).
22 mai 2018 : La Salicorne, Saujon (17).
25 mai 2018 : Forum Léo Ferré, Ivry-sur-Seine (94).
2 juin 2018 : Festival Charivari, Parc de la Sèvre, Vertou (44).
3 juin 2018 : Péniche Spectacle, Saint-Grégoire (35).
8 juin 2018 : Espace Jean-Marie Poirie, Sucy-en-Brie (94).
16 juin 2018 : Festival à portée de voix, La BarAque, Nogent-le-Rotrou (28).
24 juin 2018 : Péniche le Marcounet, Paris 4e.

Organisation d'une grande soirée anniversaire à L'Olympia Paris le 18 mai 2019 pour fêter les 10 ans du duo.

● Lili Cros & Thierry Chazelle "Peau Neuve"
Label : Sofia.
Distribution : L'Autre Distribution.
Sortie : 4 février 2016.

Gil Chauveau
Lundi 16 Avril 2018

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023







À découvrir

"Othello" Iago et Othello… le vice et la vertu, deux maux qui vont très bien ensemble

Réécrit dans sa version française par Jean-Michel Déprats, le texte de William Shakespeare devient ici matière contemporaine explorant à l'envi les arcanes des comportements humains. Quant à la mise en jeu proposée par Jean-François Sivadier, elle restitue - "à la lettre" près - l'esprit de cette pièce crépusculaire livrant le Maure de Venise à la perfidie poussée jusqu'à son point d'incandescence de l'intrigant Iago, incarné par un Nicolas Bouchaud à la hauteur de sa réputation donnant la réplique à un magnifique Adama Diop débordant de vitalité.

© Jean-Louis Fernandez.
Un décor sombre pouvant faire penser à d'immenses mâchoires mobiles propres à avaler les personnages crée la fantasmagorie de cette intrigue lumineuse. En effet, très vite, on s'aperçoit que l'enjeu de cet affrontement "à mots couverts" ne se trouve pas dans quelque menace guerrière menaçant Chypre que le Maure de Venise, en tant que général des armées, serait censé défendre… Ceci n'est que "pré-texte". L'intérêt se noue ailleurs, autour des agissements de Iago, ce maître ès-fourberies qui n'aura de cesse de détruire méthodiquement tous celles et ceux qui lui vouent (pourtant) une fidélité sans faille…

L'humour (parfois grinçant) n'est pour autant jamais absent… Ainsi lors du tableau inaugural, lorsque le Maure de Venise confie comment il s'est joué des aprioris du vieux sénateur vénitien, père de Desdémone, en lui livrant comment en sa qualité d'ancien esclave il fut racheté, allant jusqu'à s'approprier le nom d'"anthropophage" dans le même temps que sa belle "dévorait" ses paroles… Ou lorsque Iago, croisant les jambes dans un fauteuil, lunettes en main, joue avec une ironie mordante le psychanalyste du malheureux Cassio, déchu par ses soins de son poste, allongé devant lui et hurlant sa peine de s'être bagarré en état d'ébriété avec le gouverneur… Ou encore, lorsque le noble bouffon Roderigo, est ridiculisé à plates coutures par Iago tirant maléfiquement les ficelles, comme si le prétendant éconduit de Desdémone n'était plus qu'une vulgaire marionnette entre ses mains expertes.

Yves Kafka
03/03/2023
Spectacle à la Une

"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

Cela dit, personne ne nous avait dit qu'à l'Essaïon, on pouvait aussi assister à des séances de cinéma ! Car c'est pratiquement à cela que nous avons assisté lors de la générale de presse lundi 27 mars dernier tant le talent de Catherine Aymerie, la comédienne seule en scène, nous a emportés(es) et transportés(es) dans l'univers de Balzac. La force des images transmises par son jeu hors du commun nous a fait vire une heure d'une brillante intensité visuelle.

Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
C'est une grande leçon de théâtre que nous propose là la Compagnie de la Rencontre, et surtout Catherine Aymerie. Une très grande leçon !

Brigitte Corrigou
07/04/2023
Spectacle à la Une

Dans "Nos jardins Histoire(s) de France #2", la parole elle aussi pousse, bourgeonne et donne des fruits

"Nos Jardins", ce sont les jardins ouvriers, ces petits lopins de terre que certaines communes ont commencé à mettre à disposition des administrés à la fin du XIXe siècle. Le but était de fournir ainsi aux concitoyens les plus pauvres un petit bout de terre où cultiver légumes, tubercules et fruits de manière à soulager les finances de ces ménages, mais aussi de profiter des joies de la nature. "Nos Jardins", ce sont également les jardins d'agrément que les nobles, les rois puis les bourgeois firent construire autour de leurs châteaux par des jardiniers dont certains, comme André Le Nôtre, devinrent extrêmement réputés. Ce spectacle englobe ces deux visions de la terre pour développer un débat militant, social et historique.

Photo de répétition © Cie du Double.
L'argument de la pièce raconte la prochaine destruction d'un jardin ouvrier pour implanter à sa place un centre commercial. On est ici en prise directe avec l'actualité. Il y a un an, la destruction d'une partie des jardins ouvriers d'Aubervilliers pour construire des infrastructures accueillant les JO 2024 avait soulevé la colère d'une partie des habitants et l'action de défenseurs des jardins. Le jugement de relaxe de ces derniers ne date que de quelques semaines. Un sujet brûlant donc, à l'heure où chaque mètre carré de béton à la surface du globe le prive d'une goutte de vie.

Trois personnages sont impliqués dans cette tragédie sociale : deux lycéennes et un lycéen. Les deux premières forment le noyau dur de cette résistance à la destruction, le dernier est tout dévoué au modernisme, féru de mode et sans doute de fast-food, il se moque bien des légumes qui poussent sans aucune beauté à ses yeux. L'auteur Amine Adjina met ainsi en place les germes d'un débat qui va opposer les deux camps.

Bruno Fougniès
23/12/2022