La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Festivals

Jazz à la Villette… du Jazz sous toutes les couleurs !

C'est la dix-huitième édition de ce festival, une coproduction de la Philharmonie de Paris et de la Grande Halle de la Villette. Des styles de musique venus de Paris, La Havane, Soweto, New York, Londres et Bamako se partagent l'affiche durant une dizaine de jours avec des légendes telles que Marcus Miller et Lee Fields.



Marcus Miller © Thierry Dubuc.
Marcus Miller © Thierry Dubuc.
Jean-Paul Sartre (1905-1980) écrivait en 1947 dans la revue America : "le jazz, c'est comme les bananes, ça se consomme sur place". Le propos laisse encore aujourd'hui perplexe quant au rapport entre le jazz et les bananes. Il est vrai qu'un concert de jazz est riche d'instants rares où le plaisir naît de l'écoute de longues et surprenantes improvisations… qui se "consomment" sur le moment, "sur place" !

La première soirée du festival débute avec Laurent Bardainne qui joue de son saxophone en laissant échapper un son tout en douceur, comme un souffle qui porte avec lui le timbre métallique d'un instrument qui enrobe l'espace de sa majesté. Entouré de son quartet avec Arnaud Roulin (orgue), Sylvain Daniel (basse) et Philippe Gleizes (batterie), le saxophoniste ténor revient à ses premières amours après avoir, entre autres, joué avec son groupe rock Poni Hoax ou Camélia Jordana. L'instrument déroule ses gammes dans une ambiance feutrée, appuyée par une batterie au rythme soutenu comme dans un duo, l'orgue venant en appui. La basse, toujours discrète, donne le tempo comme en rappel.

Laurent Bardainne, "Tigre d'eau douce" © Agnès Dherbeys.
Laurent Bardainne, "Tigre d'eau douce" © Agnès Dherbeys.
Puis ce fut au tour du groupe londonien Maisha, révélé il y a plusieurs mois avec leur album "There is a place". Cela démarre au saxophone avec Nubya Garcia, la guitare discrète de Shirley Tetteh suit avec quelques accords aigus, toujours en marge, soutenue par des percussions à la fois sobres mais omniprésentes, comme motrices de la ligne mélodique. La guitare vient lécher de quelques accords celle-ci. La contrebasse est attaquée soit à l'archet soit à la main. Puis les solos à la batterie, à la contrebasse et à la guitare s'enchaînent à tour de rôle découvrant au-delà d'une maîtrise certaine, une véritable élégance musicale dans laquelle les musiciens disparaissent devant leurs instruments. Les percussions donnent une ambiance très particulière, presque exotique.

La soirée se finit avec le grand Marcus Miller, attaquant de superbes solos. Autour de lui, les exquis Maquis Hill à la trompette et Alex Han au saxophone font d'inspirants accompagnements où la qualité est vissée à chaque note. Brett Williams au clavier et Alex Bailey à la batterie donnent la mesure d'un talent qui fait place autant à une sonorité suave que balancée. La basse enchaîne les accords rapides de façon nonchalante. Le son est très particulier suivant le tapping ou non effectué. Miller joue les notes les plus aiguës avec deux doigts, en s'amusant à parcourir le manche par petites frappes.

Il rend hommage à Miles Davis en reprenant un morceau de l'album "Bitches brew" (1970), époque où Miles Davis (1926-1991) avait utilisé des instruments électriques qui allaient créer un nouveau courant musical appelé "Fusion" influençant considérablement le monde de la musique. "Sublimity" de l'album "Laid black" (2018) est un hommage à la belle-mère de Miller qui venait de mourir. Brett Williams embarque le tempo au piano dans une mélodie douce et pleine de sérénité. C'est tout en discrétion que l'instrument se fait caresse, douceur, susurrant aux oreilles des notes aériennes, presque aussi fragiles que des plumes. Marcus Miller est tout en accompagnement, ne brusquant jamais le rythme, maniant ainsi le froid et le chaud tout au long de la soirée.

"Jazz à la Villette"
Du 29 août au 10 septembre 2019.
Parc de la Villette, Grande Halle, Cité de la Musique et Philharmonie,
Paris 19e, 01 40 03 75 75 et 01 44 84 44 84.
>> jazzalavillette.com

Maisha © DR.
Maisha © DR.
Jeudi 29 août :
Laurent Bardainne Quartet - "Tigre d'eau douce"

Laurent Bardainne - saxophone ténor,
Arnaud Roulin - orgue Hammond,
Sylvain Daniel - basse
,
Philippe Gleizes - batterie.

Maisha
Jake Long, drums,
Nubya Garcia - saxophone/flute,
Shirley Tetteh - guitar,
Amané Suganami - piano/wurlitzer,
Twm Dylan - double bass,
Tim Doyle - percussion,
Yahael Camara-Onono - percussion,
Axel Kaner-Lindstrom - trumpet,
Johanna Burnheart - violin,
Barbara Bartz - voilin,
Tom Oldfield - cello,
Madi Aafke Luimstra - viola,
Maria Zofia Osuchowska - harp.

Marcus Miller
Marcus Miller - basse,
Marquis Hill - trompette,
Alex Han - saxophone,
Brett Williams - clavier,
Alex Bailey - batterie.

Safidin Alouache
Mardi 3 Septembre 2019

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025












À Découvrir

"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
Spectacle à la Une

"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

Brigitte Corrigou
12/04/2025
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024