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Pièce du boucher

Billet n°11 : "11 septembre 2001", yo man ou la belle entreprise !

Ces derniers jours, les événements du 11 septembre 2001 ont défrayé la chronique. Normal, dix années que les Twin Towers se sont effondrées. L’événement était de taille, la tristesse aussi et le travail de mémoire une évidence. Le Théâtre de la Ville aussi a voulu participer à cette commémoration. La démarche est louable, le résultat l’est un peu moins.



"11 septembre 2001" © D.R.
"11 septembre 2001" © D.R.
Alors que tout le monde crie bravo et hourra, moi – oh pauvre de moi, je sens que je ne vais encore pas me faire des amis sur ce coup-là – je m’enfonce dans mon fauteuil. Des gouttes perlent sur mon front… Mouais, me dis-je… un peu facile que tout cela, non ?

"C’est génial, vraiment le boulot est fantastique"… En tout cas, c’est ce que j’entends en sortant du Théâtre de la Ville. Je me faufile, me planque même, de peur d’être avalée toute crue au milieu de cette horde de fans. Les mots restent coincés bien au fond du gosier. Mais je pleure à l’avance tous mes copains metteurs en scène qui n’ont pas de boulot... si injustement.

On prend des jeunes de Saint-Denis et l’on dit : "ben regardez la belle entreprise, le projet est titanesque, il rassemble une cinquantaine de lycéens venus de trois établissements différents et il faudra compter une année de répétitions. Pour les étudiants, c’est bien mieux que Star ac’, ils s’élèvent, découvrent un monde et grandissent avec". De leur point de vue, c’est certainement la plus belle aventure qu’ils auront jamais vécue. Pas de doute à ce sujet.

Mais pour ma part, même pas un tout petit poil qui se hérisse, même pas une toute petite larme devant ces témoignages de survivants…
Ah ça, c’est peut-être parce que je n’étais pas le copain de classe ou la maman qui venait voir son rejeton ?

Et le texte… ? Difficile de critiquer sans écorcher un peu son auteur Michel Vinaver… Une série de témoignages mis ici dans la bouche de ces ado. Mouais… Je vous assure, TF1 a creusé le même sillon avec sa déferlante de reportages…

Mais, du point de vue du spectateur lambda, qu’en est-il?
Esthétiquement et scénographiquement, guère d’intérêt (un peu facile ces échafaudages rouges, non ?). Artistiquement, encore moins (un texte qui se dévide).
Question jeu, on n'est pas allé chercher chez ces jeunes gens leur histoire ni on n'a fait ressortir leur personnalité. On les a mis dans un moule et on les a instrumentalisés.

En revanche, d’un point de vue politique, c’est vachement bien, pour sûr. On a sorti le "représentant des minorités visibles" de sa banlieue, on lui a collé un sujet lourd de sens et on l’a applaudi bien fort parce que, lui le musulman, lui le démuni, lui le basané que personne ne veut dans les bureaux de recrutement, lui le banlieusard qui ne peut entrer à Polytechnique, il a été sollicité pour sublimer la première tragédie du XXIe siècle…

Bravo Messieurs les Politiques, vous avez financé un projet qui vous permettra de dormir tranquille. Quant à vous, monsieur Meunier, méfiez-vous qu’on ne vous taxe ni d’arriviste ni d’opportuniste…

"11 septembre 2001"

(Vu le 10 septembre 2011 au Théâtre de la Ville)

Prochaine date :
7 octobre, une représentation au Forum du Blanc-Mesnil.

www.11septembre2001.net

Vendredi 23 Septembre 2011

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© Jean-François Delon.
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© Pics.
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Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

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Brigitte Corrigou
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© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

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Bruno Fougniès
15/10/2023