La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Festivals

Nancy Jazz Pulsations… Talents sous Chapiteau

Le Nancy Jazz Pulsations (NJP), pour sa quarante-sixième édition, est toujours au rendez-vous des découvertes musicales avec, au-delà du jazz depuis quelques années, des sonorités venues d'ailleurs. Les cuivres, la rythmique des cordes, le tempo des percussions ont accompagné durant notre deuxième soirée des chansons en espagnol, en langue béninoise, en anglais et en arabe.



¿ Who's the cuban ? © DR.
¿ Who's the cuban ? © DR.
Notre deuxième excursion au NJP a des parfums d'Amérique, d'Afrique et d'Asie. Cela nous mène à la salle du Chapiteau avec le groupe ¿ Who's the cuban ?. Ce sont les Caraïbes en plein département de Meurthe-et-Moselle composé aussi depuis peu par un ensemble de cuivres venu de la région. Le groupe français le plus cubain qui soit, selon leur chanteuse colombienne Pao Barreto, existe depuis 2008 mais a choisi ce nouveau nom en 2018.

Loin d'être une décision anodine, ils ont ouvert leur spectre musical en fusionnant des styles différents dans leur dernier album "Circo circo" (2019), taquinant mêle la pop. C'est très entraînant avec des chants souvent en chœur ou en appui. Les instruments à vent sont très présents et donnent un accent joyeux. Les cordes, accompagnées par les percussions, accompagnent les chansons par une base mélodique riche de notes. Les cuivres, les voix, tout participe à une légèreté heureuse.

On ne présente plus Angélique Kidjo qui marque, depuis près de quarante ans, le monde de la musique en se battant, même lors de son concert, pour le rapprochement des peuples et des cultures. Elle est accompagnée sur scène de musiciens venus du Nigeria, de la Guadeloupe, de la Martinique et des USA. Elle rend hommage dans son dernier album "Celia" (2019) à Celia Cruz (1925-2003), la reine de la salsa.

Angélique Kidjo © Laurent Seroussi.
Angélique Kidjo © Laurent Seroussi.
Les chansons sont virevoltantes, pleines de vie à l'image de l'artiste sur scène. Tout est syncopé avec un tempo qui laisse peu de place à des silences. Ça bouge dans les cordes, les percussions. Le corps en avant, la voix haut perchée, l'allure toujours aussi élégante, elle chante aussi bien en fon, yoruba, mina, anglais qu'en français. Elle finit le concert en descendant dans le public pour le faire fredonner et danser.

Place à Max Romeo and Family. Du haut de ses soixante-onze ans, il est venu avec sa fille Azana Smith - une voix des plus cuivrées - et son fils Azizzi Romeo qui est, lui, dans une tessiture plus grave. À tour de rôle, chacun est sur scène, le père semblant donner le relais à ses enfants pour revenir ensuite pour le final.

Le Jamaïcain a composé "Revelation time" (1975) le premier album concept reggae et l'incontournable "War ina Babylon" (1976). Il est toujours inspiré avec un tempo rapide qui n'a pas perdu, depuis plus de quarante ans, sa superbe. Son dernier album "Words from The Brave" (2019) le prouve avec des compositions très charpentées sur le sacro-saint rythme du reggae et, surtout, sa voix, toujours aussi veloutée, n'a pas pris une ride.

Max Romeo © Valentin Campagnie.
Max Romeo © Valentin Campagnie.
Puis ce fut au tour d'Omar Souleyman accompagné d'un clavier et d'une boîte à rythmes. La musique est électronique avec du chaâbi, festif, populaire et présent dans différents pays du Maghreb et du Moyen-Orient. L'artiste syrien a démarré en 1994 en chantant dans les mariages et a été repéré en 1997 par Mark Gergis avec ses compositions sous presse. Cela balance avec un tempo très dansant. Moins dans mon tripe toutefois car le chaâbi est soutenu par une boîte à rythmes, direction qu'il peut prendre parfois, et me semble casser l'ADN de celui-ci.

Ça a envoyé du sérieux et du qualitatif sous le chapiteau, avec des artistes très différents venus des quatre coins du monde. Les oreilles ont été aux premières loges d'une soirée qui a tenu toutes ses promesses. Avec le NJP, Nancy devient la reine des musiques du monde pendant une dizaine de jours.

"Nancy Jazz Pulsations"

Omar Souleyman à La Vapeur (Dijon) en 2018 © Philippe Malet.
Omar Souleyman à La Vapeur (Dijon) en 2018 © Philippe Malet.
Du 9 au 19 octobre 2019.
Chapiteau de la Pépinière, Magic Mirrors, Salle Poirel, Théâtre de la Manufacture, L'Autre Canal, Le Hublot et Opéra national de Lorraine.
Rens. : 03 83 35 40 86 (pas de réservation par téléphone).
>> nancyjazzpulsations.com
>> Programmation du NJP

Soirée du 11 octobre 2019.
¿ Who's the cuban ?
World-latin-jazz/France
Pao Barreto (chant, guitare, maracas), Dayron Ramirez Hernandez (chant, trompette), Sylvain Richard (trombone, chœurs), Cedric Geremia (guitare, chœurs), Olivier Duranton (claviers, chœurs), Olivier Herrmann (basse, chœurs), Thibaut Chipot (batterie, percussions).

Angélique Kidjo, hommage à Celia Cruz
Salsa cubaine/Bénin
Tony Allen (batterie), Meshell Ndegeocello (basse), Shabaka Hutchings (saxophone), David Donatien (percussions).

Max Romeo and Family
Reggae/Jamaïque
Rico Gaultier (saxophone), Pierre Chabrèle (trombone), Dominique Marie Joseph
(basse), Rudi Benett (claviers), Jason Wilson (batterie), Greg Emonet (guitare), Xavier Bornens (trompette).

Omar Souleyman
Électro-chaâbi/Syrie

Safidin Alouache
Jeudi 17 Octobre 2019

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025







À Découvrir

"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024