La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.
Théâtre

À la fois léché et à la diable, un "Macbeth" qui évacue le surnaturel et surexpose la réalité - 12/05/2014

1964, 2014 : le Théâtre du Soleil - Société coopérative ouvrière de production* - a cinquante ans… Et en interrogeant "Macbeth" écrit en 1606, il sent de nouveau le mal sourdre à la surface d’un monde contemporain dont les différents pouvoirs s’exacerbent. Macbeth, vaillant à la guerre, prend peur aux marches du pouvoir qu’il rêve (et conquiert probablement en sous-main depuis longtemps). Poussé...  

Témoignages prolétaires à l'usage des générations futures - 09/05/2014

Délocalisations, plans sociaux, licenciements, mises à la retraite anticipées, propagande sur les vertus du sacro-saint tertiaire sont les mauvaises plaisanteries économiques que nous sert au quotidien l'actualité... Et on en finit par oublier qu'il existe encore une classe ouvrière. Bon, d'accord, l'espèce est en voie de disparition ! En bon ethnologue et cueilleur d'histoires, Nicolas Bonneau a...  

Tempête sous un crâne... Une rencontre abstraite de la littérature hugolienne et du théâtre contemporain - 05/05/2014

"Tempête sous un crâne", une adaptation des Misérables de Victor Hugo dimensionnée à la puissance Jean Bellorini et magistralement interprétée par le cri de jeunesse de Mathieu Coblentz, Karyll Elgrichi, Camille de la Guillonnière, Clara Mayer, Céline Ottria, Marc Plas, Hugo Sablic. Depuis le 28 avril, la scène francilienne est une nouvelle fois frappée par une collision entre littérature et...  

Un poème en prose fantastique où les êtres appartiennent au monde des spectres - 14/04/2014

Joël Pommerat, dont le spectateur connaît la manière de clair-obscur, met en scène pour la première fois un texte qui n’est pas de lui. Il s’empare du premier texte de Catherine Anne, "Une année sans été" édité en 1987. Cette proposition théâtrale est pour Joël Pommerat et ses jeunes comédiens une manière de mise en abyme et de mise en danger personnelle. La pièce imprégnée de l’œuvre de Rainer...  

Appeler la mémoire pour questionner nos résignations et leurs conséquences - 11/04/2014

Le 7 octobre 2006, Anna Politkovskaïa rentre des courses et décharge ses sacs de provisions. Elle a l'habitude de les monter en deux fois et a déjà effectué un premier voyage... Elle est découverte morte dans sa cage d'escalier, un pistolet et 4 balles à ses côtés... et le restant de ses courses renversé près d'elle. 4 balles dont une à la tête... Un an avant, Vladislav Sourkov, le très puissant...  

Quand l'art du comédien interroge la magie et renvoie à l’art des griots ! - 09/04/2014

Philippe Dormoy est conteur. Et un peu plus. Lorsqu’il entreprend, pour la grande joie d’un public (érudit ou non), de rendre compte du roi Lear dans son spectacle "Lear, conte à rebours", il le fait à sa manière méthodique et réjouissante. Installe les personnages, le roi, ses filles, ses conseillers, les bâtards le bouffon et… le conteur. Multipliant les voix et les apartés, les dialogues entre...  

Une forme concertante sensible qui relie regards et gestes, voix humaine et musiques - 04/04/2014

C’est un vieil homme qui tient conférence sur les méfaits du tabac. Michel Robin, pour qui Nioukhine (c’est le nom du personnage) fut son tout premier rôle quand il débutait, l’éclaire de son œil pétillant et malicieux. C’est un vieil homme qui tient conférence lors d’un concert de bienfaisance qu'organise d’une poigne de fer, on l’apprend au hasard du récit, son épouse brutale et avaricieuse,...  

Le "Tartuffe" de Bondy n'hésite pas à amplifier les postures de la tradition moliéresque - 03/04/2014

La version théâtrale du Tartuffe proposée à l’Odéon par Luc Bondy a été créée à Vienne dans une traduction adaptation en allemand. Dépaysée. Présentée en France avec une distribution française, elle baigne de nouveau dans le texte originel de Molière tout en gardant l’esprit d’une adaptation, la langue est à peine ajustée, tout juste poncée… Le travail réalisé est étonnamment juste, offrant au...  

Des vaisseaux du cœur monte l'extraordinaire et torride sève de l'amour passionnel - 02/04/2014

En 1988, "Les Vaisseaux du cœur" de Benoîte Groult défrayait la chronique, créait la polémique par la crudité pleinement assumée de la description d'une relation/passion extra-conjugale où l'amour physique avait une place centrale, étant à la fois le pivot et le moteur explosif de cette union magique, à la fois dévastatrice et constructive... mais véritablement poignante. Vingt-cinq ans plus...  

"Le Dernier Jour du jeûne", un hymen à la joie crié par trois générations de femmes - 27/03/2014

Simon Abkarian a l'élégance en plume et le franc-parler méditerranéen. Tous les mots commencent par une lettre capitale comme l'est l'existence des personnages de la pièce. Les guillemets s'ouvrent sur des souvenirs, les répliques sont instantanées, les virgules sont soufflées pour donner du rythme à la narration. L’histoire peut commencer car l’écriture de Simon Abkarian est une avant-mise en...  
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À Découvrir

"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024