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Théâtre

Sixième et dernier chapitre de l'album de voyage dans notre monde d'une artiste : "MADAM#6"

Et donc le sixième spectacle du Manuel d'Auto Défense À Méditer (MADAM) d'Hélène Soulié qui, plus qu'un manuel, est un manifeste créatif, inventif, poétique et politique de la place laissée ou non aux femmes de notre civilisation si avancée. Un projet qu'Hélène Soulié porte depuis bientôt cinq ans : cinq ans de voyage à travers le pays, de rencontres, de témoignages, de collaborations avec des autrices, des actrices et des scientifiques. Le regard de chaque épisode se pose ainsi sur une diversité totale d'oppressions et de mises à l'écart, au ban de la société comme on dit, que cette société fait subir aux femmes. Voici une étape d'un voyage au cœur d'un système qui enferme les consciences au lieu de les éveiller.



© Marie Clauzade.
© Marie Clauzade.
La forme de chacun de ces spectacles est chaque fois singulière. Chacun de ces textes est porté par une comédienne incarnant la parole, en faisant disparaître tout côté conférence ou trop d'abstraction qui pourrait nuire. L'humain, l'humanité, l'identité même est ici mis en avant aussi bien par la metteuse en scène que par les autrices auxquelles cette dernière s'est adressée pour écrire chacun de ces épisodes. Des autrices de théâtre dont les œuvres sont pour la plupart ancrées dans la réalité sociale, des autrices engagées dans la création artistique contemporaine. Pour "MADAM#6", c'est à Magali Mougel qu'Hélène Soulié a passé commande. Un texte qui raconte l'extraordinaire périple, le combat violent et la prodigieuse transformation intérieure et philosophique d'une bergère.

Une bergère… Une bergère ? Pas de clin d'œil à des bergères connues, non, il s'agit ici d'une citoyenne de notre époque qui part faire la transhumance, l'été, dans les montagnes, avec un troupeau de moutons, de brebis, un chien, la solitude, la vie rude, sans confort, dans la nature, sous les étoiles, dans le vent, les odeurs, les reproductions, les naissances. Il s'agit d'un double arrachement : arrachement à la vie citadine, son agitation, ses rectitudes, mais surtout une manière de s'arracher à toute une pensée, carrée, pleine de frontières, cloisonnée, binaire et sexiste. La pensée dominante structurée par les mâles affublés du même adjectif.

Dans un premier temps, c'est directement sur elle que l'on jette le venin : c'est métier d'homme que d'emmener les troupeaux dans les alpages, elle devient vite dans les bouches la putain des fougères, mais là n'est pas le plus beau du spectacle, le plus à la fois abstrait et sensible. Le texte de Magali Mougel plonge dans le sang même de cette histoire, s'imprègne de cette vie qui s'abandonne à la nature solaire et la vision fait parler alors les spectres anciens des sorcières qui, elles aussi, avaient repris contact avec la nature, les plantes, les animaux et, qui elles, aussi avaient subi le châtiment.

"Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !", Arthur Rimbaud, Le Bateau Ivre.

© Marie Clauzade.
© Marie Clauzade.
Difficile pour moi de rendre compte de ce que porte ce spectacle très fort, très investi. Marion Coutarel est d'une force inouïe, à soulever des montagnes, bondissant sur tout le plateau, donnant corps et âme à ce personnage en quête de vérité, de vrai. Mais ce texte, cette mise en scène, ce jeu d'actrice concourent ensemble à toucher à quelque chose de tabou. Difficile à exprimer. J'ai l'impression d'avoir entrevu dans ce spectacle une part totalement inconnue du masculin. Marion Coutarel parvient à évoquer avec ses mots, avec son jeu, une autre philosophie, un autre ordre qui porte mal ce nom, une manière d'aller d'un point à un autre en évitant la ligne droite, et qui est une perception du monde et de la vie loin, si loin du pragmatisme cartésien de nos cités. C'est profond, sensible, beau, charnel, complet, sans domination.

Comme pour ses autres Manuels D'Auto Défense À Méditer, Hélène Soulié adapte sa mise en scène au sujet traité, mais loin de tout réalisme, utilisant la vidéo soit en ouverture narrative, soit en incrustation sur les objets support au plateau avec deux dialogues passionnants, l'un avec une Marguerite Duras, l'autre avec Agnès Varda. Le texte de Magali Mougel, chargé à parts égales de pertinence et de poésie, est construit comme une avancée perpétuelle vers cette évasion dans la nature, loin des hommes et de leur civilisation à la vue si courte, si étroite. Ouvrez vos cœurs, vos sens et vos esprits semblent ainsi clamer "MADAM#6" !

Vu au Théâtre de la Reine Blanche à Paris

"MADAM#6"

Conception et Mise en scène : Hélène Soulié.
Texte : Magali Mougel.
Texte vidéo et interview : Hélène Soulié.
Avec : Marion Coutarel.
Durée : 1 h.
À partir de 14 ans.

Tournée
14 février 2023 : MADAM #3 - "Scoreuses" (Hélène Soulié/Mariette Navarro), Le Cratère - Scène Nationale, Alès (30).
17 mars 2023 : MADAM #5 - "Ça ne passe pas" (Hélène Soulié/Claudine Galéa), Centre Culturel Jérôme Savary, Villeneuve-lès-Maguelone (34).
15 avril : Intégrale (MADAM#1, #2, #3, #4, #5 et #6), Théâtre Molière - Scène nationale, Sète (34).

Bruno Fougniès
Mardi 14 Février 2023

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"Différente" Carolina ou "Cada uno es un mundo (Chacun est un monde)"

Star internationale à la frange rouge, Carolina est de retour en France, après sa tournée mondiale. Heureuse de retrouver son public préféré, elle interprète en live des chansons populaires qui touchent le cœur de toutes les générations.

© Audrey Bären.
Mais qui est donc cette incontournable Carolina ? Ou, plus exactement, qui se cache derrière cette artiste plutôt extravagante, à la folie douce ? De qui est-elle l'extension, au juste ?

L'éternelle question autour de l'acte créatif nous interpelle souvent, et nous amène à nous demander quelles influences l'homme ou la femme ont-ils sur leurs "créatures" fabriquées de toutes pièces ! Quelles inspirations les ont portées ! Autant de questions qui peuvent nous traverser particulièrement l'esprit si tant est que l'on connaisse un peu l'histoire de Miguel-Ange Sarmiento !

Parce que ce n'est pas la première fois que Carolina monte sur scène… Décidément, elle en a des choses à nous dire, à chaque fois. Elle est intarissable. Ce n'est pas Rémi Cotta qui dira le contraire, lui qui l'accompagne depuis déjà dix ans et tire sur les ficelles bien huilées de sa vie bien remplie.

Rémi Cotta, artiste plasticien, graphiste, comédien, chanteur lyrique, ou encore metteur en scène, sait jouer de ses multiples talents artistiques pour confier une parole virevoltante à notre Carolina. Il suffit de se souvenir du très original "Carolina Show", en 2010, première émission de télé sans caméra ayant reçu de nombreux artistes connus ou moins connus ou le "Happy Show de Carolina", ainsi que les spectacles musicaux "Carolina, naissance d'une étoile", "Le Cabaret de Carolina", ou encore " Carolina, L'Intelligence Artificielle".

"Différente" est en réalité la maturation de plusieurs années de cabarets et de spectacles où Carolina chante pourquoi et comment elle est devenue une star internationale tout en traversant sa vie avec sa différence". Miguel-Ange Sarmiento.

Brigitte Corrigou
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© Aurélie Courteille.
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Brigitte Corrigou
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© Fabienne Rappeneau.
Portraitiste décalé et impertinent d'une Histoire de France ou de l'Humanité aux galbes pas toujours gracieux dont surgissent parfois les affres de notre condition humaine, Régis Vlachos, "Cabaret Louise" (Louise Michel), "Dieu est mort" (Dieu, mieux vaut en rire)"Little Boy" (nom de la bombe larguée sur Hiroshima), revient avec un nouveau spectacle (création 2023) inspiré d'un des plus grands scandales de notre histoire contemporaine : la Françafrique. Et qui d'autre que Jacques Chirac – l'homme qui faisait la bise aux dictateurs – pouvait être convoqué au "tribunal" du rire et de la fantaisie par l'auteur facétieux, mais doté d'une conscience politique aiguë, qu'est Régis Vlachos.

Le président disparu en 2019 fut un homme complexe composé du Chirac "bulldozer" en politique, menteur, magouilleur, et du Jacques, individu affable, charmeur, mettant autant la main au cul des vaches que des femmes. Celui-ci fut d'abord attiré le communisme pour ses idéaux pacifistes. Il vendra même L'Humanité-dimanche devant l'église Saint-Sulpice.

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Gil Chauveau
03/11/2024