La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Théâtre

Manger ou être mangé, le monde du travail tel un règne animal !

"T-Rex (Chronique d'une vie de bureau ordinaire)", Théâtre de la Contrescarpe, Paris

En 1993, le film Jurassic Park sort au cinéma et connaît un énorme succès. Son monstre phare, le Tyrannosaurus Rex, renommé le T-Rex, va hanter les nuits de beaucoup de ses spectateurs. Alexandre nous raconte comment, vingt ans après, la peur du dinosaure réapparaît.



© Armand Luciani.
© Armand Luciani.
L'open space, la machine à café, les fournitures de bureau bien rangées…, tout y est pour représenter le cadre du travail d'entreprise. C'est lundi, Alexandre arrive à son poste. Il attend Pierre, son supérieur, son N+1, pour prendre son café du matin. Le souci, c'est que Pierre a eu un petit problème personnel le week-end passé : il s'est suicidé, donc il sera absent pour le café matinal quotidien.

À partir de là, tout va s’enchaîner très vite. Myriam, la supérieure de Pierre, la N+2 d'Alexandre, convoque ce dernier dans son bureau pour lui parler du drame que représente la disparition de Pierre : celui-ci travaillait sur un projet pour un client très important et la dead line de rendu est dans un mois. Elle compte sur Alexandre pour reprendre l'affaire, elle lui certifie avoir grande confiance en sa personne et lui assure qu'il est à la hauteur du poste de manager qu'il pourrait se voir bientôt attribué. Il est ravi.

Le soir, il achète une bouteille de champagne Ruinart pour célébrer la nouvelle avec Camille, la personne qui partage sa vie. Ils s'endorment dans les bras l'un de l'autre, euphorisés par l'alcool, après avoir fait l'amour. Apparemment, cela faisait un moment qu'ils n'avaient pas eu de rapport sexuel.

© Armand Luciani.
© Armand Luciani.
Cette nuit-là, Alexandre revit un cauchemar qui l'obsédait quand il était enfant. S'il semble heureux de ses nouvelles fonctions, la journée au travail, son inconscient, lui, transparaît agité et effrayé. L'homme entame doucement mais sûrement une rapide descente aux enfers, assez connue sous le nom de burn out.

Alexandre Oppeccini évolue dans un seul en scène dont il est l'auteur et l'interprète. Il retranscrit son histoire en imitant ses collègues et la représentation est très drôle. Il joue chacun des personnages en se basant sur des caricatures communes, ce qui donne, par exemple, un jeune employé homosexuel à la voix et aux manières efféminées qui passe son temps sur le site vente privée. Tous sont gentiment moqués. Les caractères sont grossis et les individus peu crédibles tels qu'ils sont dépeints. Le comique marche donc très bien car le rire vient facilement et sans aucune méchanceté.

Le spectacle aborde un sujet sérieux avec une jolie légèreté. Le protagoniste nous raconte comment il s'est retrouvé dans un état de dépression, détruisant sa relation de couple, perdant son travail, se mettant à dos son entourage. Il existe une réelle violence dans les faits relatés, une certaine agression, mais l'histoire nous est contée avec beaucoup de bienveillance et de douceur. Le spectateur finit le spectacle comme l'acteur : apaisé.

"T-Rex (Chronique d'une vie de bureau ordinaire)"

© Armand Luciani.
© Armand Luciani.
De et avec : Alexandre Oppeccini.
Mise en scène : Marie Guibourt.
Scénographie et lumières : Lucie Joliot.
Musique et montage sonore : Rémi Oppeccini (Infra-Rem).
Production : La Compagnie Spirale.
Durée : 1 h 20.

Du 7 janvier au 27 mars 2018.
Lundi et mardi à 21 h, dimanche à 18 h 30.
Relâche le 13 mars 2018.
Prolongations du 8 avril au 20 juin 2018.
Du lundi au mercredi à 20 h, dimanche à 18 h 30.
Relâche le 18 avril.
Théâtre de la Contrescarpe, Paris 5e, 01 42 01 81 88.
>> theatredelacontrescarpe.fr

Ludivine Picot
Mercredi 21 Mars 2018

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter





Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

"Bienvenue Ailleurs" Faire sécession avec un monde à l'agonie pour tenter d'imaginer de nouveaux possibles

Sara a 16 ans… Une adolescente sur une planète bleue peuplée d’une humanité dont la grande majorité est sourde à entendre l’agonie annoncée, voire amorcée diront les plus lucides. Une ado sur le chemin de la prise de conscience et de la mutation, du passage du conflit générationnel… à l'écologie radicale. Aurélie Namur nous parle, dans "Bienvenue ailleurs", de rupture, de renversement, d'une jeunesse qui ne veut pas s'émanciper, mais rompre radicalement avec notre monde usé et dépassé… Le nouvel espoir d'une jeunesse inspirée ?

© PKL.
Sara a donc 16 ans lorsqu'elle découvre les images des incendies apocalyptiques qui embrasent l'Australie en 2020 (dont l'île Kangourou) qui blessent, brûlent, tuent kangourous et koalas. Images traumatiques qui vont déclencher les premiers regards critiques, les premières révoltes générées par les crimes humains sur l'environnement, sans évocation pour elle d'échelle de gravité, cela allant du rejet de solvant dans les rivières par Pimkie, de la pêche destructrice des bébés thons en passant de l'usage de terres rares (et les conséquences de leur extraction) dans les calculettes, les smartphones et bien d'autres actes criminels contre la planète et ses habitants non-humains.

Puisant ici son sujet dans les questionnements et problèmes écologiques actuels ou récurrents depuis de nombreuses années, Aurélie Namur explore le parcours de la révolte légitime d’une adolescente, dont les constats et leur expression suggèrent une violence sous-jacente réelle, puissante, et une cruelle lucidité, toutes deux fondées sur une rupture avec la société qui s'obstine à ne pas réagir de manière réellement efficace face au réchauffement climatique, à l'usure inconsidérée – et exclusivement humaine – de la planète, à la perte de confiance dans les hommes politiques, etc.

Composée de trois fragments ("Revoir les kangourous", "Dézinguée" et "Qui la connaît, cette vie qu'on mène ?") et d'un interlude** – permettant à la jeunesse de prendre corps "dansant" –, la pièce d'Aurélie Namur s'articule autour d'une trajectoire singulière, celle d'une jeune fille, quittant le foyer familial pour, petit à petit, s'orienter vers l'écologie radicale, et de son absence sur le plateau, le récit étant porté par Camila, sa mère, puis par Aimé, son amour, et, enfin, par Pauline, son amie. Venant compléter ce trio narrateur, le musicien Sergio Perera et sa narration instrumentale.

Gil Chauveau
10/12/2024
Spectacle à la Une

"Dub" Unité et harmonie dans la différence !

La dernière création d'Amala Dianor nous plonge dans l'univers du Dub. Au travers de différents tableaux, le chorégraphe manie avec rythme et subtilité les multiples visages du 6ᵉ art dans lequel il bâtit un puzzle artistique où ce qui lie l'ensemble est une gestuelle en opposition de styles, à la fois virevoltante et hachée, qu'ondulante et courbe.

© Pierre Gondard.
En arrière-scène, dans une lumière un peu sombre, la scénographie laisse découvrir sept grands carrés vides disposés les uns sur les autres. Celui situé en bas et au centre dessine une entrée. L'ensemble représente ainsi une maison, grande demeure avec ses pièces vides.

Devant cette scénographie, onze danseurs investissent les planches à tour de rôle, chacun y apportant sa griffe, sa marque par le style de danse qu'il incarne, comme à l'image du Dub, genre musical issu du reggae jamaïcain dont l'origine est due à une erreur de gravure de disque de l'ingénieur du son Osbourne Ruddock, alias King Tubby, en mettant du reggae en version instrumentale. En 1967, en Jamaïque, le disc-jockey Rudy Redwood va le diffuser dans un dance floor. Le succès est immédiat.

L'apogée du Dub a eu lieu dans les années soixante-dix jusqu'au milieu des années quatre-vingt. Les codes ont changé depuis, le mariage d'une hétérogénéité de tendances musicales est, depuis de nombreuses années, devenu courant. Le Dub met en exergue le couple rythmique basse et batterie en lui incorporant des effets sonores. Awir Leon, situé côté jardin derrière sa table de mixage, est aux commandes.

Safidin Alouache
17/12/2024
Spectacle à la Une

"R.O.B.I.N." Un spectacle jeune public intelligent et porteur de sens

Le trio d'auteurs, Clémence Barbier, Paul Moulin, Maïa Sandoz, s'emparent du mythique Robin des Bois avec une totale liberté. L'histoire ne se situe plus dans un passé lointain fait de combats de flèches et d'épées, mais dans une réalité explicitement beaucoup plus proche de nous : une ville moderne, sécuritaire. Dans cette adaptation destinée au jeune public, Robin est un enfant vivant pauvrement avec sa mère et sa sœur dans une sorte de cité tenue d'une main de fer par un être sans scrupules, richissime et profiteur.

© DR.
C'est l'injustice sociale que les auteurs et la metteure en scène Maïa Sandoz veulent mettre au premier plan des thèmes abordés. Notre époque, qui veut que les riches soient de plus en plus riches et les pauvres de plus pauvres, sert de caisse de résonance extrêmement puissante à cette intention. Rien n'étonne, en fait, lorsque la mère de Robin et de sa sœur, Christabelle, est jetée en prison pour avoir volé un peu de nourriture dans un supermarché pour nourrir ses enfants suite à la perte de son emploi et la disparition du père. Une histoire presque banale dans notre monde, mais un acte que le bon sens répugne à condamner, tandis que les lois économiques et politiques condamnent sans aucune conscience.

Le spectacle s'adresse au sens inné de la justice que portent en eux les enfants pour, en partant de cette situation aux allures tristement documentaires et réalistes, les emporter vers une fiction porteuse d'espoir, de rires et de rêves. Les enfants Robin et Christabelle échappent aux services sociaux d'aide à l'enfance pour s'introduire dans la forêt interdite et commencer une vie affranchie des règles injustes de la cité et de leur maître, quitte à risquer les foudres de la justice.

Bruno Fougniès
13/12/2024