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Théâtre

Les aveux d'Augustin… Dans une forme d'humilité supérieure, une mise au présent du Monde

"Augustin passe aux aveux", Théâtre Les Déchargeurs, Paris

Une barre d'appui propice aux effets oratoires, une table accueillante pour le lecteur ou le conteur, une estrade lieu d'un trône favorable. Quelques sièges pour des spectateurs. Et puis un livre posé, manié. Dominique Touzé met en scène et interprète les confessions de Saint Augustin.



© Pascal Gély.
© Pascal Gély.
Le dispositif choisi favorise l'intimité de l'écoute et du regard. Le comédien se montre avec jubilation et véhémence. Toujours précis, il ajuste et mesure ses effets. Il extériorise. En écho, un violoncelliste, Guillaume Bongiraud (ou Clémence Baillot d'Estivaux), dans l'intensité des sons et des vibrations entre en intériorité. Et se laisse gagner par la musique qui se propage en lui jusqu'à voir le corps de l'instrumentiste suivre les mouvements de l'instrument.

Dans ce spectacle, rare parole et musique se complètent, échangent. Dialoguent. Font sens. Le rôle des deux acteurs est magnifié. Et le spectateur, le temps de l'écoute qu'il soit croyant ou non, partage un monde.

Celui d'un Empire finissant. D'un monde naissant. Rome n'est plus Capitale. Rome vit ses dernières décennies. Les impôts écrasent, les peuples Vandales et Goths avancent. L'emprise de Rome s'exerce encore dans les têtes, imposant des rituels, des façons de faire et de s'exprimer mais déjà la vie est ailleurs. Rome n'est plus dans Rome.

© Pascal Gély.
© Pascal Gély.
Augustin est le témoin de cette mutation. Brillant faiseur. Brillant dialecticien. Jouisseur à la conduite ostensible. Qui aime être admiré. Qui mime avec facilité la théâtralité du monde. Il l'évalue, la mesure avec précision. Plaidant avec facilité le pour et le contre, il constate tous les conflits en œuvre dans la représentation, découvre avec stupeur un vide qui l'assaille. "Post coïtum animal triste". Troublé, il discerne pourtant, dans l'attitude bienveillante de proches à son égard, une forme de vie qui le travaille et le traverse.

Entre les mots et les choses, entre le monde et le livre, entre les traces du passé et celles du présent un monde semble vous aimer en dépit de tout. Et sous les apparences surgit comme une évidence. Comme une nouvelle manière de penser et de sentir. Augustin vit une Expérience pleine de Surprise. Un moi entre en dialogue. Mais avec quoi ? Avec qui ?

Le rhéteur orgueilleux se fait humble. Dans une forme d'humilité supérieure qui accepte de ne plus se mesurer, ni compter ses effets, qui approfondit une forme de confiance. Augustin dialogue avec une Puissance d'amour présente en lui et hors de lui. Dans ces aveux, dans cette Antiquité si éloignée dans le temps, un homme raconte une histoire vraie et simple. La sienne. Si proche de nous.

Dans cette mise en scène s'opère une véritable transposition du texte, une mise au présent du Monde.

"Augustin passe aux aveux"

© Dan Parigot.
© Dan Parigot.
Texte : Saint Augustin.
Traduction : Frédéric Boyer (depuis le latin, éditions POL, 2008).
Adaptation : Martine Loriau.
Mise en scène : Dominique Touzé.
Avec : Dominique Touzé.
Musique : Guillaume Bongiraud, Clémence Baillot d’Estivaux.
Durée : 1 h 05.

Du 2 février au 1er avril 2017.
Jeudi et vendredi à 21 h 15, samedi à 17 h.
Théâtre Les Déchargeurs, salle La Bohème, Paris 1er, 01 42 36 00 50.
>> lesdechargeurs.fr

Jean Grapin
Vendredi 17 Février 2017

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© Audrey Bären.
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