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Festivals

Les Arts dans la Rue à Châtillon : Des corps urbains à foison

22 et 23/09, "Les Arts dans la Rue", Châtillon, Hauts-de-Seine

L'édition 2011 du Festival des Arts de la Rue de Châtillon nous avait permis d'apprécier la qualité, l'ampleur et la richesse de la programmation proposée par l'équipe du Théâtre de Châtillon... Et de voir le public répondre largement présent à cette proposition de spectacles gratuits et accessibles à tous. Pour cette quinzième édition, la curiosité et la diversité sont toujours à l'ordre du jour avec pour thème "Des corps urbains", une manière de jouer sur les mots pour retrouver, sous différentes formes d'expressions artistiques, le corps… De la confidence à la performance, les corps seront détaillés, exposés, déshabillés.



"Les miniatures" par la Cie Pernette © Bastien Laurent.
"Les miniatures" par la Cie Pernette © Bastien Laurent.
Cette année, le festival "Les Arts dans la Rue à Châtillon" joue donc sur les mots, avec des corps. Corps dansés, corps fantasmés, corps en apesanteur, corps manipulés, corps athlétiques, drôles de corps… Acteurs, danseurs, musiciens, circassiens, vidéastes se saisissent, à travers leur regard singulier, de la ville et ses évolutions, de manière physique et sensible. De la confidence à la performance, les corps seront détaillés, exposés, autopsiés, déshabillés. Le temps d’un week-end, la ville est spectacle ; le mobilier urbain, les places, parcs, coins et recoins deviennent accessoires et décors des corps urbains. Une rencontre vivante, musicale, vibrante et étonnante avec des artistes venus de toute l’Europe.

Parmi tous ces corps urbains qui s'exprimeront durant ces deux jours, ceux de la Compagnie Pernette seront particulièrement à l'ordre du jour avec deux spectacles : "Le passage" et "Les miniatures". Le premier est une manipulation chorégraphique où un savant fou, à mi-chemin entre Frankenstein et Nosferatu, se livre à une série d’expérimentations sur deux corps "sans vie", corps qu’on ouvre, malaxe, referme, articule et réanime. Une évocation de la manipulation des corps par un virtuose travail chorégraphique mêlant savamment énergie et humour. Le second est composé de quatre pièces courtes pour quatre plaisirs chorégraphiques miniatures : "L’apparition", fascination dansée pour terre glaise et quatre mains ; "L’insomnie", une célébration du tactile ; "La rose", danse d’offrande pour une rue piétonne ; "Les oignons", partition pour deux corps et dix couches de vêtements.

"Granny Turismo" par Larkin’ About (Angleterre) © DR
"Granny Turismo" par Larkin’ About (Angleterre) © DR
Toujours des corps dansés avec la Compagnie N°8 et "Monstre d'humanité", une déambulation chorégraphique où la fin du monde est le thème principal. Pour cette compagnie, les survivants seront sans aucun doute les puissants, les politiciens, les dirigeants et ils n’hésiteront pas à se dévorer entre eux pour conserver leur pouvoir ! La Compagnie L'Yeuse, quant à elle, présente "Partita-s II", une création à l’origine pour huit danseurs professionnels, mais réinventée en version participative avec une vingtaine de danseurs amateurs issus de plusieurs ateliers conduits en septembre à Châtillon par la chorégraphe Erika Zueneli. Toujours de la danse avec les trois danseurs hip hop de "Tout simplement nous" pour "1 Portrait 100 visages" et les "Petits impromptus" de la Compagnie Jeanne Simone qui se joueront au hasard des rues, en plein cœur de l'urbanité quotidienne.

Programmation européenne et humour so british avec Larkin' About et "Granny Turismo". Un délire qui permettra au public de faire connaissance avec Doris, Marge et Mary, trois grand-mères déjantées et survitaminées, juchées sur des caddies pour le moins originaux, et usant d'une veine burlesque bien connu de nos voisins britanniques et qui, en général, font mourir de rire ceux qui croisent leur chemin. Venu des Pays-Bas, De Stijle, Want vous fera part de sa "Turkish Delight", un entre-sort forain et délicieux à la découverte des délices turcs les plus intenses et les plus forts de la tradition ottomane. Un à un, les spectateurs pourront jouir de ce plaisir oriental qui ne durera (malheureusement!) qu’une minute... mais une minute mémorable.

Celso y Frana © Håkan Larsson.
Celso y Frana © Håkan Larsson.
Impressions acrobatiques suédoises pour deux artistes et des livres avec "Here Begins the Story" de Celso y Frana. Un homme et une femme vont se rencontrer, s’affronter, s’apprivoiser dans un univers poétique à l’odeur d’encre et de papier. Ce qui les rapproche, ce sont les livres, remplis de mots qu’ils ne prononcent pas. Ce duo d’artistes venu de Stockholm donne corps à des acrobaties pleines d’émotion, de passion et d’humour pour un voyage au pays de la connaissance. Clowneries musicales et italiennes pour les trois aspirants coiffeurs du Teatro Necessario qui ont décidés d'ouvrir leur "Nuova Barberia Carloni", un salon de coiffure, à Châtillon. Malgré péripéties et rebondissements, ces barbiers clowns-musiciens vont tout faire pour vous prouver leur talent, à grand coup de laques et lotions.

Sans tous les nommer, tant le choix est grand et de qualité, on notera pour finir la présence de trois formations musicales : Badauê, une batucada aux notes brésiliennes, la Fanfare du Comptoir, une formation jazz New Orléans et La Roulotte Ruche, une fanfare rock délirante qui puise son répertoire dans les tubes et hits des années quatre-vingts.

"La succulente histoire de Thomas Farcy" par la Cie Thé à la rue © Georges Mesnage.
"La succulente histoire de Thomas Farcy" par la Cie Thé à la rue © Georges Mesnage.
Sans oublier quelques coups de cœur personnels : les excellents Urbanologues Associés (Antoine Le Menestrel et Jean-Marie Maddeddu) pour une déambulation acrobatique et musicale, entre mur et trottoirs ; Décor Sonore avec "Urbaphonix" ou comment mettre en exergue la multitude de sons que contient la ville ; et pour s'ouvrir, avec humour, l'appétit... rien de telle que "La succulente histoire de Thomas Farcy" par la Compagnie Thé à la rue, une fable gastronomique acide, épicée et irrésistible qui mêle avec gourmandise comédiens farfelus, expressions culinaires, ustensiles de cuisine, légumes et autres denrées alimentaires !

Les 22 et 23 septembre 2012
15e Festival Les Arts dans la Rue à Châtillon.
Théâtre, 3 rue Sadi Carnot, Châtillon (92), 01 55 48 06 90 et 01 55 48 06 90.
>> Programme complet du festival

Gil Chauveau
Mardi 18 Septembre 2012

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"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

Cela dit, personne ne nous avait dit qu'à l'Essaïon, on pouvait aussi assister à des séances de cinéma ! Car c'est pratiquement à cela que nous avons assisté lors de la générale de presse lundi 27 mars dernier tant le talent de Catherine Aymerie, la comédienne seule en scène, nous a emportés(es) et transportés(es) dans l'univers de Balzac. La force des images transmises par son jeu hors du commun nous a fait vire une heure d'une brillante intensité visuelle.

Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
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Brigitte Corrigou
06/03/2024
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"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
08/09/2023
Spectacle à la Une

"Deux mains, la liberté" Un huis clos intense qui nous plonge aux sources du mal

Le mal s'appelle Heinrich Himmler, chef des SS et de la Gestapo, organisateur des camps de concentration du Troisième Reich, très proche d'Hitler depuis le tout début de l'ascension de ce dernier, près de vingt ans avant la Deuxième Guerre mondiale. Himmler ressemble par son physique et sa pensée à un petit, banal, médiocre fonctionnaire.

© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

Joseph Kessel lui consacra pourtant un livre, "Les Mains du miracle", et, aujourd'hui, Antoine Nouel, l'auteur de la pièce, l'incarne dans la pièce qu'il a également mise en scène. C'est un investissement total que ce comédien a mis dans ce projet pour sortir des nimbes le visage étonnant de ce personnage de l'Histoire qui, par son action, a fait libérer près de 100 000 victimes du régime nazi. Des chiffres qui font tourner la tête, mais il est le résultat d'une volonté patiente qui, durant des années, négocia la vie contre le don.

Bruno Fougniès
15/10/2023