La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Paroles & Musique

L'Homme : on a souvent parlé de lui, on l'a rarement aussi justement défini

"L'homme inouï", Théâtre les Déchargeurs, Paris

Il est 19 h 30 au Théâtre Les Déchargeurs. Est annoncé : "Pour L'homme inouï s'il vous plaît". Une petite dizaine de personne s'alignent sagement devant le jeune homme qui vérifie les billets et qui indique la porte au fond à gauche. Celle-ci s'ouvre sur un escalier de marches en pierres qui aboutissent à une petite salle dont nous allons partager l'intimité une petite heure durant.



© DR.
© DR.
Sur ce qui fera office d'espace de jeu, se tient debout et de dos Oldan. Un prénom sans nom, un prénom qui est peut-être un nom. Un prénom que l'on a déjà entendu. L'artiste qui se tient devant nous est auteur, chanteur, comédien, homme de cabaret, de théâtre et de poésie. Rien que ça. Nous nous installons sur les banquettes aménagées pour assister au spectacle, trois de face et à proximité de la scène. Ceux qui n'ont pas froid aux yeux s'assoient au tout premier rang. Il y a une quatrième banquette, accolée au mur, un peu en retrait, plutôt dans la pénombre, pour les spectateurs plus frileux.

Les conversations chuchotées baissent au rythme de la luminosité. Les premières s'évanouissent tandis que la seconde subsiste et confère à la salle une ambiance à la fois réconfortante et secrète. On a l'impression d'avoir été choisi, d'avoir été élu pour partager cette réunion cachée. L'homme se retourne. Il nous fait face, nous dévisage et avec une tendre délicatesse, il nous parle. Il fait de nous les auditeurs privilégiés de ce ce qu'il semble avoir précautionneusement consigné. Il nous parle de lui, il nous parle de nous. Il nous parle de l'Homme.

© Céline Nieszawer.
© Céline Nieszawer.
"L'homme inouï" est un texte créé par Oldan. Créé et non pas écrit car ce n'est pas seulement un texte fait pour être prononcé, mais aussi fait pour être représenté, interprété, joué. Et tout cela, c'est ce qu'Oldan fait. Il investit la scène avec réserve et pudeur. Il conquit son public avec modestie et douceur. Les mots suffisent à remplir l'espace et à tisser des liens entre chacun. Les paroles sont d'une rare beauté. Probablement d'une rare véracité aussi.

Pour accompagner le récit, Patrick Matteis invoque quant à lui un autre langage. Armé pour le moins d'une guitare, s'exprimant sur platine le reste du temps, l'artiste nous touche autant par sa musique que le poète par son débit. Les mots sont précédés par les sons, puis suivis, puis ils s'accordent en une même entité qui nous traduit une même idée. L'Homme s'est créé. Il s'est inventé, a grandi, s'est détruit. Que faire alors de lui ?

Oldan s'érige ici tel un aède contemporain dissertant sur la condition de l'homme. Une poésie pleine de vie.

"L'homme inouï"

De : Oldan.
Avec : Oldan et Patrick Matteis.
Musique : Patrick Matteis.
Création vidéo : Léo Sam.
D'après les peintures de Jérôme Bosch.
Durée : 1 h.

A été joué du 5 septembre au 21 novembre 2017.
Au Théâtre Les Déchargeurs, Paris 1er, 01 42 36 00 50.
Tournée à venir.
>> www.oldan.fr

● Oldan "Nouvelles Album".
Label : Zamok production.
Distribution : >> www.oldan.fr
Sortie : juin 2017.

Ludivine Picot
Vendredi 24 Novembre 2017

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter




Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024