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Théâtre

"Jeux de cartes 1 : PIQUE" : Dernière escale avant le désert !

"Jeux de cartes 1 : PIQUE", Odéon Ateliers Berthier, Paris

Robert Lepage propose sa dernière création "Jeux de cartes 1 : PIQUE". La scène se déroule dans le monde clos des hôtels internationaux et des casinos, elle pourrait tout à fait être annoncée par un bonimenteur de music-hall, factice artefact de Presley "el vice", Vegas Destination Vegas : Dernière escale avant le désert ! Tant l’atmosphère dégagée est celle d’une fin de cycle pour tous les personnages qui composent la pièce.



© Érick Labbé.
© Érick Labbé.
Car c’est à Vegas que viennent s’échouer et échouer les repentis du jeu et de l’alcool, les latinos clandestins, les couples naïfs, les barmans rapaces, les soldats qui se préparent au théâtre de la guerre.
Vegas est un trou du cul du monde.
Vegas est un trou du diable qu’une trombe finale vient évacuer.
Vegas est une vaste enc… en langage moderne. Comptant pour rien.
Vanité des vanités.

La fable conduite par Robert Lepage est simple, simpliste même, et le jeu use et abuse des clichés des novellas, des docufictions, des téléréalités et divers flux d’infos en continu. Rêves de clinquant.
Le dispositif est celui d’une scène circulaire dont les mouvements sont réglés par un dispositif de trappes et de cintres maniés par une équipe technique d’une redoutable efficacité.

© Érick Labbé.
© Érick Labbé.
Comme l’image produite est parfaite, léchée, comme les effets et les recherches formelles sont réussies, comme les comédiens apportent une présence précise, dense et contenue, le spectacle proposé est fluide et sans rupture.

Et du coup, paradoxalement, parce que le récit est conduit en mimétisme d’un monde qui n’a d’épaisseur qu’une surface esthétisée, le spectacle existe sans écart critique.

Robert Lepage propose à la curiosité du public des personnages déprimants et donne à voir la pauvreté des cœurs qui tournent en rond.
Cela donne à penser que notre époque est tout entière un vaste casino, où rien n'est maitrisé, les humains sont déshumanisés et surtout qu’il n'y a pas d'artiste... juste du spectacle qui tourne à vide.

Est-ce suffisant pour l’effet théâtre ?

"Jeux de cartes 1 : PIQUE"

© Érick Labbé.
© Érick Labbé.
Textes de Ex Machina : Sylvio Arriola, Carole Faisant, Nuria Garcia, Tony Guilfoyle, Martin Haberstroh, Robert Lepage, Sophie Martin, Roberto Mori.
Mise en scène : Robert Lepage.
Dramaturgie : Peder Bjurman.
Assistant à la mise en scène : Félix Dagenais.
Musique originale composée et interprétée par Philippe Bachman.
Scénographie : Jean Hazel.
Conception des éclairages : Louis-Xavier Gagnon-Lebrun.
Conception sonore : Jean-Sébastien Côté.
Conception des costumes : Sébastien Dionne, assisté de Stéphanie Cléroux.
Conception des accessoires : Virginie Leclerc.
Conception des images : David Leclerc.
Artiste éolien : Daniel Wurtzel.
Perruques : Rachel Tremblay.
En français, anglais, espagnol ; surtitré en français.
Durée : 2 h 40 sans entracte.

Du 19 mars au 14 avril 2013.
Du mardi au samedi à 20 h, dimanche à 15 h.
Odéon Théâtre de l'Europe, Ateliers Berthier, Paris 17e, 01 44 85 40 40.
>> theatre-odeon.eu

Jean Grapin
Lundi 25 Mars 2013

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© Jean-François Delon.
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© Pics.
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C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

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Brigitte Corrigou
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© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

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Bruno Fougniès
15/10/2023