La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Festivals

Festival Jazz à La Villette 2021… Du régal pour les oreilles encore et toujours !

C'est la dix-neuvième édition de Jazz à La Villette qui se déroule du 1er au 12 septembre à la Grande Halle de la Villette, à la Cité de la Musique et à la Philharmonie de Paris avec cette année du hip-hop, de la soul, du funk et de la musique du monde autour d'artistes de renom ou à la découverte de nouveaux créateurs avec, pour les deux premiers soirs, des hommages à Prince et à Manu Dibango.



Jeanne Added © Maxime Guthfreund.
Jeanne Added © Maxime Guthfreund.
Plateau noir pour un piano de même couleur trônant seul sur scène. La démarche presque timide et esseulée de Bruno Ruder est à l'exacte opposée de son talent et de la maîtrise de son instrument. Puis habillée de rouge, Jeanne Added apparaît. Ils se connaissent depuis de nombreuses années et s'étaient réunis en 2011 dans le trio "Yes is a pleasant country".

Ils rendent hommage à Prince (1958-2016) autour, entre autres, de standards comme "Nothing compares to you" (1985), "Rasperry beret" (1985) et "I feel for you" (1979), mais peu importe à vrai dire car toutes les reprises sont une véritable recréation avec une approche piano-voix où Jeanne Added apporte son souffle profond, vibrant avec intensité, montant dans les octaves avec son cortège d'émotions, le corps porté par celle-ci. Grave, pleine de justesse et de profondeur, la voix s'incarne corporellement dans les paroles.

José James © Maxime Guthfreund.
José James © Maxime Guthfreund.
Puissante, venant de la gorge, la voix se dandine autour d'elle, respirant chaque mot, les expulsant avec tressaillements et vibratos. Puis a cappella, elle interprète une composition de Prince, quasi théâtralement, au sens noble du mot car aucune exagération ne s'y glisse, s'aidant des bras, le corps en mouvement. Du talent brut où les créations de Prince sont portées jusqu'aux nues. Pour "When you were mine" de l'album "Dirty Mind" (1980), Jeanne Added s'accompagne exceptionnellement à la basse.

Bruno Ruger attaque de son côté de façon crescendo, avec un piano très présent où il accompagne Jeanne Added en créant un univers musical où les accords s'enchaînent allant sur un rythme qui mène le chant bien que celui-ci semble faussement avoir son indépendance. Les deux sont en effet intimement liés, mais chacun apporte sa touche artistique se suffisant presque à lui-même. Il attaque un moment un chorus, presque rock dans son approche, qui semble rejoindre un tempo classique dans ses envolées.

Jeanne Added © Maxime Guthfreund.
Jeanne Added © Maxime Guthfreund.
Pour le deuxième concert de la soirée, José James, habillé d'un complet violet, est entouré d'un pianiste, d'un bassiste et d'un batteur. Il endosse pour une seule chanson sa guitare. Le clavier prend parfois le relais du piano. En 2018, dans l'album "Lean on me", il avait repris tout un pan du répertoire de Bill Withers dont le standard, "Ain't no sunshine" (1971) qu'il joue sur scène. Sa voix rythme la musique, devenant un instrument jouant des octaves et poussant son chant sur différents tempos. Taali, chanteuse, compositrice, productrice et mariée à José James avec qui elle a démarré une collaboration en 2014, l'accompagne durant une chanson.

Le scat finalise trois de ses compositions, les rendant ainsi presque identiques. Pieds de nez ou clins d'œil pour des créations qui, de base, sont variées et qui les font devenir presque répétitives dans les dernières mesures. C'est le seul moment qui ne m'a pas emporté. Les musiciens sont autant présents que la partie vocale avec aux instruments à cordes, Ashley Henri.

Il joue de façon très soutenue et tient à plusieurs reprises le lead de la scène. Derrière sa basse, Robin Mullarkey assure la ligne mélodique avec des accords rythmés et dansants. C'est un enchaînement de leads à tour de rôle avec, pour clore le final, Richard Spaven à la batterie qui joue sur presque tous les toms, charleston en appui, donnant une atmosphère enrobée et cuivrée au tempo, José James laissant pour le final les musiciens régaler la salle.

Très belle soirée et vivement la suite du programme !

"Jazz à la Villette"
Du 1er au 12 septembre 2021.
Du mardi au samedi à 20 h.
Dimanche 5 à 16 h 30 et le 12 à 16 h.
221, avenue Jean-Jaurès Paris 19e.
Réservations :
Cité de la musique - Philharmonie de Paris : 01 44 84 44 84.
La Villette : 01 40 03 75 75.
>> jazzalavillette.com

Concert du Mercredi 1er septembre.
José James
José James : chant, guitare.
Ashley Henry : claviers.
Robin Mullarkey : basse.
Richard Spaven : batterie.

"Hommage à Prince"
Jeanne Added : chant, basse.
Bruno Ruder : piano.

José James © Maxime Guthfreund.
José James © Maxime Guthfreund.

Safidin Alouache
Mardi 7 Septembre 2021

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025












À Découvrir

"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
Spectacle à la Une

"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

Brigitte Corrigou
12/04/2025
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024