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Théâtre

"Chœur des amants" Avec le temps… tout recommence, toute caresse toute confiance se survit

Comme on parlerait d'un roman des origines, le "Chœur des amants" de Tiago Rodrigues marque en 2007 l'entrée sur la scène théâtrale de celui qui, depuis, ne cesse de la faire vibrer, multipliant les propositions reliées par le même fil rouge : un amour inconditionnel pour l'humain. C'est là en effet la force vive qui pousse l'actuel directeur du Festival d'Avignon à raconter encore et encore des histoires sur un plateau. Histoires minuscules ou mythiques, à sa guise, mais toujours traversées par le même "Souffle" ("Sopro"), un élan organique porteur de l'une des plus émouvantes déclarations d'amour faites au théâtre.



© Pauline Deboffles.
© Pauline Deboffles.
Ici, un plateau nu et les paroles de "Lui" et "Elle" mêlées l'une à l'autre, indissociables jusqu'à se recouvrir avec parfois un léger décalage échoïque, ou alors paroles se dissociant un temps pour mieux faire entendre la singularité de l'autre, cet autre si précieux qu'il ne fait qu'un avec soi… Seront ainsi égrenés – en quatre temps appelés "Chants" renvoyant au Chœur de la tragédie grecque – les petits et grands moments d'une existence à la fois singulière et universelle, une existence ponctuée par le retour en boucle du quotidien et émaillée par des aspirations de changement afin de sentir que la vie est là qui bat son plein, comme des antidotes à la vacuité que serait la succession des jours et des jours si l'amour des amants ne la transcendait pas.

Sous la plume de Tiago Rodrigues, même les épreuves imposées par les crises deviennent grisantes, des plus sévères aux plus banales, des crises d'asthme conduisant au bord de l'asphyxie ou des crises de couples confrontés à un quotidien bouffeur d'air. Une écriture poétique qui déroule dans ses plis l'insoutenable légèreté de l'être aimant pour dire la force d'"aimer à tout prix", aimer même trop, même mal… "Cet amour est comme un poème ou une chanson… Celui qui dit l'amour résiste à tout…".

© Filipe Ferrereira.
© Filipe Ferrereira.
L'humour – qui rime aussi parfaitement avec amour dont il ne se distingue que par sa première syllabe – trame la narration de ce récit des amants obnubilés par la scène finale de "Scarface". Film mis régulièrement sur pause et fin qu'ils différeront jusqu'à ne jamais la voir, ignorant jusqu'au bout le sort réservé à Al Pacino, l'homme à la séduisante cicatrice cristallisant leurs fantasmes.

Le temps à privilégier, celui d'aimer – cf. la devise gravée à l'intérieur de leur anneau de mariage – contre le temps perdu à faire des choses sans importance comme "regarder des infos, envoyer des factures, essayer de faire du théâtre, etc." (cf. "Inventaire" de Jacques Prévert ou "La complainte du progrès" de Boris Vian), résonne comme un mantra bouddhiste rythmant le quotidien… La mort à laquelle on échappe, l'arrivée d'un bébé, l'emménagement dans un nouvel appartement, le safari, la séparation, les retrouvailles autour de "Quand on n'a que l'amour" de Jacques Brel chanté en chœur, le théâtre et ses succès, le départ du foyer de la fille, la mort du père et, point d'orgue "essentiel", la communion avec la forêt qui dit à son tour : "On a le temps"… le temps d'aimer, le temps garanti ad vitam æternam par le cycle naturel propre à nous réconforter face à la finitude de nos existences.

© Filipe Ferrereira.
© Filipe Ferrereira.
Constituant la matière scénographique de cette pièce polyphonique, les incantations des deux amants placés côte à côte, regardant dans la même direction – celle où nous avons pris place – s'élèvent jusqu'à nous comme un chant d'une religiosité laïque envoûtante. Un oratorio profane où le temps vécu n'est rien d'autre que "lui" et "elle", et puis "eux deux" confondus au sein de la nature nourricière de laquelle ils sont issus et à laquelle ils reviennent, perpétuant ainsi magnifiquement le cycle du vivant.

Vu le vendredi 9 février au Carré de Saint-Médard (33).

"Chœur des amants"

© Filipe Ferrereira.
© Filipe Ferrereira.
Dernière version créée le 24 Septembre 2021, au Théâtre de Lorient (France).
Texte : Tiago Rodrigues.
Traduction : Thomas Resendes.
Texte édité aux Solitaires Intempestifs.
Mise en scène : Tiago Rodrigues.
Avec, en alternance : Océane Caïraty ou Alma Palacios et David Geselson ou Grégoire Monsaingeon (vendredi 9 février : Océane Caïraty et Grégoire Monsaingeon).
Scénographie : Magda Bizarro et Tiago Rodrigues.
Lumières : Manuel Abrantes.
Costumes : Magda Bizarro.
Durée : 55 minutes.

Représenté du jeudi 8 au vendredi 9 février 2024 à la Scène Nationale Carré-Colonnes de Saint-Médard (33).

© Filipe Ferrereira.
© Filipe Ferrereira.
Tournée
20 février 2024 : Le Carré Sévigné, Cesson-Sévigné (35).
21 février 2024 : Les Quinconces & L'Espal - Scène nationale, Le Mans (72).
23 février 2024 : Théâtre du Passage, Neuchâtel (Suisse).
24 et 25 février 2024 : Théâtre Les Halles, Sierre (Suisse).
27 au 29 février 2024 : Théâtre Sorano - Scène conventionnée, Toulouse (31).
2 mars 2024 : Le Cratère - Scène nationale, Alès (30).

Yves Kafka
Lundi 19 Février 2024

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"Différente" Carolina ou "Cada uno es un mundo (Chacun est un monde)"

Star internationale à la frange rouge, Carolina est de retour en France, après sa tournée mondiale. Heureuse de retrouver son public préféré, elle interprète en live des chansons populaires qui touchent le cœur de toutes les générations.

© Audrey Bären.
Mais qui est donc cette incontournable Carolina ? Ou, plus exactement, qui se cache derrière cette artiste plutôt extravagante, à la folie douce ? De qui est-elle l'extension, au juste ?

L'éternelle question autour de l'acte créatif nous interpelle souvent, et nous amène à nous demander quelles influences l'homme ou la femme ont-ils sur leurs "créatures" fabriquées de toutes pièces ! Quelles inspirations les ont portées ! Autant de questions qui peuvent nous traverser particulièrement l'esprit si tant est que l'on connaisse un peu l'histoire de Miguel-Ange Sarmiento !

Parce que ce n'est pas la première fois que Carolina monte sur scène… Décidément, elle en a des choses à nous dire, à chaque fois. Elle est intarissable. Ce n'est pas Rémi Cotta qui dira le contraire, lui qui l'accompagne depuis déjà dix ans et tire sur les ficelles bien huilées de sa vie bien remplie.

Rémi Cotta, artiste plasticien, graphiste, comédien, chanteur lyrique, ou encore metteur en scène, sait jouer de ses multiples talents artistiques pour confier une parole virevoltante à notre Carolina. Il suffit de se souvenir du très original "Carolina Show", en 2010, première émission de télé sans caméra ayant reçu de nombreux artistes connus ou moins connus ou le "Happy Show de Carolina", ainsi que les spectacles musicaux "Carolina, naissance d'une étoile", "Le Cabaret de Carolina", ou encore " Carolina, L'Intelligence Artificielle".

"Différente" est en réalité la maturation de plusieurs années de cabarets et de spectacles où Carolina chante pourquoi et comment elle est devenue une star internationale tout en traversant sa vie avec sa différence". Miguel-Ange Sarmiento.

Brigitte Corrigou
08/11/2024
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"Tout va très bien !" Le Grand Orchestre du Splendid, bon pied bon œil, revient avec de la musique sur tous les fronts

Voir les choses en grand tout en restant léger ! Prendre du plaisir et, surtout, en donner ! Voilà la philosophie du Grand orchestre du Splendid qui régale le public depuis 1977. Bientôt 50 ans… Bientôt le jubilé. "De la musique avant toute chose" et vivre, vivre, vivre…

© Aurélie Courteille.
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Entre swing, jazz, salsa, reggae – quatre de leurs principales influences –, ou encore fiesta et mises en scène délirantes, les quatorze chanteuses et musiciens de l'Orchestre mythique enchantent le public, sur la scène du Café de la Gare, depuis le 11 novembre. Comme à leurs premières heures, et en échappant pourtant aux codes et impératifs de la mode, ils nous donnent irrésistiblement envie de monter sur scène pour danser à leurs côtés sur le plateau, frétiller, sautiller, et tout oublier l'espace de quelques instants. Leur énergie communicative est sans failles, et gagne sans commune mesure toutes les générations. Les cuivres étincellent. Les voix brillent de mille feux sonores.

Brigitte Corrigou
13/11/2024
Spectacle à la Une

"Jacques et Chirac" Un "Magouille blues"* décapant et burlesque n'occultant pas le mythe du président sympa et séducteur

Une comédie satirique enjouée sur le pouvoir, le mensonge et la Cinquième République portée par une distribution tonitruante et enthousiaste, dégustant avec gourmandise le texte de Régis Vlachos pour en offrir la clownesque et didactique substantifique moelle aux spectateurs. Cela est rendu aussi possible grâce à l'art sensible et maîtrisé de l'écriture de l'auteur qui mêle recherche documentaire affinée, humour décapant et bouffonnerie chamarrée pour dévoiler les tours et contours d'un Jacques sans qui Chirac ne serait rien.

© Fabienne Rappeneau.
Portraitiste décalé et impertinent d'une Histoire de France ou de l'Humanité aux galbes pas toujours gracieux dont surgissent parfois les affres de notre condition humaine, Régis Vlachos, "Cabaret Louise" (Louise Michel), "Dieu est mort" (Dieu, mieux vaut en rire)"Little Boy" (nom de la bombe larguée sur Hiroshima), revient avec un nouveau spectacle (création 2023) inspiré d'un des plus grands scandales de notre histoire contemporaine : la Françafrique. Et qui d'autre que Jacques Chirac – l'homme qui faisait la bise aux dictateurs – pouvait être convoqué au "tribunal" du rire et de la fantaisie par l'auteur facétieux, mais doté d'une conscience politique aiguë, qu'est Régis Vlachos.

Le président disparu en 2019 fut un homme complexe composé du Chirac "bulldozer" en politique, menteur, magouilleur, et du Jacques, individu affable, charmeur, mettant autant la main au cul des vaches que des femmes. Celui-ci fut d'abord attiré le communisme pour ses idéaux pacifistes. Il vendra même L'Humanité-dimanche devant l'église Saint-Sulpice.

La diversité des personnalités importantes qui marquèrent le début de son chemin politique joue tout autant la complexité : Michel Rocard, André Malraux et, bien sûr, Georges Pompidou comme modèle, Marie-France Garaud, Pierre Juillet… et Dassault comme portefeuille ! Le tout agrémenté de nombre de symboles forts et de cafouillages désastreux : le bruit et l'odeur, la pomme, le cul des vaches, les vacances à l'île Maurice, les amitiés avec les despotes infréquentables, l'affaire ELF, etc.

Gil Chauveau
03/11/2024