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Danse

"Che Malambo"… Torses bombés avec le bombo !

Le Malambo, cousin du flamenco, investit Bobino. C'est l'autre danse de l'Argentine, plus folklorique et musicale que le Tango, autour d'une représentation où la théâtralité de la virilité est incarnée autant par les instruments que le corps.



© Frank Wiesen.
© Frank Wiesen.
Ils arrivent tel un régiment fier, armé de leurs bombos. Les baguettes tapent de façon synchronisée sur ceux-ci. Les danseurs démarrent avec une synchronisation parfaite du tempo et du rythme. Les pieds enchaînent des zapateados sur toute la plante des pieds. Le tout est très physique avec des frappes au sol très rapide et sonore.

Très peu mélodique, le Malambo, danse argentine créée au XVIIe siècle, repose essentiellement sur les zapatéados accompagnés par les bombos, gros tambour en bois et en peau, porté, relevé, au niveau du torse.

La guitare est aussi un autre élément important et permet d'apporter une couleur différente au spectacle. L'instrument donne en effet un tempo plus lâche, moins rapide à la chorégraphie avec une gestuelle plus relâchée dans les membres inférieurs. Le torse est aussi plus courbé vers le sol à la différence de celui beaucoup plus droit et rêche des interprètes avec leurs tambours.

© Frank Wiesen.
© Frank Wiesen.
La danse est exclusivement masculine. Ce qui ressort avec le jeu des membres inférieurs est ce côté physique qui se veut viril, et qu'il l'est. Il y a toutefois parfois, un brin de caresses au sol quand le pied va chercher autour de la semelle le contact avec la scène. Là, le corps s'affaisse quelque peu, comme celui d'un crooner qui vient s'appuyer obliquement au sol dans une fausse attitude déséquilibrée.

Cette gestuelle n'est adoptée que lorsque le bombo est délaissé au profit de la guitare avec un danseur-guitariste qui semble lécher le plateau avec ses pieds en jouant sur le contour des semelles. La plante des pieds glisse obliquement sur la scène, courbant la cheville pour que le haut du plat du pied vienne le caresser. Elle tourne parfois sur la pointe du pied qui frappe le sol.

© Diane Smithers.
© Diane Smithers.
Le rapport aux planches est aussi beaucoup moins physique et rapide avec les boleadoras, lassos munis de boules de bois aux extrémités, qui donnent un aspect presque circassien à la chorégraphie. La vitesse et une attitude très virile portent là aussi la gestique des interprètes. Avec les boleadoras, le spectacle se décentre du sol, avec les membres inférieurs, et les zapatéados, dans les airs autour de la tête et des épaules. Il s'agit de créer un équilibre entre l'espace et le corps, entre le haut et le bas, le tronc tenant lieu d'équilibre entre les différentes parties.

Les instruments et les éléments battent la mesure. Il y a très peu de cassure de rythme sauf entre chaque chorégraphie. Rien n'y manque. Surtout pas le talent, ainsi que l'humour qui est aussi au rendez-vous autour de la virilité, composante essentielle de représentation.

"Che Malambo"

© Em Watson.
© Em Watson.
Pièce imaginée par Gilles Brinas, en collaboration avec les artistes de la compagnie Che Malambo.
Directeur artistique, chorégraphie, mise en scène : Gilles Brinas.
Avec : Federico Arrua, Fernando Castro, Francisco Matias Ciares, Claudio Daniel Diaz, Miguel Angel Flores, Federico Gareis, Fernando Gimenez, Walter Kochanowski, Facundo Lencina, Gabriel Adrian Lopez, Daniel Medma et Matias Rivas.
Conception musicale et lumière : Gilles Brinas.
Création lumière : Ryan O'Mara.
Durée : 1 h 05.

Du 30 janvier au 21 avril 2019.
Du mercredi au samedi à 19 h, dimanche à 17 h.
Bobino, Paris 14e, 01 43 27 24 24.
>> bobino.fr


Safidin Alouache
Mardi 19 Février 2019

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"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

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Brigitte Corrigou
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Spectacle à la Une

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La comédie musicale rock de Broadway enfin en France ! Récompensée quatre fois aux Tony Awards, Hedwig, la chanteuse transsexuelle germano-américaine, est-allemande, dont la carrière n'a jamais démarré, est accompagnée de son mari croate,Yithak, qui est aussi son assistant et choriste, mais avec lequel elle entretient des relations malsaines, et de son groupe, the Angry Inch. Tout cela pour retracer son parcours de vie pour le moins chaotique : Berlin Est, son adolescence de mauvais garçon, son besoin de liberté, sa passion pour le rock, sa transformation en Hedwig après une opération bâclée qui lui permet de quitter l'Allemagne en épouse d'un GI américain, ce, grâce au soutien sans failles de sa mère…

© Grégory Juppin.
Hedwig bouscule les codes de la bienséance et va jusqu'au bout de ses rêves.
Ni femme, ni homme, entre humour queer et confidences trash, il/elle raconte surtout l'histoire de son premier amour devenu l'une des plus grandes stars du rock, Tommy Gnosis, qui ne cessera de le/la hanter et de le/la poursuivre à sa manière.

"Hedwig and the Angry inch" a vu le jour pour la première fois en 1998, au Off Broadway, dans les caves, sous la direction de John Cameron Mitchell. C'est d'ailleurs lui-même qui l'adaptera au cinéma en 2001. C'est la version de 2014, avec Neil Patrick Harris dans le rôle-titre, qui remporte les quatre Tony Awards, dont celui de la meilleure reprise de comédie musicale.

Ce soir-là, c'était la première fois que nous assistions à un spectacle au Théâtre du Rouge Gorge, alors que nous venons pourtant au Festival depuis de nombreuses années ! Situé au pied du Palais des Papes, du centre historique et du non moins connu hôtel de la Mirande, il s'agit là d'un lieu de la ville close pour le moins pittoresque et exceptionnel.

Brigitte Corrigou
20/09/2023
Spectacle à la Une

"Zoo Story" Dans un océan d'inhumanités, retrouver le vivre ensemble

Central Park, à l'heure de la pause déjeuner. Un homme seul profite de sa quotidienne séquence de répit, sur un banc, symbole de ce minuscule territoire devenu son havre de paix. Dans ce moment voulu comme une trêve face à la folie du monde et aux contraintes de la société laborieuse, un homme surgit sans raison apparente, venant briser la solitude du travailleur au repos. Entrant dans la narration d'un pseudo-récit, il va bouleverser l'ordre des choses, inverser les pouvoirs et détruire les convictions, pour le simple jeu – absurde ? – de la mise en exergue de nos inhumanités et de nos dérives solitaires.

© Alejandro Guerrero.
Lui, Peter (Sylvain Katan), est le stéréotype du bourgeois, cadre dans une maison d'édition, "détenteur" patriarcal d'une femme, deux enfants, deux chats, deux perruches, le tout dans un appartement vraisemblablement luxueux d'un quartier chic et "bobo" de New York. L'autre, Jerry (Pierre Val), à l'opposé, est plutôt du côté de la pauvreté, celle pas trop grave, genre bohème, mais banale qui fait habiter dans une chambre de bonne, supporter les inconvénients de la promiscuité et rechercher ces petits riens, ces rares moments de défoulement ou d'impertinence qui donnent d'éphémères et fugaces instants de bonheur.

Les profils psychologiques des deux personnages sont subtilement élaborés, puis finement étudiés, analysés, au fil de la narration, avec une inversion, un basculement "dominant - dominé", s'inscrivant en douceur dans le déroulement de la pièce. La confrontation, involontaire au début, Peter se laissant tout d'abord porter par le récit de Jerry, devient plus prégnante, incisive, ce dernier portant ses propos plus sur des questionnements existentiels sur la vie, sur les injonctions à la normalité de la société et la réalité pitoyable – selon lui – de l'existence de Peter… cela sous prétexte d'une prise de pouvoir de son espace vital de repos qu'est le banc que celui-ci utilise pour sa pause déjeuner.

La rencontre fortuite entre ces deux humains est en réalité un faux-semblant, tout comme la prétendue histoire du zoo qui ne viendra jamais, Edward Albee (1928-2016) proposant ici une réflexion sur les dérives de la société humaine qui, au fil des décennies, a construit toujours plus de barrières entre elle et le vivant, créant le terreau des détresses ordinaires et des grandes solitudes. Ce constat fait dans les années cinquante par l'auteur américain de "Qui a peur de Virginia Woolf ?" se révèle plus que jamais d'actualité avec l'évolution actuelle de notre monde dans lequel l'individualisme a pris le pas sur le collectif.

Gil Chauveau
15/09/2023