La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Danse

Alvin Ailey aux étés de la Danse… De la pure élégance technique !

Avec Alvin Ailey, le spectacle est toujours au rendez-vous. Le chorégraphe américain reste toujours aussi présent sur la scène internationale grâce à la compagnie qu'il a créée et à ses œuvres, devenues des classiques pour certaines, où règne une certaine joie artistique.



"r-Evolution, Dream" © Paul Kolnik.
"r-Evolution, Dream" © Paul Kolnik.
Ils reviennent pour la cinquième fois en treize ans dans le festival. L'Alvin Ailey American Dance Theater continue l'œuvre d'Alvin Ailey (1931-1989) avec ses chorégraphies et de nouvelles créations. Elles peuvent être à la fois autant joyeuses que graves et romantiques. Le jeu théâtral y participe pleinement avec une expression accentuée des corps et des visages. Les danseurs se font autant interprètes techniques de mouvements que médias d'émotions.

"r-Evolution, Dream" fait apparaître plusieurs rangées de danseurs aux mouvements amples où la chorégraphe Hope Boykin s'est inspirée des discours et homélies de Martin Luther King Jr. Des sprints sont mimés dans lesquels la rythmique donne une impression de courses de vitesse. Les mouvements sont parfois découplés au niveau des bras où une torsion remonte aux clavicules faisant pivoter légèrement en arrière le tronc.

Le solo "In/Side" de Robert Battle, avec un homme vêtu de son seul sous-vêtement, incarne la souffrance humaine. La douleur est montrée dans un corps contorsionné au sol semblant poussé des cris. Il est dans des attitudes courbes et angulaires sur les axes verticaux et horizontaux. L'exercice est d'équilibriste car le solo intègre un aspect autant chorégraphique que théâtral.

Kanji Segawa, "The Winter in Lisbon" © Paul Kolnik.
Kanji Segawa, "The Winter in Lisbon" © Paul Kolnik.
"The winter in Lisbon" et "Open door" sont des danses très joyeuses avec une synchronisation des membres, inférieurs et supérieurs. Joyeuse car le sourire est sur les lèvres et la gestuelle mêle à la dextérité, un relâchement dans les finales faisant osciller les mouvements dans des versants dynamiques et flegmatiques comme si les danseurs étaient poussés par des forces d'attraction et de lâcher prise.

Les interprètes font des torsions basculant leur tronc d'une position à une autre. La synchronisation des mouvements est de deux ordres. Le premier fait du groupe une seule et même entité, alors que le deuxième fait exister, de façon décalée, un couple ou un soliste.

Ailey, c'est une danse, aux différentes émotions, parfois revendicatrice puisant dans la culture noire américaine et chez Merce Cunningham (1919-2009) avec des placements tout au long de la scène où le centre n'existe pas. Ainsi, celle-ci devient quasi mouvante avec le déplacement des interprètes, simulés ou réels par le biais des membres inférieurs, supérieurs et quelques sauts.

C'est une danse qui montre le corps dans toute sa souplesse, sa grâce, et sa force. Ces trois composantes se nourrissent les unes aux autres dans une poétique artistique où la beauté prime dans les mouvements d'ensemble ou de solo sans pour autant que la technicité des figures ne soit occultée.

Les Étés de la Danse est un grand événement culturel. Il serait sacrément chouette si la programmation variait un peu plus. Il y va de l'intérêt de la danse et du festival.

"Les Étés de la Danse, 2017"

Rachael McLaren et Jamar Roberts, "Blues Suite" © Paul Kolnik.
Rachael McLaren et Jamar Roberts, "Blues Suite" © Paul Kolnik.
Alvin Ailey American Dance Theater.
Fondateur : Alvin Ailey.
Directrice artistique : Judith Jamison.
Directeur artistique : Robert Battle.
Directeur artistique associé : Masazumi Chaya.
Maître de ballet et artiste invité : Matthew Rushing.
Assistante maître de ballet : Linda Celeste Sims.
Directeur exécutif : Bennett Rink.
Chorégraphes : Kyle Abraham, Hope Boykin, Ronald K. Brown, Rennie Harris, Paul Taylor, Christopher Wheeldon, Billy Wilson.
Avec : Hope Boykin, Jeroboam Bozeman, Clifton Brown, Sean A. Carmon, Sarah Daley, Ghrai DeVore, Solomon Dumas, Samatha Figgins, Vernard J. Gilmore, Jacqueline Green, Daniel Harper, Jacquelin Harris, Collin Heyward, Michael Jackson Jr, Megan Jakel, Yannick Lebrun, Renaldo Maurice, Ashley Mayeux, Chalvar Monteiro, Michael Francis McBride, Akua Noni Parker, Rachael McLaren, Danica Paulos, Samuel Lee Roberts, Belen Pereyra, Kanji Segawa, Jamar Roberts, Glenn Allen Sims, Linda Celeste Sims, Constance Stamatiou, Jermaine Terry, Fana Tesfagiorgis.

Jusqu'au 22 juillet 2017.
Du lundi au samedi à 20 h 30, matinée samedi à 15 h.
La Seine Musicale, 1, cours de l'Île Seguin, Boulogne-Billancourt (92).
Réservations : 01 74 34 54 00 (Seine musicale) ou sur le site des Étés de la danse :
>> lesetesdeladanse.com

Safidin Alouache
Samedi 22 Juillet 2017

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025







À Découvrir

"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024