La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Danse

Alvin Ailey... Entre répertoires et créations, l'expression d'une beauté universelle de la danse

Le festival "Les Étés de la Danse" ouvre leur onzième édition avec, une nouvelle fois, la présence de l'Alvin Ailey American Dance Theater. Cette compagnie, désignée en 2008 par le congrès américain "ambassadeur de la culture américaine", allie traditions et modernité dans un esthétisme aiguisé de la scénographie.



"Lift" d'Aszure Barton © Rosalie O Connor.
"Lift" d'Aszure Barton © Rosalie O Connor.
"Lift", "After the rain", "Four corners" et "Revelations" composent le premier spectacle des "Étés de la Danse" où se mêlent solos, duos et danses de groupe mariés à des influences modernes, afro-américaines et classiques. Les chorégraphies sont composées en autant de mouvements aux rythmes lents et amples que dynamiques et étirés.

"Lift" est une œuvre qui respire d'énergie et d'enthousiasme. Les danseurs exécutent des mouvements en virgule, fluides, relâchés ou en parfaite synchronisation. Des oscillations naissent de mouvements de faibles amplitudes, faisant vibrer tout le corps, qu'amples et souples à la gestuelle courbe.

La pièce "Fours corners" est superbe d'énergie et de synchronisme. C'est une chorégraphie qui se finit en figure de groupe avec des artistes prenant toute l'étendue de la scène. Au départ, ceux-ci délimitent leur territoire par le biais de lancés de bras courbes ou étirés, accompagnés de rotations des jambes. Ils se tournent aussi par intermittence le dos, bras distendus, jouant de mouvements amples, le tout ponctué de sauts. C'est superbe de technicité avec des impulsions très synchronisées.

"Four Corners" de Ronald K. Brown © Paul Kolnik.
"Four Corners" de Ronald K. Brown © Paul Kolnik.
"After the rain" est la rencontre de la Grâce et de la Force entre deux êtres, une Grâce aux expressions corporelles souples et arrondies et une Force à la fois contenue et relâchée, donnant un sentiment de quiétude à la chorégraphie. Le pas de 2 est superbe d'équilibre avec la rencontre de deux danseurs qui se sont déjà trouvés, faisant ainsi un pied-de-nez à "Four corners" où on se touche au préalable sans vraiment se rencontrer. Là, les corps se frôlent, s'attirent, s'unissent et se complètent dans une belle harmonie faisant de celui-ci un média de contact.

"Revelation", créée en 1960, finit le spectacle. Cette création est devenue la signature d'Alvin Ailey. C'est une réalisation chorégraphique qui a réellement eu un grand succès international. La construction en est moins technique et la composition, dans son ensemble, est surtout nourrie de rythmes avec des chants negro-spirituals très présents. Ce qui est intéressant dans la chorégraphie est le "décrochage" fait par des solos qui se détachent du groupe et qui, brièvement, accélèrent la cadence.

"Revelations" d'Alvin Ailey © Nan Melville.
"Revelations" d'Alvin Ailey © Nan Melville.
Les productions composant ce premier spectacle sont très esthétiques, portés par des corps comme sculptés dans la chair. Chez Ailey, le beau corps fait la danse car la danse façonne le corps. Il devient ainsi non plus le moyen du danseur mais aussi sa fin. Le thème du show est la rencontre/confrontation entre les espaces, grands et petits, les danseurs, seuls, à deux ou en groupe et les genres artistiques, classique, moderne et traditionnel. Nous sommes ainsi au carrefour de plusieurs tendances artistiques faisant des danseurs des acteurs investis d'une mission : faire montre de la beauté culturelle de la danse.

Alvin Ailey American Dance Theater.
Directeur artistique : Robert Battle.
Directeur artistique associé : Masazumi Chaya.

"Lift" (2013)
Chorégraphie : Aszure Barton.

"After the Rain" de Christopher Wheeldon © Paul Kolnik.
"After the Rain" de Christopher Wheeldon © Paul Kolnik.
Assistants chorégraphie : Jonathan Emanuell Alsberry et William Briscoe.
Musique : Curtis Macdonald.
Costumes : Fritz Masten.
Lumières : Burke Brown.
Avec : Jamar Roberts, Daniel Harder, Renaldo Maurice, Matthew Rushing, Antonio Douthit-Boyd, Kirven Douthit-Boyd, Yannick Lebrun, Marcus Jarrell Willis, Vernard J. Gilmore, Jeroboam Bozeman, Samuel Lee Roberts, Glenn Allen Sims, Akua Noni Parker, Rachael McLaren, Belen Pereyra, Demetia Hopkins-Greene, Hope Boykin, Jacqueline Green, Ghrai DeVore.

"After the rain Pas De Deux" (2005).
Chorégraphie : Christopher Wheeldon (ballet remonté par Jason Fowler).
Musique : Arvo Pärt.
Costumes : Holy Hynes.
Lumières : Mark Stanley.
Avec : Linda Celeste Sims, Glenn Allen Sims.

"Four corners" (2013).
Chorégraphie : Ronald K. Brown.
Assistant chorégraphe : Arcell Cabuag.
Musiques : Carl Hancock Rux et divers compositeurs.
Costumes : Omotayo Wunmi Olaiya.
Lumières : Al Crawford.
Avec : Rachael McLaren, Demetia Hopkins-Greene, Jamar Roberts, Antonio Douthit-Boyd, Akua Noni Parker, Sarah Daley, Ghrai DeVore, Fana Tesfagiorgis, Yannick Lebrun, Vernard J. Gilmore, Jeroboam Bozeman.

© DR.
© DR.
"Revelation" (1960).
Chorégraphie : Alvin Ailey.
Musique : Chants traditionnels.
Costumes : Ves Harper.
Costumes pour Rocka My Soul redessinés par Barbara Forbes.
Lumières : Nicola Cernovitch.
Avec l'ensemble de la Compagnie.

Du 7 juillet au 1er août 2015.
Du lundi au vendredi à 20 h, samedi à 15 h et 20 h.
Théâtre du Châtelet, Paris 1er, 01 40 28 28 40.
>> chatelet-theatre.com
>> lesetesdeladanse.com

Safidin Alouache
Mardi 21 Juillet 2015

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter





Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

"Bienvenue Ailleurs" Faire sécession avec un monde à l'agonie pour tenter d'imaginer de nouveaux possibles

Sara a 16 ans… Une adolescente sur une planète bleue peuplée d’une humanité dont la grande majorité est sourde à entendre l’agonie annoncée, voire amorcée diront les plus lucides. Une ado sur le chemin de la prise de conscience et de la mutation, du passage du conflit générationnel… à l'écologie radicale. Aurélie Namur nous parle, dans "Bienvenue ailleurs", de rupture, de renversement, d'une jeunesse qui ne veut pas s'émanciper, mais rompre radicalement avec notre monde usé et dépassé… Le nouvel espoir d'une jeunesse inspirée ?

© PKL.
Sara a donc 16 ans lorsqu'elle découvre les images des incendies apocalyptiques qui embrasent l'Australie en 2020 (dont l'île Kangourou) qui blessent, brûlent, tuent kangourous et koalas. Images traumatiques qui vont déclencher les premiers regards critiques, les premières révoltes générées par les crimes humains sur l'environnement, sans évocation pour elle d'échelle de gravité, cela allant du rejet de solvant dans les rivières par Pimkie, de la pêche destructrice des bébés thons en passant de l'usage de terres rares (et les conséquences de leur extraction) dans les calculettes, les smartphones et bien d'autres actes criminels contre la planète et ses habitants non-humains.

Puisant ici son sujet dans les questionnements et problèmes écologiques actuels ou récurrents depuis de nombreuses années, Aurélie Namur explore le parcours de la révolte légitime d’une adolescente, dont les constats et leur expression suggèrent une violence sous-jacente réelle, puissante, et une cruelle lucidité, toutes deux fondées sur une rupture avec la société qui s'obstine à ne pas réagir de manière réellement efficace face au réchauffement climatique, à l'usure inconsidérée – et exclusivement humaine – de la planète, à la perte de confiance dans les hommes politiques, etc.

Composée de trois fragments ("Revoir les kangourous", "Dézinguée" et "Qui la connaît, cette vie qu'on mène ?") et d'un interlude** – permettant à la jeunesse de prendre corps "dansant" –, la pièce d'Aurélie Namur s'articule autour d'une trajectoire singulière, celle d'une jeune fille, quittant le foyer familial pour, petit à petit, s'orienter vers l'écologie radicale, et de son absence sur le plateau, le récit étant porté par Camila, sa mère, puis par Aimé, son amour, et, enfin, par Pauline, son amie. Venant compléter ce trio narrateur, le musicien Sergio Perera et sa narration instrumentale.

Gil Chauveau
10/12/2024
Spectacle à la Une

"Dub" Unité et harmonie dans la différence !

La dernière création d'Amala Dianor nous plonge dans l'univers du Dub. Au travers de différents tableaux, le chorégraphe manie avec rythme et subtilité les multiples visages du 6ᵉ art dans lequel il bâtit un puzzle artistique où ce qui lie l'ensemble est une gestuelle en opposition de styles, à la fois virevoltante et hachée, qu'ondulante et courbe.

© Pierre Gondard.
En arrière-scène, dans une lumière un peu sombre, la scénographie laisse découvrir sept grands carrés vides disposés les uns sur les autres. Celui situé en bas et au centre dessine une entrée. L'ensemble représente ainsi une maison, grande demeure avec ses pièces vides.

Devant cette scénographie, onze danseurs investissent les planches à tour de rôle, chacun y apportant sa griffe, sa marque par le style de danse qu'il incarne, comme à l'image du Dub, genre musical issu du reggae jamaïcain dont l'origine est due à une erreur de gravure de disque de l'ingénieur du son Osbourne Ruddock, alias King Tubby, en mettant du reggae en version instrumentale. En 1967, en Jamaïque, le disc-jockey Rudy Redwood va le diffuser dans un dance floor. Le succès est immédiat.

L'apogée du Dub a eu lieu dans les années soixante-dix jusqu'au milieu des années quatre-vingt. Les codes ont changé depuis, le mariage d'une hétérogénéité de tendances musicales est, depuis de nombreuses années, devenu courant. Le Dub met en exergue le couple rythmique basse et batterie en lui incorporant des effets sonores. Awir Leon, situé côté jardin derrière sa table de mixage, est aux commandes.

Safidin Alouache
17/12/2024
Spectacle à la Une

"R.O.B.I.N." Un spectacle jeune public intelligent et porteur de sens

Le trio d'auteurs, Clémence Barbier, Paul Moulin, Maïa Sandoz, s'emparent du mythique Robin des Bois avec une totale liberté. L'histoire ne se situe plus dans un passé lointain fait de combats de flèches et d'épées, mais dans une réalité explicitement beaucoup plus proche de nous : une ville moderne, sécuritaire. Dans cette adaptation destinée au jeune public, Robin est un enfant vivant pauvrement avec sa mère et sa sœur dans une sorte de cité tenue d'une main de fer par un être sans scrupules, richissime et profiteur.

© DR.
C'est l'injustice sociale que les auteurs et la metteure en scène Maïa Sandoz veulent mettre au premier plan des thèmes abordés. Notre époque, qui veut que les riches soient de plus en plus riches et les pauvres de plus pauvres, sert de caisse de résonance extrêmement puissante à cette intention. Rien n'étonne, en fait, lorsque la mère de Robin et de sa sœur, Christabelle, est jetée en prison pour avoir volé un peu de nourriture dans un supermarché pour nourrir ses enfants suite à la perte de son emploi et la disparition du père. Une histoire presque banale dans notre monde, mais un acte que le bon sens répugne à condamner, tandis que les lois économiques et politiques condamnent sans aucune conscience.

Le spectacle s'adresse au sens inné de la justice que portent en eux les enfants pour, en partant de cette situation aux allures tristement documentaires et réalistes, les emporter vers une fiction porteuse d'espoir, de rires et de rêves. Les enfants Robin et Christabelle échappent aux services sociaux d'aide à l'enfance pour s'introduire dans la forêt interdite et commencer une vie affranchie des règles injustes de la cité et de leur maître, quitte à risquer les foudres de la justice.

Bruno Fougniès
13/12/2024