La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Danse

"A passage to Bollywood"… Un art chorégraphique et conté propre au cinéma indien

Depuis cinq ans, le spectacle du chorégraphe Ashley Lobo avec le Navdhara India Dance Theatre poursuit sa tournée dans différentes villes du monde. C'est l'une des rares compagnies indiennes qui tournent à l'international et Ashley Lobo nous fait découvrir cet art cinématographique indien très coloré avec ses codes.



© Navdhara India Dance Theatre.
© Navdhara India Dance Theatre.
Bollywood, contraction de Bombay et Hollywood, a son propre univers tissé autour d'une fable. Le chant s'allie à la danse, les scripts sont de la partie et le play-back est de coutume. Tout est réglé comme du papier à musique avec un conte, pour ce spectacle, où amour et violence sont parties liées. En préambule, les personnages sont présentés sans qu'ils soient pour autant sur scène, au travers de scripts avec une voix-off en anglais. L'écrit précède l'oral et l'oral l'action. Nous sommes à cheval entre le cinéma et le conte au travers du théâtre.

C'est très rythmé et joyeux. Quelles que soient les scènes, les chansons, toujours accompagnées de danses, elles se suivent dans un rythme très festif. Avec des costumes très colorés, cela respire la joyeuseté même si parfois celle-ci est interrompue par le drame ou la violence.

Bollywood, c'est la vie exagérée mille fois comme expliquée en voix-off en début de représentation. Personnages et contexte sont présentés comme si nous étions dans un roman. Ce qui est tout de suite exprimé est que ce qui se joue sur scène est le fruit d'une imagination, celle d'un créateur et pourquoi pas, celle du spectateur. Nous sommes dans un spectacle où le naturel n'a pas droit de cité.

© Navdhara India Dance Theatre.
© Navdhara India Dance Theatre.
Le jeu, les chants et les chorégraphies sont dans une forte expressivité. À aucun moment, la tension et la subtile "exagération", au sens noble du terme, ne sont prises en défaut. Les émotions, les attitudes faciales et la gestique sont très marquées. Elles en sont un relief qui donne au jeu un timbre presque irréel. Les interprètes jouent à être ce qu'ils ne sont pas en emmenant le public vers une histoire où le conte ne le dispute jamais à la réalité.

Les danses de groupe, avec quelques rares duos, sont en appui des chansons. En play-back, à l'exception de la première et de la dernière, elles donnent un aspect très réglé dans lesquels les interprètes enchaînent les unes après les autres les scènes dans un rythme très soutenu. Des gestuelles, souvent de petite amplitude corporelle, agrémentent chacune d'elles. Celles-là sont rapides, presque furtives, toujours très synchronisées, souvent proches du corps avec les mains qui s'agitent comme des drapeaux ou des bras qui se tendent en avant, légèrement fléchis alors que les membres inférieurs font des mouvements rapides de la gauche vers la droite. Pas de hasard, ni d'improvisation. Tout se tient dans un tempo rapide avec quelques respirations dans des temps qui sont tout sauf faibles.

Les scènes sont découpées en chapitres où tout de la fable est au rendez-vous avec un beau jeune homme de qualité voulant quitter son village pour réussir à Mumbai (anciennement Bombay). Il découvre aussi bien l'amour que la violence des quartiers. La traduction est difficilement lisible car suivre les paroles affichées côtés cour et jardin en regardant en même temps les chorégraphies au centre relèvent presque de l'exploit. Nous sommes dans un univers de "contes de faits" brodés de poésie où il se passe toujours quelque chose, un amour, un meurtre, l'indulgence d'un "parrain" ou un combat. La vie n'est pas un long fleuve tranquille et celui de Bollywood arrive toujours à destination de façon fraîche et enjouée. Et tout en couleur !

"A passage to Bollywood"

© Navdhara India Dance Theatre.
© Navdhara India Dance Theatre.
Chorégraphie, mise en scène : Ashley Lobo.
Direction des répétitions : Yuko Harada, Veronica Jose, Naren Lalwani.
Maître de ballet : Yehuda Maor.
Avec 22 danseurs et 2 chanteurs.
Lumières : Sangeet Shrivastava, Gyandev Singh.
Son : Sreejith Menon.
Musique : Naren Lalwani.
Costumes : Pooja Uberoi, Farah Momin, Simran Handa, Sonakshi Amitabh, Karma Chuki, Sanjana Gupta.
Coiffure, maquillage : Sonakshi Amitabh et Simonil Vakil.
Accessoires : Sonakshi Amitabh, Simonil Vakil.
Décors : Naren Lalwani, Razul Singh, Chetan Solanki.
Identité visuelle : Aditya Harjai.
Vidéo : Bobo, Naren Lalwani.
Voix off : Harsh Singh, Ramneeka Lobo et Pravin Shrikhande.
Production : The Danceworx/Navdhara India Dance Theatre.
Durée : 1 h 20.

© Navdhara India Dance Theatre.
© Navdhara India Dance Theatre.
Du 11 au 25 décembre 2021.
Mardi, mercredi, vendredi, samedi à 20 h 30, jeudi à 19 h 30, dimanche à 15 h 30.
Vendredi 24 décembre à 19 h 30 et samedi 25 décembre à 17 h.
Théâtre National de Chaillot, Salle Jean Vilar, Paris 16e, 01 53 65 30 00.
>> theatre-chaillot.fr

Safidin Alouache
Jeudi 16 Décembre 2021

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025












À Découvrir

"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
Spectacle à la Une

"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

Brigitte Corrigou
12/04/2025
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024