La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Danse

"100 % Cuban"… Un régal… à la découverte de la culture cubaine !

Autour de sept chorégraphes, cinq créations et quatorze danseurs, le Théâtre national de Chaillot met à l'honneur Cuba avec la compagnie Acosta Danza créée par Carlos Acosta. C'est un voyage mêlant des mythes, la Santeria, des langues folkloriques et contemporaines, un vieux chant de prières Yoruba, la littérature cubaine anti-esclavagiste et une ballade au bord de mer sur le malecón de la Havane.



"De Punta a Cabo" © Yuris Nórido.
"De Punta a Cabo" © Yuris Nórido.
"Liberto", "Hybrid", "Paysage, Soudain, la nuit", "Impronta" et "De Punta a Cabo" sont les cinq créations qui composent le spectacle. Aussi variées que multiples, elles nous emmènent à la découverte de la culture cubaine par le biais de différents chemins artistiques.

Différentes les unes des autres, les chorégraphies reposent, toutes, sur de la grâce. Les gestuelles s'accompagnent de courbures, d'arrondis laissant voir une gestique à la fois pleine de tension et de décontraction. Les angles droits n'ont pas droit de cité. Les artistes se lient les uns aux autres autour de différentes figures qui mêlent petits sauts, tours de cent quatre-vingts degrés, appuis sur les bras et les épaules, lancés de jambes et courbures des troncs. Les plantes des pieds, en biais, laissent les corps en suspension comme à la recherche d'un équilibre.

Assis par terre de temps en temps, les jambes allongées, ils gigotent par petits sauts par le biais des postérieurs. Celles-ci peuvent se lever aussi jusqu'aux épaules. Parfois un tronc se plie à l'arrière pour former un demi-cercle. Les gestuelles sont souvent amples et ouvertes comme un appel à l'ailleurs et au monde. La vitesse semble accompagner le temps, comme si les secondes s'écoulaient doucement et calmement.

"Paysage, Soudain, la nuit" © Kike.
"Paysage, Soudain, la nuit" © Kike.
Dans chaque chorégraphie, il y a une expressivité festive, grave, ou une couleur comme avec le bleu dans "Impronta". Dans "Hybrid" de Norge Cedeño et Thais Suárez, le rouge et des couleurs sombres mettent les deux groupes de danseurs dans une disposition scénique frontale. "Liberto" de Raúl Reinoso est un pas de deux qui s'inspire de deux œuvres de la littérature cubaine anti-esclavagiste "El monte" de Lydia Cabrera (1899-1991) et "Biografía de un cimarrón" de Miguel Barnet. Pour ce duo, la musique est de Pepe Gavilondo que l'on retrouve aussi dans le solo "Impronta" avec Zeleydi Crespo. Les mouvements sont là aussi tout en fluidité. Le corps est presque élastique, en adéquation avec la gravité, comme porté par elle.

Dans "De Punta a Cabo" de Alexis Fernández et Yaday Ponce, et "Paysage, Soudain, la nuit" du suédois Pontus Lidberg sur une composition du compositeur cubain Leo Brouwer, les interprètes, en duo pour certains, se détachent de l'ensemble pour créer une deuxième ligne artistique quand la première en construit une autre. Autour de pas de deux et d'une myriade de gestiques synchronisées, les mains sont en appui sur les dos, les membres inférieurs et supérieurs se touchent et se frôlent, des troncs se courbent et se plient aux articulations de façon saccadée et séquentielle. Le rapport à l'autre, toujours proche et avec une distance de quelques centimètres, donne une individualité propre à chacun. Ce qui est remarquable est cette justesse des prises et des contacts car aucun ne semble physique comme si tout était léger, les corps étant plus un appui, un support qu'une résistance.

"Liberto" (répétition) © Pepe Gavilondo.
"Liberto" (répétition) © Pepe Gavilondo.
"De Punta a Cabo" débute avec une vidéo projetée en arrière-scène. Elle a pour décor le malecón de la Havane, cette longue et large promenade majestueuse sur le littoral de la ville qui la protège de la mer. Cette jetée, lieu de rencontres, est une avenue de bord de mer célèbre à Cuba. Nous retrouvons les artistes debout sur celle-ci. L'aspect est festif, surtout quand sur scène, ils se retrouvent en emmenant avec eux des percussions. Après avoir été si proches, les couples s'enlacent enfin pour finir en maillot de bain. La vie devient un régal comme une invitation à les rejoindre.

"100 % Cuban"

"De Punta a Cabo" © Enrique Soldevilla Estudio.
"De Punta a Cabo" © Enrique Soldevilla Estudio.
Direction artistique : Carlos Acosta.
Directeur des répétitions : Yaday Ponce.
Avec : Zeleidy Crespo, Enrique Corrales, Yasser Dominguez, Mario Sergio Elias, Arelys Hernandez, Penelope Moréjon, Liliana Menéndez, Marco Palomino, Raúl Reinoso, Amisaday Rodriguez, Laura Rodriguez, Alejandro Silva, Chay Torres, Patricia Torres.

"Liberto"
Chorégraphie : Raúl Reínoso.
​Musique : Pepe Gavilondo.
Conception musicale : Raúl Reínoso et Pepe Gavilondo.
Costumes : Alisa Pelaez.
Lumières : Yaron Abulafia.
Durée : 17 minutes.

"Hybrid"
Chorégraphie : Norge Cedeño et Thais Suárez.
Assistant à la chorégraphie : Niosbel González.
Musique : Jenny Peña et Randy Araujo.
Lumières et scénographie : Yaron Abulafia.
Costumes : Celia Ledón.
Durée : 24 minutes.

"Paysage, Soudain, la nuit" © Yuris Nórido.
"Paysage, Soudain, la nuit" © Yuris Nórido.
"Paysage, soudain, la nuit"
Chorégraphie : Pontus Lidberg.
Musique : Leo Brouwer (Cuban Landscape with Rumba) et Stefan Levin (Cuban Landscape).
Costumes : Karen Young.
Lumières : Patrik Bogårdh.
Assistant à la dramaturgie et chorégraphie : Adrian Silver.
Scénographie : Elizabet Cerviño.
Durée : 17 minutes.

"Impronta"
Chorégraphie : Maria Rovira.
Musique Pepe Gavilondo.
Lumières Pedro Benitez.
Durée : 7 minutes.

"De Punta a Cabo"
Chorégraphie : Alexis Fernandez (Maca) et Yaday Ponce.
Musique : Kumar, Kike Wolf - From "Beautiful Cuban" de José White and Omar Sosa.
Costumes : Vladimir Cuenca.
Lumières : Yaron Abulafia.
Durée : 17 minutes.

"Liberto" (répétition) © Pepe Gavilondo.
"Liberto" (répétition) © Pepe Gavilondo.
Directeur technique : Luis Carlos Benvenuto.
Responsable production : Jenny Wheeler.
Régisseure adjointe : Emma Maxwell.
Production : Electrician Arnaud Stephenson.
Lumières : Pedro Benitez.
Son : José Acedo.
Habillage : Yunet Uranga.
Administrateur : Heian Perón Araujo.

Du 10 au 18 mars 2022.
Mardi, mercredi, vendredi et samedi à 20 h 30, jeudi à 19 h 30 et dimanche à 15 h 30.
Chaillot -Théâtre national de la Danse, Paris 16e, 01 53 65 30 00.
>> theatre-chaillot.fr

Safidin Alouache
Mercredi 16 Mars 2022

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025












À Découvrir

"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
Spectacle à la Une

"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

Brigitte Corrigou
12/04/2025
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024