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Concerts

Mozart superstar au Festival des Lumières

Du 23 au 26 septembre 2017, le Festival des Lumières de Montmorillon, dans la Vienne, met encore à l'honneur pour sa sixième édition le répertoire du Siècle des Lumières. Pendant quatre jours, des concerts gratuits ou payants interprétés par des formations d'envergure sont proposés au public. Le pianiste François Dumont, accompagné de l'Orchestre National d'Île-de-France dirigé par David Reiland, a superbement inauguré le festival avec une soirée consacrée au divin Mozart.



© Mathias Nicolas.
© Mathias Nicolas.
Appartenant au Réseau Spedidam (1), le Festival des Lumières (2) dédié aux répertoires baroque et classique n'a cessé de renforcer sa ligne artistique en offrant désormais les meilleures formations pendant quatre jours. Les deux concerts (gratuits) de l'après-midi programment le théorbe de Victorien Disse, les solistes des Musiciens du Louvre (l'orchestre complet se produit en soirée dans un programme Haendel), le claveciniste Justin Taylor avec ses complices, entre autres.

Le soir, le public peut applaudir aussi (pour un prix modique dans l'Espace Gartempe inauguré en juillet et doté d'une très bonne acoustique) Jérémie Rohrer et son Cercle de l'Harmonie pour les trois dernières symphonies de Mozart (le 25 août), ainsi que l'ensemble Vocello composé du chœur Sequenza 9.3 et du violoncelliste Henri Demarquette (le 26 août).

Pour la première soirée du festival, un peu plus de trente-cinq des quatre-vingt-quinze musiciens de l'Orchestre National d'Île-de-France dirigés par le chef belge David Reiland donnaient la répartie au pianiste François Dumont - remplaçant au pied levé Cyril Huvé souffrant. Dans le dernier concerto pour piano de Mozart, le n° 27 en si bémol majeur (K.595), sans partition, le pianiste français, lauréat des meilleurs concours (tels Chopin et Reine-Elisabeth), offrait une prestation remarquable, accompagné idéalement par les solistes de l'ONDIF.

© Mathias Nicolas.
© Mathias Nicolas.
Composé (alors qu'il ne reste que onze mois à vivre au compositeur) au début de la très prolifique année 1791, le Concerto n° 27 témoigne du génie souverain du musicien jouant d'une technique consommée pour atteindre des sommets d'expressivité - entre méditation et résignation, rires et larmes. Par la poésie rare et la grâce de son jeu lumineux, François Dumont porte haut ce chant du cygne bouleversant.

À la volubilité et à l'envol du soliste composant une toile aux couleurs changeantes (premier mouvement "Allegro") répond un orchestre aux perspectives ciselées par le subtil David Reiland. La cantilène élégiaque du second mouvement "Larghetto" transporte loin au delà de ce monde, grâce à la pure sensibilité du soliste, avec une délicatesse que ne peut que suivre l'orchestre.

Le troisième mouvement "Allegro rondo", ce retour sur terre confiant, brille des mille feux d'une joie retrouvée qui s'affirme dans les arpèges virtuoses de François Dumont. Il est décidément un merveilleux artiste, mozartien dans l'âme.

© Mathias Nicolas.
© Mathias Nicolas.
La deuxième partie du concert est consacrée à la Symphonie n° 36, dite "Linz", car composée dans cette ville en 1783 au cours du voyage à Vienne d'un Mozart fraîchement marié à Constance Weber. Pour remercier son hôte à Linz (ville d'étape au retour de la dernière visite à Salzbourg de sa vie), il la compose en moins de trois jours pour la faire donner dans le salon du Comte Thun. Mozart a vingt-sept ans et peut désormais montrer qu'il a dépassé le maître, Joseph Haydn, avec une maturité dans la composition vraiment stupéfiante.

Avec sa marche militaire victorieuse mettant à l'honneur l'harmonie et le basson de l'ONDIF, ses ritournelles pleines de vivacité ("Adagio, Allegro spirituoso"), ses incursions dans un registre plus grave, presque douloureux ("Andante"), les motifs dansants du "Menuetto" et le finale plein d'optimisme, la symphonie trouve ici un interprète de choix. L'orchestre, manifestement inspiré par l'élégance et l'énergie de David Reiland (un chef qu'il rencontre pour la première fois), se hisse sans effort sur les cimes mozartiennes (3).

(1) et (2) Pour plus d'informations, écouter les deux interviews ci-dessous.
(3) David Reiland, directeur musical et artistique de l'Orchestre de Chambre du Luxembourg, sera à la tête de l'Orchestre de Chambre de Paris au Théâtre des Champs-Élysées avec Sandrine Piau pour une soirée dédiée à Mozart (Symphonie n° 29), Ravel, Strauss et Berg (11 octobre 2017).

Festival des Lumières
Du 23 au 26 août 2017.
Renseignements et réservations :
Espace Gartempe.
16, boulevard du Terrier blanc, Montmorillon (86).
>> festival-des-lumieres.com

Interview de Camille Bodin, coordinatrice régionale du festival

interview_camille_bodin_23_08_2017.mp3 Interview Camille Bodin 23 08 2017.MP3  (3.78 Mo)


Interview Hadrien de Villeblanche, coordinateur général du Réseau Spedidam

interview_hadrien_de_villeblanche_23_08_2017.mp3 Interview Hadrien de Villeblanche 23 08 2017.MP3  (4.95 Mo)


Christine Ducq
Vendredi 25 Août 2017

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Concerts | Lyrique







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"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

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© Delphine Royer.
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Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
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Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
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N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

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"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

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Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

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