La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Lyrique

28/02 au 16/03/2012, Opéra national de Paris, "Pelléas et Mélisande", faisons un rêve !

À l’Opéra Bastille, actuellement, se joue une nouvelle production du chef-d’œuvre (et seul opéra) de notre compositeur discret et considérable Claude Debussy, "Pelléas et Mélisande" créé en 1902 à l’Opéra Comique. Robert Wilson à la mise en scène, Philippe Jordan à la baguette : une invitation impérieuse à redécouvrir le "drame lyrique" le plus novateur depuis Wagner. Un anti "Tristan" en somme, alors que la France musicale commémore le 150e anniversaire de la naissance du musicien.



"Pelléas et Mélisande", Salzburg, 1997 © Ruth Walz.
"Pelléas et Mélisande", Salzburg, 1997 © Ruth Walz.
Une exposition au musée de l’Orangerie jusqu’au 11 juin 2012 rappelle que les Arts visuels ont été décisifs dans le processus créatif debussyste, et la mise en scène du grand "Bob" Wilson - qui ravit ou fait grincer des dents, c’est selon (paraît-il !) - doit être à la hauteur du défi de cette histoire imaginée par M. Maeterlinck, l’écrivain symboliste bien malheureusement oublié aujourd’hui.

Le livret du poète belge épouse la trame de sa pièce, une sorte de féerie qui met en scène le prince Golaud, sa (bientôt) jeune épouse Mélisande, trouvée nue et peut-être amnésique près d’une fontaine, et le frère du prince, Pelléas. Éternel et magique triangle amoureux dont la fin sera tragique. Un rêve peut-être, échappé d’un tableau d’E. Burnes-Jones, comme l’avait admirablement traduit Peter Stein au Théâtre du Châtelet en 1992, production restée dans toutes les mémoires, sous la direction de Pierre Boulez.

La distribution de l’Opéra de Paris est plus que prometteuse : la jeune et diaphane Elena Tsallagova dans le rôle de Mélisande, le talentueux baryton Stéphane Degout interprète Pelléas - et bientôt il chantera Rameau à Garnier, logique quand on se souvient comment Claude Debussy a œuvré pour la ré-exhumation du compositeur français du XVIIIe siècle, représentant par excellence du génie français selon lui (avec Massenet, entre autres). Sans oublier notre joie à l’idée de retrouver l’excellent Franz-Josef Selig dans le rôle du roi Arkel.

Il faut donc courir écouter "Pelléas et Mélisande", avec son action continue, sa mélodie inédite, "intentionnellement ininterrompue, sans nulle trêve, car elle vise à reproduire la vie elle-même"*, le fameux parler-chanter, déclamation faite de mots et de musique, qui crée une atmosphère onirique unique. Claude Debussy ou le précurseur du Moderne. Nous reviendrons sur la production de Bastille...

* Interview de Claude Debussy parue dans le Daily Mail du 28 mai 1909.

"Pelléas et Mélisande"

"Pelléas et Mélisande" par Bob Wilson à l'Opéra Bastille © Charles Duprat/Opéra national de Paris.
"Pelléas et Mélisande" par Bob Wilson à l'Opéra Bastille © Charles Duprat/Opéra national de Paris.
Poème : Maurice Maeterlinck.
Drame lyrique en cinq actes et douze tableaux (1902).
Musique : Claude Debussy (1862 - 1918).

Direction musicale : Philippe Jordan.
Mise en scène et décors : Robert Wilson.
Co-metteur en scène : Giuseppe Frigeni.
Avec : Stéphane Degout (Pelléas), Vincent Le Texier (Golaud), Franz Josef Selig (Arkel), Julien Mathevet (le petit Yniold), Jérôme Varnier (un médecin, le berger), Elena Tsallagova (Mélisande), Anne Sofie Von Otter (Geneviève).
Collaboration aux décors : Stéphanie Engeln.
Costumes : Frida Parmeggiani.
Lumières : Robert Wilson, Heinrich Brunke.
Dramaturgie : Holm Keller.
Chef de chœur : Alessandro Di Stefano.
Orchestre et chœur de l'Opéra national de Paris.
En langue française, 3 h 15 avec un entracte.

"Pelléas et Mélisande", Paris, 1997 © Florian Kleinefenn.
"Pelléas et Mélisande", Paris, 1997 © Florian Kleinefenn.
Du 28 février au 16 mars 2012.
Opéra national de Paris, Paris 9e, 01 73 60 26 26.
>> operadeparis.fr

"Pelléas et Mélisande" fera l'objet d'une captation audiovisuelle réalisée par Philippe Béziat, produite par "Idéale Audience", avec la participation de Medici.TV et de l'Opéra national de Paris et le soutien de la Fondation Orange, pour une diffusion en direct sur les sites www.operadeparis.fr et www.medici.tv le vendredi 16 mars 2012 à 19 h 30.

Christine Ducq
Vendredi 9 Mars 2012

Nouveau commentaire :

Concerts | Lyrique







À découvrir

"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

Cela dit, personne ne nous avait dit qu'à l'Essaïon, on pouvait aussi assister à des séances de cinéma ! Car c'est pratiquement à cela que nous avons assisté lors de la générale de presse lundi 27 mars dernier tant le talent de Catherine Aymerie, la comédienne seule en scène, nous a emportés(es) et transportés(es) dans l'univers de Balzac. La force des images transmises par son jeu hors du commun nous a fait vire une heure d'une brillante intensité visuelle.

Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
C'est une grande leçon de théâtre que nous propose là la Compagnie de la Rencontre, et surtout Catherine Aymerie. Une très grande leçon !

Brigitte Corrigou
06/03/2024
Spectacle à la Une

"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
08/09/2023
Spectacle à la Une

"Deux mains, la liberté" Un huis clos intense qui nous plonge aux sources du mal

Le mal s'appelle Heinrich Himmler, chef des SS et de la Gestapo, organisateur des camps de concentration du Troisième Reich, très proche d'Hitler depuis le tout début de l'ascension de ce dernier, près de vingt ans avant la Deuxième Guerre mondiale. Himmler ressemble par son physique et sa pensée à un petit, banal, médiocre fonctionnaire.

© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

Joseph Kessel lui consacra pourtant un livre, "Les Mains du miracle", et, aujourd'hui, Antoine Nouel, l'auteur de la pièce, l'incarne dans la pièce qu'il a également mise en scène. C'est un investissement total que ce comédien a mis dans ce projet pour sortir des nimbes le visage étonnant de ce personnage de l'Histoire qui, par son action, a fait libérer près de 100 000 victimes du régime nazi. Des chiffres qui font tourner la tête, mais il est le résultat d'une volonté patiente qui, durant des années, négocia la vie contre le don.

Bruno Fougniès
15/10/2023