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Théâtre

Avignon Off 2013 : "Une liaison pornographique"... Un fantasme tout en simplicité où le naturel fait ses gammes !

"Une liaison pornographique", Théâtre Le Célimène, Avignon

[Reprise] Fantasme... discret voire bâillonné, dans un jeu d’acteurs où le naturel fait ses gammes. Un texte au propos réaliste presque baigné de quotidienneté. La pièce est écrite comme un journal intime à deux voix avec deux personnages, Elle et Lui. Une histoire où Elle passe une annonce dans un journal pour vivre un fantasme qui lui tient à cœur. Lui répond. C’est la rencontre.



© Mathias Wendzinski.
© Mathias Wendzinski.
La pièce est de très bonne tonalité. Le thème est puisé dans le quotidien. Elle met en exergue le rapport au sexe que nous pouvons entretenir avec nos désirs. La tentation, l’envie sexuelle qui se déclinent en amour sont incarnées avec justesse par les comédiens qui créent une relation teintée de gêne lors de la première rencontre, gêne avant le passage à l’acte. Cette même gêne qui, durant les rencontres suivantes, disparaît pour être remplacée par des rendez-vous empreints de chaleur, de sympathie, voire d’une pointe de familiarité.

Du fantasme proprement dit, au-delà du mot, il n’existe pas vraiment ou du moins, il n’apparaît pas comme un élément déterminant. La mise en scène a fait de cet aspect un petit pied de nez à l’auteur en l’écartant quelque peu. Sur les rares scènes dites sexuelles, le fantasme n’est pas vraiment joué sans que cela ait pu faire appel à une quelconque pratique sexuelle jouée. Nous restons dans un semi-découvert où les corps apparaissent puis disparaissent dans l’obscurité sans qu’une quelconque suggestion affleure lors des passages à l’acte.

© Mathias Wendzinski.
© Mathias Wendzinski.
Le texte est bien écrit avec des coupures dramaturgiques bien agencées. La mise en scène est simple, sans fioriture et est axée sur les relations, à la fois simple et complexe, du rapport à soi, à ses instincts, à ses pulsions et à l’autre.

Le jeu de Caroline Stefanucci est relevé. Juste et bien dosée en solo, elle arrive à faire passer les émotions avec un naturel très présent. Constantin Djirdjirian, dans le rôle de Lui, arrive à créer une relation avec Elle dans laquelle une certaine humilité voire intimité transparaît. Son jeu est lui aussi très naturel même si parfois ses solos manquent parfois un peu de "sincérité".

Dans cette relation sexuelle, les personnages incarnent un rapport au fantasme et au sexe dans laquelle le désir n’est habillé d’aucun apparat. La relation entre Elle et Lui est très bien jouée. Les rapports multiples entre eux, à la fois sexuels, amoureux, chaleureux puis fait d’une rupture brusque sont bien incarnés. L’évolution de leur relation est bien retranscrite sur scène avec un sentiment de vécu et de spontanéité de belle composition.

"Une liaison pornographique"

© Mathias Wendzinski.
© Mathias Wendzinski.
Texte : Philippe Blasband.
D'après le film de Frédéric Fonteyne.
Mise en scène : Dalia Bonnet.
Avec : Caroline Stefanucci et Constantin Djirdjirian, remplacé à Avignon par Justin Blanckaert.
Par la Compagnie Boss’Kapok.
Durée : 1 h 10.

Du 04 novembre au 27 novembre 2012.
Reprise du 3 au 26 février 2013.
Du dimanche au mardi à 20 h.
Le Funambule de Montmartre, Paris 18e, 01 42 23 88 83.
>> funambule-montmartre.com

Avignon Off 2013
Du 8 au 31 juillet 2013.
Tous les jours à 20 h 15.
Théâtre Le Célimène, Avignon, 04 90 82 96 13/06 11 37 59 67.
>> theatrelecelimene.fr

Safidine Alouache
Mercredi 14 Novembre 2012

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