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Théâtre

Une vie qui tangue entre vrai don et esbroufe, l'épopée humaine de forçats de l'espoir

"Guérisseur", Le Lucernaire, Paris

Il a un don, Frank Hardy. Il impose ses mains et le souffreteux ne ressent plus la douleur, le boiteux danse, l'aveugle voit. Il parcourt les villages du pays de Galles et de l’Écosse pour semer ses guérisons miraculeuses comme un pèlerin. Et ceux qui espèrent viennent à lui quand il passe à travers leur campagne.



© Karine Letellier.
© Karine Letellier.
Sauf que Frank est accompagné d'un impresario et d'une femme dévouée et que ses apparitions sont annoncées par un calicot en forme de réclame : "Fantastique… Guérisseur… Ce soir seulement !…" comme n'importe quel marchand d'illusions.

Le texte de Brian Friel, qui est un grand auteur irlandais de l'infini humain, tente d'éclairer la brèche qui sépare (ou relie suivant les points de vue) la foi et le charlatanisme. Les personnages de sa pièce, trois marginaux de la société anglo-saxonne, des exilés, des nomades en mal de représentations, traversent le monde rural du siècle dernier pour en extraire l'ignorance, les superstitions et finalement la violence cachée. Pourtant, rien dans ce qui est raconté sur scène ne parle de ça. Et tout ce qui est vécu ne parle que de cela.

Il y a la désillusion de la maigre réalité de l'existence, des réalités de ce monde, et il y a l'extraordinaire folie des hommes qui face à cette impasse créent des espoirs les plus improbables. Et c'est toute cette beauté, aussi pathétique que vitale, que cette histoire met au premier plan. En mettant face à face, une société grégaire, abrupte, à la fois fière et pauvre, face à un porteur d'espoir et d'illusion : le guérisseur.

"Guérisseur"

© Karine Letellier.
© Karine Letellier.
Texte : Brian Friel.
Texte français : Alain Delahaye.
Mis en scène : Benoît Lavigne.
Avec : Xavier Gallais ou Thomas Durand, Bérangère Gallot et Hervé Jouval.
Collaboration Artistique : Sophie Mayer.
Décor Et Costumes : Tim Northam.
Musiques : Michel Winogradoff.
Lumières : Denis Koransky.
Durée : 1 h 25.

Du 31 janvier au 14 avril 2018
Du mardi au samedi à 19 h.
Le Lucernaire, Paris 6e, 01 45 44 57 34.
>> lucernaire.fr

Bruno Fougniès
Lundi 12 Février 2018

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"Bienvenue Ailleurs" Faire sécession avec un monde à l'agonie pour tenter d'imaginer de nouveaux possibles

Sara a 16 ans… Une adolescente sur une planète bleue peuplée d’une humanité dont la grande majorité est sourde à entendre l’agonie annoncée, voire amorcée diront les plus lucides. Une ado sur le chemin de la prise de conscience et de la mutation, du passage du conflit générationnel… à l'écologie radicale. Aurélie Namur nous parle, dans "Bienvenue ailleurs", de rupture, de renversement, d'une jeunesse qui ne veut pas s'émanciper, mais rompre radicalement avec notre monde usé et dépassé… Le nouvel espoir d'une jeunesse inspirée ?

© PKL.
Sara a donc 16 ans lorsqu'elle découvre les images des incendies apocalyptiques qui embrasent l'Australie en 2020 (dont l'île Kangourou) qui blessent, brûlent, tuent kangourous et koalas. Images traumatiques qui vont déclencher les premiers regards critiques, les premières révoltes générées par les crimes humains sur l'environnement, sans évocation pour elle d'échelle de gravité, cela allant du rejet de solvant dans les rivières par Pimkie, de la pêche destructrice des bébés thons en passant de l'usage de terres rares (et les conséquences de leur extraction) dans les calculettes, les smartphones et bien d'autres actes criminels contre la planète et ses habitants non-humains.

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Composée de trois fragments ("Revoir les kangourous", "Dézinguée" et "Qui la connaît, cette vie qu'on mène ?") et d'un interlude** – permettant à la jeunesse de prendre corps "dansant" –, la pièce d'Aurélie Namur s'articule autour d'une trajectoire singulière, celle d'une jeune fille, quittant le foyer familial pour, petit à petit, s'orienter vers l'écologie radicale, et de son absence sur le plateau, le récit étant porté par Camila, sa mère, puis par Aimé, son amour, et, enfin, par Pauline, son amie. Venant compléter ce trio narrateur, le musicien Sergio Perera et sa narration instrumentale.

Gil Chauveau
10/12/2024
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La dernière création d'Amala Dianor nous plonge dans l'univers du Dub. Au travers de différents tableaux, le chorégraphe manie avec rythme et subtilité les multiples visages du 6ᵉ art dans lequel il bâtit un puzzle artistique où ce qui lie l'ensemble est une gestuelle en opposition de styles, à la fois virevoltante et hachée, qu'ondulante et courbe.

© Pierre Gondard.
En arrière-scène, dans une lumière un peu sombre, la scénographie laisse découvrir sept grands carrés vides disposés les uns sur les autres. Celui situé en bas et au centre dessine une entrée. L'ensemble représente ainsi une maison, grande demeure avec ses pièces vides.

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Safidin Alouache
17/12/2024
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© DR.
C'est l'injustice sociale que les auteurs et la metteure en scène Maïa Sandoz veulent mettre au premier plan des thèmes abordés. Notre époque, qui veut que les riches soient de plus en plus riches et les pauvres de plus pauvres, sert de caisse de résonance extrêmement puissante à cette intention. Rien n'étonne, en fait, lorsque la mère de Robin et de sa sœur, Christabelle, est jetée en prison pour avoir volé un peu de nourriture dans un supermarché pour nourrir ses enfants suite à la perte de son emploi et la disparition du père. Une histoire presque banale dans notre monde, mais un acte que le bon sens répugne à condamner, tandis que les lois économiques et politiques condamnent sans aucune conscience.

Le spectacle s'adresse au sens inné de la justice que portent en eux les enfants pour, en partant de cette situation aux allures tristement documentaires et réalistes, les emporter vers une fiction porteuse d'espoir, de rires et de rêves. Les enfants Robin et Christabelle échappent aux services sociaux d'aide à l'enfance pour s'introduire dans la forêt interdite et commencer une vie affranchie des règles injustes de la cité et de leur maître, quitte à risquer les foudres de la justice.

Bruno Fougniès
13/12/2024