La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Théâtre

"Protée" de Philippe Adrien, une mise en scène jubilatoire avec surprises et farces que le public attrape au vol pour son plus grand plaisir

"Protée", Théâtre La Tempête, La Cartoucherie, Paris

L’œuvre de Paul Claudel permet une liberté artistique, surtout quand elle est brillamment et intelligemment mise en scène par des metteurs en scène qui connaissent les codes du théâtre et les flouent dans la réalisation d’un travail exhibé avec magie et ingéniosité.



© Alejandro Guerrero.
© Alejandro Guerrero.
Philippe Adrien, derrière ses lunettes, ses yeux devinent des univers qu’il a envie de découvrir, d’explorer et d’adopter dans des mises en scène mêlées d’une profondeur d’esprit comme il en existe peu, côté Seine, et de l’implication des artistes, pour lesquels le cœur résonne la satisfaction de travailler aux côtés de ce génie, de ce dompteur de rêves, de ce jongleur de l’intemporel.

Intemporelles sont les mises en scène de Philippe Adrien, elles resteront à jamais gravées sur l’autel du Théâtre, un théâtre cinq étoiles... le luxe et le bonheur ! Les citer une à une, pour quoi faire ? Les habitués qui fréquentent La Tempête s’en souviennent d’aise car les spectacles d’Adrien, une fois vus, rappellent des souvenirs, lesquels se partagent et se transmettent de génération en génération. Merci Philippe.

© Alejandro Guerrero.
© Alejandro Guerrero.
"Protée" s’inscrit en caractères gras sur cette longue liste de spectacles réussis, un vain mot, magnifiés par la main de l’homme Adrien. Laquelle orchestre un bataillon d’hommes et de femmes, comédiens et techniciens, convaincus que longues seront les répétitions, mais vainqueurs atteindront-ils le territoire "Public".

Une scénographie à couper le souffle, aux éléments disposés sur et autour du plateau, se greffent des instants magiques déclenchés par les jeux de lumière innovants du fidèle Pascal Sautelet. Décors, musique, son, costumes, maquillages, une collaboration artistique articulée avec une précision horlogère. Un puzzle de créations où toutes les pièces s’emboîtent les unes aux autres avec justesse. Que dire, si ce n’est que c’est magique !

Les comédiens évoluent une heure quinze durant en s’amusant, l’ivresse est collective sur scène et dans la salle. "Protée" ouvre des appétits servis de rires et de larmes de bonheur, une pure merveille artistique et humaine.

© Alejandro Guerrero.
© Alejandro Guerrero.
Le texte de Claudel est répliqué avec des accents et des intonations jusqu’ici toujours tus. Entre les lignes, Philippe Adrien a réécrit à l’encre invisible des émotions naissantes et des inspirations puisées dans ces univers vierges de création artistique. Éléonore Joncquez emporte son texte dans un flot à contre-courant. Elle grandit la nymphe Brindosier d’une réjouissante folie. Éléonore, une nymphe amoureusement envoûtante et tellement belle dans cette interprétation. Ménélas joué par Matthieu Marie s’égare en sentiments pour Hélène de Troie, alias Marie Micla, et son double Hélène de Sparte troquée par la nymphe Brindosier. Protée incarné par Jean-Jacques Moreau, un rôle taillé sur mesure pour cet immense comédien toujours aussi étonnant.

"Protée" mis en scène par Philippe Adrien, une bouffonnerie truffée de surprises. Une adaptation du texte de Paul Claudel qui emporte le théâtre dans de nouvelles sphères, ces univers qui appartiennent à Philippe Adrien.

En un mot... Grandiose.

"Protée"

© Alejandro Guerrero.
© Alejandro Guerrero.
Texte : Paul Claudel.
Mise en scène : Philippe Adrien.
Avec : Jean-Jacques Moreau (Protée), Dominique Gras (Satyre-Major), Éléonore Joncquez (Nymphe Brindosier), Matthieu Marie (Ménélas), Marie Micla (Hélène)
Décor et costumes : Éléna Ant.
Lumières : Pascal Sautelet, assisté de Maëlle Payonne.
Musique et son : Stéphanie Gibert et "Ensemble Musiverre" Jean-Claude Chapuis
Vidéo : Olivier Roset, assisté de Michaël Bennoun.
Maquillages : Sophie Niesseron
Collaboration costumes : Léa Delmas.
Collaboration artistique : Clément Poirée.
Direction technique : Erwan Creff et Martine Belloc.
Durée 1 h 15.

Du 13 mars au 13 avril 2014.
Du mardi au samedi à 20 h, dimanche à 16 h.
Théâtre de la Tempête, Salle Serreau, Cartoucherie de Vincennes, Paris 12e, 01 43 28 36 36.
>> la-tempete.fr

Philippe Delhumeau
Mardi 18 Mars 2014


1.Posté par chaffanel anne le 10/03/2020 18:44
En mer, certaines escales sont parfois carrement sur réalistes !
Protée en est une. Un deferlement bling-bling est de mise et se dechaîne.
Briant !
Trop rare !

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022


Brèves & Com








À découvrir

"Salle des Fêtes" Des territoires aux terroirs, Baptiste Amann arpente la nature humaine

Après le choc de sa trilogie "Des Territoires", dont les trois volets furent présentés en un seul bloc de sept heures à Avignon lors du Festival In de 2021, le metteur en scène se tourne vers un autre habitat. Abandonnant le pavillon de banlieue où vivait la fratrie de ses créations précédentes, il dirige sa recherche d'humanités dans une salle des fêtes, lieu protéiforme où se retrouvent les habitants d'un village. Toujours convaincu que seul ce qui fait communauté peut servir de viatique à la traversée de l'existence.

© Pierre Planchenault.
Si, dans "La vie mode d'emploi", Georges Perec avait imaginé l'existence des habitants d'un bâtiment haussmannien dont il aurait retiré la façade à un instant T, Baptiste Amann nous immerge dans la réalité auto-fictionnelle d'une communauté villageoise réunie à l'occasion de quatre événements rythmant les quatre saisons d'une année. Au fil de ces rendez-vous, ce sont les aspirations de chacun qui se confrontent à la réalité - la leur et celle des autres - révélant, au sens argentique d'une pellicule que l'on développe, des aspérités insoupçonnées.

Tout commence à l'automne avec l'exaltation d'un couple de jeunes femmes s'établissant à la campagne. Avec le montant de la vente de l'appartement parisien de l'une d'elles, écrivaine - appartement acquis grâce au roman relatant la maladie psychiatrique du frère qui les accompagne dans leur transhumance rurale -, elles viennent de s'installer dans une usine désaffectée flanquée de ses anciennes écluses toujours en service. Organisée par le jeune maire survient la réunion du conseil consultatif concernant la loi engagement et proximité, l'occasion de faire connaissance avec leur nouvelle communauté.

Yves Kafka
17/10/2022
Spectacle à la Une

"Qui a cru Kenneth Arnold ?" Une histoire à dormir… éveillé

Levant la tête vers le ciel, qui pourrait soutenir encore que le monde s'organise autour de la Terre centrale et immobile… depuis que Copernic et Galilée ont renversé magistralement la hiérarchie du système solaire, rejetant notre planète Terre - actrice décatie et déchue - au rang d'accessoire de l'étoile Soleil ? De même qui, de nos jours, pourrait être assez obtus pour affirmer que d'autres formes d'intelligences ne puissent exister dans l'univers… depuis que le GEIPAN (Groupe d'Études et d'Informations sur les Phénomènes Aérospatiaux Non-identifiés) a été scientifiquement créé pour démêler le vrai des infox entourant ces phénomènes ? Le collectif OS'O, la tête dans les étoiles (cf. "X", sa précédente création), s'empare de ce sujet ultrasensible pour apporter sa contribution… "hautement" artistique.

© Frédéric Desmesure.
Dans l'écrin du Studio de création du TnBA, une table avec, pour arrière-plan, un écran tendu plantent le décor de cette vraie fausse conférence sur les P.A.N. Mobilisant les ressources de la haute technologie - bricolée frénétiquement - un (vrai) acteur (faux) conférencier de haut vol, assisté d'une (vraie) actrice (fausse) scientifique coincée dans ses notes, et accompagné d'un (vrai) acteur complice, (faux) journaliste critique, incrusté dans les rangs du public, le maître ufologue va compiler les témoignages venus d'ici et d'ailleurs.

Sur le ton amusé des confidences, le conférencier introduit la session en livrant son étrange vision d'une nuit d'été où, à l'aube de ses quinze ans, à 23 h 23 précises, il fut témoin d'une apparition fulgurante alors qu'il promenait son chien sur une plage… Et, encore plus étranges, les deux heures qui suivirent et leur absence de souvenirs, comme s'il avait été "ravi à lui-même", enlevé par les passagers des soucoupes orange…

Suivent d'autres témoignages reposant eux sur des archives projetées. Ainsi, dans l'état du New Hampshire, du couple Betty et Barney Hill, témoignant "en gros plan" avoir été enlevé par des extraterrestres dans la nuit du 19 au 20 septembre 1961. Ainsi, au sud du Pérou, des géoglyphes de Nazca, photographies à l'appui montrant un système complexe de lignes géométriques seulement visibles du ciel… et ne pouvant avoir été tracées que par des extraterrestres…

Yves Kafka
09/02/2023
Spectacle à la Une

Dans "Nos jardins Histoire(s) de France #2", la parole elle aussi pousse, bourgeonne et donne des fruits

"Nos Jardins", ce sont les jardins ouvriers, ces petits lopins de terre que certaines communes ont commencé à mettre à disposition des administrés à la fin du XIXe siècle. Le but était de fournir ainsi aux concitoyens les plus pauvres un petit bout de terre où cultiver légumes, tubercules et fruits de manière à soulager les finances de ces ménages, mais aussi de profiter des joies de la nature. "Nos Jardins", ce sont également les jardins d'agrément que les nobles, les rois puis les bourgeois firent construire autour de leurs châteaux par des jardiniers dont certains, comme André Le Nôtre, devinrent extrêmement réputés. Ce spectacle englobe ces deux visions de la terre pour développer un débat militant, social et historique.

Photo de répétition © Cie du Double.
L'argument de la pièce raconte la prochaine destruction d'un jardin ouvrier pour implanter à sa place un centre commercial. On est ici en prise directe avec l'actualité. Il y a un an, la destruction d'une partie des jardins ouvriers d'Aubervilliers pour construire des infrastructures accueillant les JO 2024 avait soulevé la colère d'une partie des habitants et l'action de défenseurs des jardins. Le jugement de relaxe de ces derniers ne date que de quelques semaines. Un sujet brûlant donc, à l'heure où chaque mètre carré de béton à la surface du globe le prive d'une goutte de vie.

Trois personnages sont impliqués dans cette tragédie sociale : deux lycéennes et un lycéen. Les deux premières forment le noyau dur de cette résistance à la destruction, le dernier est tout dévoué au modernisme, féru de mode et sans doute de fast-food, il se moque bien des légumes qui poussent sans aucune beauté à ses yeux. L'auteur Amine Adjina met ainsi en place les germes d'un débat qui va opposer les deux camps.

Bruno Fougniès
23/12/2022