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Concerts

Pépites et futures étoiles au Festival de Pâques de Deauville

À écouter : Entretien avec Clément Mao-Takacs.

Soirée d'ouverture fastueuse au festival de musique de chambre de Deauville, la manifestation dédiée aux grands artistes de demain. Le jeune chef Clément Mao-Takacs à la tête de L'Atelier de Musique a fait forte impression samedi dernier dans un programme ambitieux cent pour cent allemand. Rencontre avec l'étoile montante de la direction d'orchestre française.



Clément Mao takacs et Irina de Baghy © Claude Doaré.
Clément Mao takacs et Irina de Baghy © Claude Doaré.
Pour cette XIXe édition, Yves Petit de Voize, le directeur artistique et fondateur du Festival de Pâques de Deauville, a une fois de plus invité la fine fleur des artistes de l'avenir. Une première soirée impressionnante a comblé les fidèles du festival comme les touristes friands d'expériences par son programme et par les interprètes tous excellents. Ouvrant le concert avec la Passacaille opus 1 d'Anton Webern et les Wesendonck-Lieder de Richard Wagner - chantés par l'émouvante mezzo canadienne Irina de Baghi - L'Atelier de Musique (formé du Secession Orchestra et de jeunes solistes déjà reconnus) s'impose sans coup férir après les quelques mises au point d'usage (particulièrement au début de "Der Engel" premier lied des cinq poèmes de Mathilde Wesendonck mis en musique par le compositeur allemand).

Mais c'est avec la Symphonie n°1 "Titan" de Gustav Mahler que la formation emmenée par Clément Mao-Takacs a marqué les esprits et suscité l'approbation des critiques. Dans une version pour ensemble de chambre transcrite par Klaus Simon en 2008 pour une quarantaine de musiciens (au lieu des cent vingt habituels) dont un accordéoniste et un pianiste, la symphonie monstre (longue de 55 minutes et quatre mouvements) n'a rien perdu de son éclatante dramaturgie avec ses riches couleurs entre lyrisme romantique et ironie souriante. Cette version de chambre dirigée de main de maître par Clément Mao-Takacs a de surcroît mis en lumière toutes les nuances d'une partition complexe sans sacrifier à sa grandeur et, ce, malgré l'effectif réduit : des bois presque seuls rejoints par une paire de clarinettes, deux cors, une trompette, un harmonium, les cordes.

Clément Mao takacs © Claude Doaré.
Clément Mao takacs © Claude Doaré.
J'ai donc voulu rencontrer ce jeune maestro dont la maîtrise étonne - mais la valeur n'attend pas le nombre des années a-t-on appris avec Corneille. Son nom (Mao-Takacs) rappelle sa double origine bretonne et hongroise. Ce pianiste passionné et érudit (il est diplômé de littérature comparée et prépare deux doctorats), fondateur en 2011 du Secession Orchestra, se situe quelque part entre "La Cathédrale Engloutie* et le Pavillon Sécession Mitteleuropa" - selon ses propres mots et son humour coutumier. Lauréat en 2008 du Festival de Bayreuth, il a bien voulu revenir pour nous avec passion et simplicité sur son parcours et ses projets.

Note : *Prélude de Claude Debussy.

Du 18 avril au 4 mai 2015.
Festival de Pâques de Deauville, 02 31 14 14 14.
Musique vocale et ensembles de chambre.
billetterie@congres-deauville.com
>> musiqueadeauville.com

Salle Elie de Brignac (salle des ventes des Yearling).
32 rue Hocquart de Turtot, Deauville (14).

Entretien réalisé le 21 avril 2015 par Christine Ducq pour La Revue du Spectacle.
entretien_avec_clement_mao_takacs.mp3 Entretien avec Clément Mao-Takacs.MP3  (12.42 Mo)


Christine Ducq
Mercredi 22 Avril 2015

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Concerts | Lyrique







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© Delphine Royer.
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Isabelle Lauriou
15/05/2025
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Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
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N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
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"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

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