Placés au rang de spectateurs, on se replonge dans l'atmosphère des concerts d'antan où la voix de l'artiste venait nous saisir, nous enveloppant de sa sensualité à fleur de peau. L'actrice n'imite pas Barbara et c'est là sa force. Sa fragilité déterminée ne la fait pas disparaître derrière l'icône, elle "est" la femme en-chanteuse en proie aux élans qui la traversent. Et le plaisir indicible de côtoyer cette voix est redoublé par celui plus intime de se sentir invité dans sa loge, partageant les doutes, émois, bonheurs et colères de la chanteuse de minuit.
Comme dans un kaléidoscope, les fragments, de ses scènes, de ses tournées et de ses tourments enfouis pointant sous l'écriture sensible de ses envolées chantées, vont voltiger "en tous sens" pour recomposer l'image pixelisée d'une vie, la sienne. Tableau impressionniste d'une existence maintenue sans cesse en mouvement pour garder l'équilibre, si fragile…
En maître de cérémonie, débonnaire et investi, l'acteur n'aura de cesse d'offrir à sa complice les cadres entourant les "photos en pied" de la femme tout à la fois espiègle et tragique, amante passionnée, incroyablement vivante jusqu'en ses blessures enfouies, faisant corps avec le micro dont elle s'emparera comme un viatique pour susurrer ou crier le plaisir et la rage d'exister. Reprendront vie devant nous les lieux chargés de son histoire jalonnée par quarante années de chansons, une vie entière marquée par des traversées buissonnières.
Comme dans un kaléidoscope, les fragments, de ses scènes, de ses tournées et de ses tourments enfouis pointant sous l'écriture sensible de ses envolées chantées, vont voltiger "en tous sens" pour recomposer l'image pixelisée d'une vie, la sienne. Tableau impressionniste d'une existence maintenue sans cesse en mouvement pour garder l'équilibre, si fragile…
En maître de cérémonie, débonnaire et investi, l'acteur n'aura de cesse d'offrir à sa complice les cadres entourant les "photos en pied" de la femme tout à la fois espiègle et tragique, amante passionnée, incroyablement vivante jusqu'en ses blessures enfouies, faisant corps avec le micro dont elle s'emparera comme un viatique pour susurrer ou crier le plaisir et la rage d'exister. Reprendront vie devant nous les lieux chargés de son histoire jalonnée par quarante années de chansons, une vie entière marquée par des traversées buissonnières.
D'abord l'enfance, insouciante malgré la pauvreté, avec en toile de fond la menace constante des huissiers contraignant la famille à changer constamment d'appartement, de ville, pour leur échapper… Et puis l'année 1939 où surgit une menace "impensable" pour une petite fille juive, n'empêchant pas pour autant la fillette de neuf ans de transformer les trains de la fuite en terrains de jeux... Traversées des années sombres, de valise en valise, et avec déjà la musique pour bouée… L'opération de la main droite ruinera son rêve de devenir pianiste… Là, déjà, sa volonté trempée pour s'opposer à l'adversité : elle réclamera un piano à son père qui le lui offrira malgré l'argent qui manque, aurait-il à se faire pardonner ?
Viennent les premières scènes pour celle qui à dix-huit ans rêve de chanter Piaf… Le Théâtre de Mogador où elle est admise, comme mannequin choriste, après que l'on lui eut demandé de montrer ses jambes, interrompant le mouvement de trois notes chantées de Beethoven… Les problèmes conjugaux des parents, un père volage se volatilisant… Le piano sacrifié et la fuite à Bruxelles… Pour subsister, survivre au manque, à la faim, à la solitude, la tentation de la prostitution… La solitude, trouée par le dur désir de chanter… Charleroi, La Mansarde, elle y chante Prévert, Piaf, le public lance des projectiles à cette débutante maladroite… Qu'importe… L'Écluse, quai des Grands-Augustins… Bruxelles à nouveau, Cabaret du Cheval Blanc et Brel chanté, "Sur la place, une fille s'est mise à danser… ». L'Écluse, cette fois-ci pour durer, elle y devient la vedette de minuit… Et puis, un soir de décembre 59, le téléphone qui vibre, Nantes, 25 rue de la Grange aux loups, ce père qu'elle n'avait pas revu depuis dix ans…
Viennent les premières scènes pour celle qui à dix-huit ans rêve de chanter Piaf… Le Théâtre de Mogador où elle est admise, comme mannequin choriste, après que l'on lui eut demandé de montrer ses jambes, interrompant le mouvement de trois notes chantées de Beethoven… Les problèmes conjugaux des parents, un père volage se volatilisant… Le piano sacrifié et la fuite à Bruxelles… Pour subsister, survivre au manque, à la faim, à la solitude, la tentation de la prostitution… La solitude, trouée par le dur désir de chanter… Charleroi, La Mansarde, elle y chante Prévert, Piaf, le public lance des projectiles à cette débutante maladroite… Qu'importe… L'Écluse, quai des Grands-Augustins… Bruxelles à nouveau, Cabaret du Cheval Blanc et Brel chanté, "Sur la place, une fille s'est mise à danser… ». L'Écluse, cette fois-ci pour durer, elle y devient la vedette de minuit… Et puis, un soir de décembre 59, le téléphone qui vibre, Nantes, 25 rue de la Grange aux loups, ce père qu'elle n'avait pas revu depuis dix ans…
Ses amours, sa passion dévorante pour ce diplomate, la rupture imposée par la distance, une chanson pour dire le trouble et la voix envoûtante à faire vaciller, "Dis, quand reviendras-tu ? Voilà combien de nuits, voilà combien de jours…" … Écrire pour chanter avec ses drames intimes… Théâtre des Capucines, pour la première fois ce soir de novembre 63, devant sa mère venue la voir, elle chante "Nantes" sur les cendres apaisées de l'amour blessé… Il y aura encore Bobino 64, 65, 67 où, à la surprise générale, elle annonce un soir au public médusé qu'elle tire sa révérence, "Je suis venue pour vous dire, Ma plus belle histoire d'amour c'est vous…".
Mais comment cette chanteuse compulsive, cette nomade dans l'âme, pourrait-elle se couper de ce qui la fait vivre ? Elle repartira en tournée, dans sa "roulotte de luxe" ; au bout du mal de vivre s'entrevoit la lumière des scènes et la chaleur du public sans qui elle n'est rien… Le piano de Göttingen, la ville allemande accouchant de la chanson de la réconciliation et non de l'oubli… Olympia 69, et là encore fausse sortie… Ne remonter sur scène que par désir… Un brouillon sommeillant dans un tiroir, l'oiseau prend son envol et devient un tube des années soixante-dix, "L'Aigle noir", troublant souvenir surgi des arcanes de l'enfance dont personne ne soupçonne l'envergure… Mais le succès, c'est grave comme un chagrin… Besoin intense de solitude pour préserver l'insoutenable légèreté des choses… "La solitude, je l'ai trouvée devant ma porte un soir, que je rentrais chez moi" résonne jusqu'à nous…
Précy-sur-Marne, un havre de verdure, où la nomade, épuisée, pose ses valises en 1973… Quelques pilules de trop, elle échappe au sommeil éternel… Et puis la boulimique insatiable, goûtera à nouveau au plaisir à nul autre pareil de la scène… Bobino 75, Olympia 78 et le Chapiteau de Pantin, ce lieu populaire proche des boulevards d'Aubervilliers donne à entendre, la voix brisée, l'une de ses poignantes chansons hommages, "Pantin"… Il y aura encore Châtelet 87, de l'autre côté de L'Écluse, trente ans après… Mogador 90 et la reprise de "Septembre" (1965), "Jamais la fin d'été m'avait paru si belle, Il faut se quitter pourtant on s'aimait bien"… Mogador 93, interrompue par une méchante pneumonie… Mais celle qui sa vie durant n'a cessé de courir de la lumière à la nuit, remontera encore en scène, pour un dernier concert en mars 1994…
Avant que le rideau ne tombe, évoquer la place essentielle réservée aux combats humanistes de Barbara. Sa présence discrète, loin des caméras, aux côtés des démunis et exclus de tous genres, malades du Sida, prisonniers des Baumettes, elle la blessée à vie, affaiblie par les tranquillisants et des poumons défaillants, se fera consolatrice en leur tenant la main, en leur offrant une écoute inouïe.
Et lorsqu'un gros plan se fera sur l'édition du journal "Libération" datée du 24 novembre 1997 placée sur un pupitre en bord de scène, que les interprètes jetteront pudiquement quelques discrets pétales de rose sur le piano noir, on entendra résonner longtemps en nous "Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous"… Un très beau moment, subtil et sensible, vécu en compagnie de cette très grande dame de la chanson française.
◙ Yves Kafka
Vu le jeudi 10 juillet au Théâtre de La Chapelle des Italiens, création 2025.
Mais comment cette chanteuse compulsive, cette nomade dans l'âme, pourrait-elle se couper de ce qui la fait vivre ? Elle repartira en tournée, dans sa "roulotte de luxe" ; au bout du mal de vivre s'entrevoit la lumière des scènes et la chaleur du public sans qui elle n'est rien… Le piano de Göttingen, la ville allemande accouchant de la chanson de la réconciliation et non de l'oubli… Olympia 69, et là encore fausse sortie… Ne remonter sur scène que par désir… Un brouillon sommeillant dans un tiroir, l'oiseau prend son envol et devient un tube des années soixante-dix, "L'Aigle noir", troublant souvenir surgi des arcanes de l'enfance dont personne ne soupçonne l'envergure… Mais le succès, c'est grave comme un chagrin… Besoin intense de solitude pour préserver l'insoutenable légèreté des choses… "La solitude, je l'ai trouvée devant ma porte un soir, que je rentrais chez moi" résonne jusqu'à nous…
Précy-sur-Marne, un havre de verdure, où la nomade, épuisée, pose ses valises en 1973… Quelques pilules de trop, elle échappe au sommeil éternel… Et puis la boulimique insatiable, goûtera à nouveau au plaisir à nul autre pareil de la scène… Bobino 75, Olympia 78 et le Chapiteau de Pantin, ce lieu populaire proche des boulevards d'Aubervilliers donne à entendre, la voix brisée, l'une de ses poignantes chansons hommages, "Pantin"… Il y aura encore Châtelet 87, de l'autre côté de L'Écluse, trente ans après… Mogador 90 et la reprise de "Septembre" (1965), "Jamais la fin d'été m'avait paru si belle, Il faut se quitter pourtant on s'aimait bien"… Mogador 93, interrompue par une méchante pneumonie… Mais celle qui sa vie durant n'a cessé de courir de la lumière à la nuit, remontera encore en scène, pour un dernier concert en mars 1994…
Avant que le rideau ne tombe, évoquer la place essentielle réservée aux combats humanistes de Barbara. Sa présence discrète, loin des caméras, aux côtés des démunis et exclus de tous genres, malades du Sida, prisonniers des Baumettes, elle la blessée à vie, affaiblie par les tranquillisants et des poumons défaillants, se fera consolatrice en leur tenant la main, en leur offrant une écoute inouïe.
Et lorsqu'un gros plan se fera sur l'édition du journal "Libération" datée du 24 novembre 1997 placée sur un pupitre en bord de scène, que les interprètes jetteront pudiquement quelques discrets pétales de rose sur le piano noir, on entendra résonner longtemps en nous "Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous"… Un très beau moment, subtil et sensible, vécu en compagnie de cette très grande dame de la chanson française.
◙ Yves Kafka
Vu le jeudi 10 juillet au Théâtre de La Chapelle des Italiens, création 2025.
"Barbara de théâtre en théâtre…"
Mise en scène : Philippe Mangenot.
Conception et jeu : Rafaèle Huou, Philippe Mangenot.
Lumière : Mireille Dutrievoz.
Scénographie : Philippe Mangenot.
Musique : Tom Georgel.
Piano : Tom Georgel ou Sébastien Jaudon.
Son, vidéo et régie générale : Éric Dutrievoz.
Costumes : Rafaèle Huou.
Par la Cie Théâtres de l'Entre-Deux.
Durée : 1 h 30.
•Avignon Off 2025•
Du 5 au 26 juillet 2025.
Tous les jours à 20 h 30. Relâche le mardi.
Théâtre La Chapelle des Italiens, 33, rue Paul Saïn, Avignon.
Réservation : 09 52 42 66 72/06 14 59 24 69.
>> Billetterie en ligne
>> echodusoleil.fr
Tournée
18 septembre 25 : Festival Les Murmures du vent, Saint-Brévin-les-Pins (44).
11 octobre 25 : Espaces Monts d'Or, Champagne-au-Mont d'Or (69).
14 et 15 octobre 25 : Théâtre de la Renaissance, Oullins (69).
16 et 17 octobre 25 : Théâtre du Parc, Andrézieux-Bouthéon (42).
17 et 18 novembre 25 : Atrium, Tassin-la-Demi-Lune (69).
31 janvier 26 : Espace Barbara, Bonson (42).
6 mars 26 : Briscope, Brignais (69).
13 mars 26 : Théâtre de Tarare, Tarare (69).
Conception et jeu : Rafaèle Huou, Philippe Mangenot.
Lumière : Mireille Dutrievoz.
Scénographie : Philippe Mangenot.
Musique : Tom Georgel.
Piano : Tom Georgel ou Sébastien Jaudon.
Son, vidéo et régie générale : Éric Dutrievoz.
Costumes : Rafaèle Huou.
Par la Cie Théâtres de l'Entre-Deux.
Durée : 1 h 30.
•Avignon Off 2025•
Du 5 au 26 juillet 2025.
Tous les jours à 20 h 30. Relâche le mardi.
Théâtre La Chapelle des Italiens, 33, rue Paul Saïn, Avignon.
Réservation : 09 52 42 66 72/06 14 59 24 69.
>> Billetterie en ligne
>> echodusoleil.fr
Tournée
18 septembre 25 : Festival Les Murmures du vent, Saint-Brévin-les-Pins (44).
11 octobre 25 : Espaces Monts d'Or, Champagne-au-Mont d'Or (69).
14 et 15 octobre 25 : Théâtre de la Renaissance, Oullins (69).
16 et 17 octobre 25 : Théâtre du Parc, Andrézieux-Bouthéon (42).
17 et 18 novembre 25 : Atrium, Tassin-la-Demi-Lune (69).
31 janvier 26 : Espace Barbara, Bonson (42).
6 mars 26 : Briscope, Brignais (69).
13 mars 26 : Théâtre de Tarare, Tarare (69).