La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Théâtre

"Le Muguet de Noël" Ça fleure bon l'intrigue familiale et l'amitié qui fane... pour une joyeuse réconciliation en bouquet final !

Quand le théâtre prend des allures de divertissement comique, il peut se nommer "Le Muguet de Noël" et rassembler une belle brochette de trois comédiens et une comédienne mis en scène par le talentueux et compétent Jean-Luc Moreau qui fait preuve, depuis plus de quarante ans, d'un savoir-faire exceptionnel. De celui apte à dérider nos zygomatiques grâce à la dynamisation de comédies plus ou moins bien écrites. "Le Muguet de Noël" est une exception qui, du coup, régale un public ayant décroché du petit écran… et ne regrettant pas son aventureuse exploration d'une salle de théâtre !



© J. Stey.
© J. Stey.
Jeunes auteurs s'étant taillé une récente notoriété avec "Deux mensonges et une vérité" (en 2018 au Théâtre Rive Gauche), Sébastien Blanc et Nicolas Poiret* ne se sont pas endormis sur ces lauriers prometteurs et décidèrent de s'allier à nouveau la complicité de Jean-Luc Moreau (toujours à la mise en scène), Lionnel Astier et Frédéric Bouraly - qui avaient contribué de manière assez conséquente à la réussite de la pièce précédemment citée - pour cette nouvelle comédie qui sait faire rire… mais pas que ! Voilà appliquée à la lettre la devise "on ne change une équipe qui gagne".

Basée sur les difficultés relationnelles entre un père possessif, voire intrusif, et sa fille majeure, donc éprise d'une légitime indépendance, d'un côté, et les discordes pouvant naître sur le chemin d'une amitié semblant jusqu'alors inoxydable entre deux potos mais remise en question lorsque le premier (le padre) voit poindre une future précarité de l'emploi et le second la perspective alléchante d'un bon poste à venir… mais cette ascension sociale étant possible uniquement par éjection du premier de la fonction en question.

Usant d'une écriture ciselé et fluide, nos deux auteurs font montre de beaucoup de talent ayant une incroyable intelligence de la musicalité des effets comiques et de l'efficacité de duos bien choisis, joueurs et complices (père et fille, père et ami, fille et fiancé). Les répliques tombent en cascade, riche de jets percutants et nerveux, utilisant un phrasé vif, moderne, tendant à renouveler le genre de la comédie.

© J. Stey.
© J. Stey.
Portée par un évident plaisir de jouer et une joyeuse connivence, les deux comédiens susnommés, auxquels se joignent, avec un enthousiasme visible sur le plateau, Alexie Ribes et Jean-Luc Porraz (qu'on ne présente plus non plus), la pièce trouve rapidement son allure de croisière, pleine de vivacité, empreinte d'un rythme diablement soutenue qui ravit le public, goûtant sans rechigner les joutes verbales et les situations s'inspirant parfois d'une actualité sociale bien réelle.

Ce dernier aspect permet de constater que nos quatre artistes savent parfaitement gérer aussi les quelques tensions dramatiques inscrites dans l'histoire, nichées dans la relation père fille, au moment de l'aveu de vengeance de celle-ci et dans la confrontation entre les deux amis dans la quête compétitive d'un emploi mirobolant qui ne leur sera jamais destiné, mais eux ne le seront qu'au terme de cette mise à l'épreuve de leur amitié.

Au final, "Le Muguet de Noël" réussit totalement son contrat en étant à la fois une comédie qui renouvelle la recette du duo de choc (porté au zénith par Louis de Funès et Bourvil) avec Lionnel Astier et Frédéric Bouraly et un texte plutôt bien écrit faisant appel à des dialogues bien ciselés, tombant rarement dans la facilité.

* Nicolas Poiret (fils de Jean Poiret et Caroline Cellier) et Sébastien Blanc écrivent ensemble pour le web, la télé et le théâtre depuis plus de quinze ans. "Le Muguet de Noël" est leur troisième pièce de théâtre jouée.

"Le Muguet de Noël"

© J. Stey.
© J. Stey.
Texte : Sébastien Blanc et Nicolas Poiret.
Mise en scène : Jean-Luc Moreau.
Assistante à la mise en scène : Nell Darmouni.
Avec : Lionnel Astier, Frédéric Bouraly, Jean-Luc Porraz et Alexie Ribes.
Musique : Sylvain Meyniac.
Lumières : Jacques Rouveyrollis, assisté de Jessica Duclos.
Décor : Catherine Bluwal, assistée de Julie Wassef.
Costumes : Cécile Dulac.

Du 30 janvier au 30 mai 2020.
Du mardi au samedi à 20 h 30, matinée le samedi à 17 h, dimanche à 15 h 30.
Théâtre Montparnasse, Paris 14e, 01 43 22 77 74.
>> theatremontparnasse.com

Gil Chauveau
Vendredi 21 Février 2020

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter




Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024