La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Trib'Une

"La petite soldate"

La chronique d'Isa-belle L

Armée d'élégance, de poésie et de tendresse, la metteur en scène - Anne Hérold – propose, au Théo Théâtre, une petite perle sertie d'or et d'argent. Perle pour petits et grands qu'il ne faut absolument pas mélanger à certains bijoux plastiques ou artificiels très exposés médiatiquement.



© DR.
© DR.
"Ma grand-mère est une rose d'un rose qui n'existe pas… Mes plus lointains souvenirs remontent jusque dans ses bras…" Mickey 3 D.
En avant-poste, sur la scène, une petite fille de 8 ans est incarnée admirablement par une plus grande enfant, qui a peut-être 20 ou 25 ans, Marguerite Courcier… peu importe, son visage espiègle et touchant met en lumière un regard ultra pétillant. Pétillante, elle l'est, cette petite "Ami", le personnage que la comédienne défend.

Pas de champ de bataille sur le plateau malgré son étroitesse, quant à la jeune comédienne, elle a troqué le treillis pour une salopette en jean. Elle est accompagnée par un musicien - Hugo Proy - qui, parfois, donne la note, et rythme le débit de cette jeune combattante.
"Ami", cette petite gamine, ne veut pas être hôtesse de l'air, ni institutrice ou infirmière, mais se rêve en soldate. Pour sauver sa grand-mère.

Soldate ? Tiens, c'est marrant ça ! Évidemment ! Une gamine, qui se rêve en femme de terrain explosant au passage les frontières du ménage et du repassage, qui plus est en tenue de combat, se heurte aux idées reçues. Mais elle n'en démord pas. Pas le choix, c'est son karma.

© DR.
© DR.
Elle s'accroche, et finit même par convaincre les plus butés en bombardant arguments et mots bien placés. Touché ! Et coulés les clichés, elle remporte la première bataille. Plus le temps de rigoler.

Escadron à former. Elle tient bon la petite et compose son armée à l'aide de petites poupées. Aucun poste ne passe à l'as, chacun des camarades se motive et notre commandante "Ami" n'a qu'une mission : sauver sa mamie.

La sauver ? De quoi ? On ne sait pas trop mais est-ce important finalement ? Non. On imagine bien que la vie l'a abîmée, qu'elle a vieilli, ou que, peut-être, aussi, la maladie l'a attrapée comme ça, un jour, et qu'elle n'a plus jamais réussi à se lever. Sa mamie.
La mamie d'Ami. Qui pourrait être la "Omi" d'un petit garçon en Allemagne, "Safta" en hébreu, "Babouchka" en Russe, "Nonna" en Italie puis "Buni" en Roumanie.

Dans chaque grand enfant, il y a le petit. En chacun de nous, il y a ou il y a eu une "mamie", qui nous a gardés, surveillés, fait la leçon, amenés au parc, en vacances, à l'école. Une "Buni" qui nous a aidés à faire notre premier gâteau ou à faire les devoirs. Une "Nonna" qui criait parfois ou qui nous consolait d'un petit chagrin. Une mamie qu'on n'oublie pas. Et tellement plus parfois…

© DR.
© DR.
Là, c'est le cas. "Ami" a un papa et a eu une maman aussi. Mais, très brièvement, on s'aperçoit que tout son univers, c'est la grand-mère. Alors la sauver… apparaît bien plus que nécessaire à ce petit bout de caractère, à cette fillette, amusante militaire.

Elle se défend bien la gamine et sait parfaitement utiliser son humour comme arme de combat. On rit, souvent, parce qu'ils sont marrants les mots que lancent spontanément les enfants, sans barrière, sans chichi et avec infinie tendresse, le plus souvent.

"Ami" est une petite fille blessée, un petit oiseau fragilisé et la beauté de ce spectacle (de l'écriture à la mise en scène) est de démontrer à quel point l'enfant regorge d'inventivité pour apaiser son âme, sans déni, sans larme mais avec une arme imbattable : l'amour.

"Ami" porte à sa grand-mère un amour considérable et cette immense affection est sa plus grosse munition. Bien que la mission soit compliquée et que l'armée puisse paraître un peu trop légère pour sauver sa grand-mère, cette "petite soldate" est un canon que j'embrasse avec toute mon admiration, sur le front.

"La petite soldate"

© DR.
© DR.
Texte : Mihaela Michalov.
Traduction : Alexandra Lazarescou.
Mise en scène : Anne Hérold.
Avec : Marguerite Courcier, Hugo Proy (clarinette).
Compagnie Alouette Productions.
Durée : 1 h 10.

Du 14 octobre au 23 décembre 2017.
Samedi à 19 h 30.
Théo Théâtre, Paris 15e, 01 45 54 00 16
>> theotheatre.com

Isabelle Lauriou
Mardi 5 Décembre 2017

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter




Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024