La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
CédéDévédé

Jean My Truong... The Blue Light

Le temps a passé depuis les mythiques groupes de jazz-rock Zao (de Faton Cahen et Jeff Seffer) et l'éphémère Surya (des frères Lockwood) auxquels participa Jean My Truong entre 1971 et 1978. Mais il garda, sans aucun doute, de ces expériences, un goût prononcé pour la diversité musicale qui le conduira à jouer aussi bien avec les plus grands noms du jazz qu'à accompagner des artistes plus "variétés". Tout cela sans oublier la création de ses propres formations dont le quintet qui est la fondation de ce nouvel album intitulé "The Blue Light"...



Leandro Aconcha (piano et claviers), Sylvain Gontard (trompette), Jean My Truong (batterie), Irving Acao (saxophones), Pascal Sarton (basses) © La Seine TV.
Leandro Aconcha (piano et claviers), Sylvain Gontard (trompette), Jean My Truong (batterie), Irving Acao (saxophones), Pascal Sarton (basses) © La Seine TV.
Débuts jazz-rock donc marqués par la rencontre avec le violoniste Didier Lockwood, invité exceptionnel sur cet opus, qui lui permet de se produire sur les plus grandes scènes. Il découvre alors le monde des musiciens de jazz et accompagne, entre autres, les pianistes Joachim Kühn, Jacky Byard, Mal Waldron mais aussi, le talent aidant, Michel Portal, Bernard Lubat, la chanteuse pianiste brésilienne Tania Maria, les guitaristes Mike Stern, Ninine Garcia, Christian Escoudé, ou encore Stéphane Guillaume, Pierre de Bethmann… Côté variété et chanson, son éclectisme musical l’amène à jouer également avec Indochine, Alain Bashung, Khaled, Sting, etc.

Fort de son indéniable expérience de la scène et du studio, il revient aujourd'hui, avec ce nouvel album, à ses premiers amours en se réappropriant les classiques d’un des plus grands jazzmen : Miles Davis. Le quintet originel (Jean My Truong, Leandro Aconcha, Sylvain Gontard, Irving Acao et Pascal Sarton) aidé de deux guests prestigieux, Didier Lockwood et Mike Stern, nous invite ainsi à redécouvrir avec joie, la fantastique discographie de ce grand nom de la musique, constamment inspiré par une vitalité inventive débordante. Empruntant aux différentes périodes du "maître", de "Round Midnight" à "Kind of Blue", de "Nefertiti" à "Filles de Kilimanjaro", jusqu’aux dernières années Pop Rock de 69 à 91, Jean My Truong nous propose 12 titres dignes de celui qui émerveilla son enfance, et l’initia au jazz.

Plongée immédiate dans le "Miles Davis" de 1984 avec "Decoy", dans une ambiance très Weather Report où la tendance de l'époque est au jazz-rock et aux synthétiseurs... On ne pouvait rêver mieux comme premier titre pour mettre en place cette hommage à Miles, à son énergie
créatrice et à sa diversité musicale. Un univers en fusion où évidemment Jean My Truong est parfaitement à l'aise, retrouvant avec un plaisir non dissimulé la puissance rythmique de cette composition eighties tout en y associant la fluidité à un tempo endiablé, soutenant parfaitement
le jeu tout en finesse de Sylvain Gontard à la trompette et les envolées aériennes - au phrasé très bluesy - de Mike Stern à la guitare.

Petit saut temporel en arrière pour le morceau suivant, au cœur de la période hard bop, avec le mythique "Round Midnight" de Thelonious Monk enregistré par Miles en 1956 et inaugurant son nouveau quintet (avec Red Garland, Paul Chambers, John Coltrane et Philly Joe Jones). Le
quintet de Jean My Truong aborde ce thème difficile avec une réelle dynamique et beaucoup de générosité, laissant entendre le piano très swing de Leandro Aconcha aux côtés de la trompette de Sylvain Gontard qui pose la mélodie complexe de cette composition. Jean My à la batterie démontre ici toute la subtilité et la maîtrise de son jeu, notamment dans l'utilisation des cymbales et de la charley.

Jean My Truong... The Blue Light
Les deux morceaux suivant sont tirés du classique des classiques, période acoustique, ""Kind of Blue" (1987). Il s'agit de "All Blues" et "Blue in Green". Ces deux thèmes sont des chefs-d’œuvre d'équilibre et de maturité. C'est dans "All Blues" que l'on retrouve naturellement Didier Lockwood au violon, l'ami de toujours, apportant un phrasé fin et atmosphérique à cette séquence terriblement endiablé. Ça tourne à 200 à l'heure et tout le monde est de la partie. Plus posé, "Blue in Green" nous donne 5'32" de répit pour se mettre au vert.

Tout le reste de l'album est de la même eau... magistrale et jouissive. Que ce soit "Milestones", manifeste du jazz moderne, "Fall" de l'album "Nefertiti" où Miles se retrouve entouré de Wayne Shorter, Herbie Hancock, Ron Carter, Tony Williams, les futurs créateurs du quintet VSOP (avec Freddie Hubbard) ou encore "Mademoiselle Mabry" du très intense et jazz-rock "Filles du Kilimandjaro", tous sont une friandise pour les oreilles. Sans oublier le 13e titre "The Blue Light" - une composition originale de Jean My Truong - qui clôt avec élégance et logique ce tribute offert par un musicien passionné qui exprime humblement mais avec virtuosité sa passion pour "The Man with the Horn"...

L'album "The Blue Light" est un voyage qui génère à la fois le plaisir de la découverte, celui d'un quintet réuni avec bonheur par un batteur très talentueux, Jean My Truong, et celui des retrouvailles avec un trompettiste qui irradie encore aujourd'hui de son invention et de sa virtuosité le monde du jazz... Miles Davis !

● CD Jean My Truong tribute to Miles Davis "The Blue Light". Sortie le 14/11/2011.
Socadisc - Distribution Absilone.

● Jean My Truong en concert
15 mars 2012 à Sceaux (92).
17 mars 2012 à Taverny (95).
24 mars 2012 à Taverny (95).
31 mars 2012 à Châtenay-Malabry (92).
5 juin 2012 au New Morning : Jean My Truong Quintet + Didier Lockwood en invité.
1er juillet 2012 au Festival de Chinon (37).
19 août 2012 au Festival Jazz en Ré (17).

Gil Chauveau
Lundi 13 Février 2012

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025












À Découvrir

"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
Spectacle à la Une

"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

Brigitte Corrigou
12/04/2025
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024