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Concerts

Festival des Lumières de Montmorillon... Sauvé de justesse !

La quatrième édition du Festival des Lumières aura bien lieu cette année du 21 au 23 août 2015 avec un changement de programmation de dernière minute dû à des problèmes de financement. Ce festival de théâtre et de musique baroque dans la Vienne espère ainsi pérenniser son fécond rendez-vous avec le public.



© Pascal Brunet.
© Pascal Brunet.
Le Festival des Lumières de Montmorillon (en référence au XVIIIe siècle et à son esprit) n'est pas le seul festival à être mis en danger à cause de la crise. Avec un jour de programmation supprimé sur quatre (et l'annulation de la venue du Concert d'Astrée entre autres), son directeur artistique Hadrien de Villeblanche et son équipe ont choisi de sanctuariser le rendez-vous théâtral et musical dans la charmante ville de Montmorillon (non loin de Poitiers) en revoyant partiellement son organisation. Même le Festival d'Avignon, on s'en souvient, a dû fermer un jour plus tôt cette année.

Rien d'étonnant à cela : la presse s'est longuement étendue ce printemps sur la situation problématique de nombreux festivals, cette année en France, toutes disciplines confondues depuis la publication d'une "Cartocrise" des manifestations amputées ou annulées (à consulter sur la plateforme OpenStreetMap) créée et tenue à jour par une médiatrice culturelle, Ermeline Jersol. Désengagement de l'État via les budgets alloués aux collectivités territoriales, inflation des cachets, changement d'équipes municipales, mauvaise gestion, concurrence d'autres pays européens : les causes sont souvent multiples mais les effets toujours identiques. C'est près de cent cinquante rendez-vous culturels qui ont ainsi disparu à ce jour dont la majeure partie cette année.

Concert Spirituel © Éric Manas.
Concert Spirituel © Éric Manas.
Pour le Festival des Lumières, c'est la défection d'un mécène privé connaissant des difficultés (et un manque à gagner de quinze mille euros) qui a menacé un temps la manifestation. Les collectivités locales et la Spedidam (qui coordonne et produit l'événement) ont réussi à sauver cette quatrième édition en maintenant son esprit et ses objectifs grâce à d'importantes économies de fonctionnement. Désormais programmés sur trois jours, les différents rendez-vous proposent encore, en matinée et en soirée, théâtre de rue, concerts, visite en musique du patrimoine local (la vieille ville de Montmorillon a été entièrement restaurée grâce à des capitaux européens) et ateliers à destination des petits et des grands. La littérature avec la Cité de l'Écrit et la gastronomie ne sont pas en reste. Seuls les concerts du soir sont payants (et très abordables).

Dans les différents lieux qu'offrent la ville, ses environs et la Maison-Dieu (un ancien monastère-hôpital fondé au XIe siècle), les festivaliers pourront applaudir en particulier "La Simphonie du Marais" de Hugo Reyne avec le ténor Romain Champion dans Monteverdi et Lully. L'autre concert phare du festival donnera l'occasion de retrouver l'orchestre baroque d'Hervé Niquet, Le Concert Spirituel, non sans avoir découvert aussi un ensemble très original dont le cœur est constitué de cuivres, Les Sacqueboutiers - du nom de cet ancêtre du trombone.

Inutile de préciser qu'il faudrait que les plus hautes instances se saisissent de ce dossier de la culture en péril dans notre pays : quand elle est ainsi menacée, on ne saurait trop s'inquiéter… Tant qu'il est encore temps !

Du 21 au 23 août 2015.
Festival des Lumières.
Musique, théâtre, conte, cirque, marionnettes.
Maison Dieu, rue des Augustins, Montmorillon (86).
Office de Tourisme : 05 49 91 11 96.
>> festival-des-lumieres.com

Christine Ducq
Jeudi 20 Août 2015

Concerts | Lyrique







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"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
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"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024