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Pièce du boucher

Avignon selon Barnabé ou le drame du moustique-tigre

En direct du Festival d'Avignon: Off 2015 épisode 1

C’est terrible, ils sont partout. Ils nous sucent jusqu’au sang et ne semblent jamais repus. De plus en plus, ce fléau s’abat sur Avignon et son festival. Et chaque année, le nombre de ces moustiques-tigres augmente. Résultat : les compagnies en ressortent souvent exsangues… Une solution s’est donc imposée à nous : son nom est Barnabé et c’est notre super héros.



© D.R.
© D.R.
Ces petites bébêtes ont des pattes énormes. Lorsque vous arrivez à en écraser une, elle explose sous votre paume et fait gicler leur sang qui s’étale dans le creux de votre main. Pas très appétissant, c’est pourtant le ballet perpétuel de cette nuée bourdonnante et insatiable. Serait-ce la raison de cette arrivée encore timide des spectateurs du festival ? On ne peut pas dire que depuis son ouverture, le monde se bouscule dans le OFF.

Beaucoup de salles sont encore bien vides, certains artistes osent affronter la menace du moustique et tractent eux-mêmes le chaland, mais avouent croiser toujours les mêmes personnes. Où sont-ils donc tous passés ? Se sont-ils faits tous tellement pompés que plus grand monde n’ait encore assez de fuel pour venir ? Au milieu des spectacles et des parades, il y a aussi la face cachée de ce beau festival. La réalité du moustique-tigre est souvent redoutable et il est temps qu’on perce à jour ce fléau.

Surtout lorsqu’on croise un Greg Germain bien piqué à vif par le mur d’affiches qui borde le Village du Off : "Toutes ces affiches détruisent les arbres, les câbles de la ville. Les artistes du Off accrochent n’importe comment. Savez-vous qu’ils sont considérés par le In comme des va-nu-pieds !". C’est pour cela qu’il doit y avoir autant de moustiques. Toute cette saleté les attire, c’est sûr. Pourtant, En arborant toutes ses affiches, les rues prennent de la hauteur. C’est beau et coloré. Et on a cette sensation au milieu de ce joyeux désordre, d’être au cœur du festival. Oui, mais à quel prix ?

Allez ! Osons braver le danger du moustique-tigre par un rapide coup d’œil nous donnant la tendance générale de ce 50e festival Off : pas mal de (belles) reprises et peu de créations. Certains présentent le spectacle de toute une vie (c’est le cas par exemple des "Soliloques de Mariette", superbe texte de Cohen astucieusement découpé et magnifiquement interprété par Anne Danais - Théâtre des 3 soleils à 12 h 30. Mais joué et rejoué depuis… pfff on ne compte plus le nombre d’années tant elles sont nombreuses), d’autres osent arriver avec onze comédiens et un "Platonov" (Collège de La Salle, 22 h 30). Tiens, n’ont-ils donc pas peur de se faire piquer ? Nous reviendrons très prochainement sur cette "super production".

Revenez chers spectateurs et défions ensemble le fléau du moustique. La jeunesse bouillonne encore (1 336 rideaux qui se lèvent chaque jour pendant le festival), elle continue à être belle et mérite d’être écoutée… Pour le reste, on peut toujours tenter de le repousser d’un revers de main, au moins le temps du festival ! Barnabé veille au grain...

Tout le programme du Festival Off d'Avignon

Barnabé et Sheila Louinet
Mercredi 8 Juillet 2015

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"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

Cela dit, personne ne nous avait dit qu'à l'Essaïon, on pouvait aussi assister à des séances de cinéma ! Car c'est pratiquement à cela que nous avons assisté lors de la générale de presse lundi 27 mars dernier tant le talent de Catherine Aymerie, la comédienne seule en scène, nous a emportés(es) et transportés(es) dans l'univers de Balzac. La force des images transmises par son jeu hors du commun nous a fait vire une heure d'une brillante intensité visuelle.

Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
C'est une grande leçon de théâtre que nous propose là la Compagnie de la Rencontre, et surtout Catherine Aymerie. Une très grande leçon !

Brigitte Corrigou
06/03/2024
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"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
08/09/2023
Spectacle à la Une

"Deux mains, la liberté" Un huis clos intense qui nous plonge aux sources du mal

Le mal s'appelle Heinrich Himmler, chef des SS et de la Gestapo, organisateur des camps de concentration du Troisième Reich, très proche d'Hitler depuis le tout début de l'ascension de ce dernier, près de vingt ans avant la Deuxième Guerre mondiale. Himmler ressemble par son physique et sa pensée à un petit, banal, médiocre fonctionnaire.

© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

Joseph Kessel lui consacra pourtant un livre, "Les Mains du miracle", et, aujourd'hui, Antoine Nouel, l'auteur de la pièce, l'incarne dans la pièce qu'il a également mise en scène. C'est un investissement total que ce comédien a mis dans ce projet pour sortir des nimbes le visage étonnant de ce personnage de l'Histoire qui, par son action, a fait libérer près de 100 000 victimes du régime nazi. Des chiffres qui font tourner la tête, mais il est le résultat d'une volonté patiente qui, durant des années, négocia la vie contre le don.

Bruno Fougniès
15/10/2023