La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Festivals

Jazz à la Villette… Une programmation riche et lumineuse qui fait briller toutes les nuances du jazz

Du 31 août au 11 septembre, et ce, depuis 2002, le jazz a quartier libre à la Villette avec son festival. Sont réunis une multitude de musiciens dont, entre autres, la nouvelle génération britannique avec l'octet Kokoroko ; des révélations comme le chanteur cubain Cimafunk, le flutiste Jocelyn Mienneil et le pianiste Christophe Chassol en duo ; des légendes telles que le trio Kenny Barron, Dave Holland et Johnathan Blake, Abdullah Ibrahim ; le retour du pianiste malien Cheick Tidiane Seck ou encore la clarinettiste américaine Angel Bat Dawid et son gang gospel Tha Brothahood…



Kenny Barron, Dave Holland et Johnathan Blake Trio © DR/Jazz à la Villette.
Kenny Barron, Dave Holland et Johnathan Blake Trio © DR/Jazz à la Villette.
Pour cette soirée du 2 septembre, en première partie, Alain Jean-Marie et Diego Imbert rendent un hommage appuyé au duo Bill Evans et Eddie Gomez. Avec, entre autres, "Intuition" (1974), le duo nous avait offert des compositions piano/contrebasse de toute beauté jusqu'en 1978, année où Eddie Gomez se sépare musicalement de Bill Evans. Celui-ci, légendaire pianiste ayant marqué de son empreinte le jazz, a aussi collaboré - de façon ô combien inspirante - au mythique "Kind of Blue" (1959) de Miles Davis, étant le pianiste de quatre morceaux sur cinq.

S'enchaînent ensuite différents morceaux dont "Very early" de l'album "Moon beams" (1962) composé, semblerait-il, alors que Bill Evans n'avait que 18 ans. Nous sommes dans un tempo reposant où le piano épouse de ses notes une contrebasse sous influence du subtil doigté de Diego Imbert qui rend l'esprit de l'instrument aussi doux qu'essentiel.

Autre rythme avec Kenny Barron, Dave Holland et Jonathan Blake Trio où se glisse une atmosphère musicale d'une modernité qui puise souvent sa quintessence sur les percussions du remarquable Johnathan Blake. La batterie est autant enveloppante que vive avec une disposition des toms au même niveau. Ainsi, celle-ci lui confère un agencement ressemblant à celle d'un piano sur lequel le musicien joue d'une large palette de sonorités avec, pour chaque tom, une note, un son, un accord. Le tempo nous fait découvrir un univers où les percussions peuvent devenir l'alpha et l'oméga d'un trio.

Angel Bat Dawid et Tha Brothahood © Wanda Detemmerman.
Angel Bat Dawid et Tha Brothahood © Wanda Detemmerman.
Deux légendes sont avec lui, Kenny Barron et Dave Holland. Ils se connaissent depuis 1985 où leur album "Scratch" (en compagnie du batteur Daniel Humair) avait marqué le monde du jazz avec ses rythmes autant sensuels que veloutés au piano et vibrant à la batterie. Leur collaboration dure depuis plus de 35 ans. Avec Johnathan Blake, leur cadet uniquement par l'âge, le trio a concocté le superbe album "Without deception" (2020).

Avec des percussions souvent en lead, les breaks, les licks ou les fills s'enchaînent, créant une atmosphère où régularité et ruptures sont un régal sur scène. La rythmique est menée par Johnathan Blake quand les basses mélodiques sont jouées au piano alors que la contrebasse est en appui avec Dave Holland qui enchaîne les notes, cadrant l'ensemble en y apportant un souffle éthéré où ses accords sont autant en lame de fond qu'en feu follet musical.

Graves par excellence dans leur essence, ils soutiennent le piano de Kenny Barron tout en rondeur avec les notes qui glissent en accompagnant le tempo rapide et soutenu de la batterie. Celles-là apportent une touche sensuelle et douce en contrepoint de celle-ci quand la contrebasse crée une atmosphère langoureuse où les notes se glissent comme par effraction et vivacité.

Dans ce trio, le talent n'a pas d'âge et sait faire aucune concession aux années avec pour cette représentation comme un souffle magique aux sonorités aussi mêlées que distinctes.

Jazz à la Villette
Du 31 août au 11 septembre 2022.
Le programme complet sur >> lavillette.com
Grande Halle de La Villette, Paris 19e.
Tél. : 01 40 03 75 75.

Safidin Alouache
Samedi 10 Septembre 2022

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter





Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À découvrir

"Rimbaud Cavalcades !" Voyage cycliste au cœur du poétique pays d'Arthur

"Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées…", Arthur Rimbaud.
Quel plaisir de boucler une année 2022 en voyageant au XIXe siècle ! Après Albert Einstein, je me retrouve face à Arthur Rimbaud. Qu'il était beau ! Le comédien qui lui colle à la peau s'appelle Romain Puyuelo et le moins que je puisse écrire, c'est qu'il a réchauffé corps et cœur au théâtre de l'Essaïon pour mon plus grand bonheur !

© François Vila.
Rimbaud ! Je me souviens encore de ses poèmes, en particulier "Ma bohème" dont l'intro est citée plus haut, que nous apprenions à l'école et que j'avais déclamé en chantant (et tirant sur mon pull) devant la classe et le maître d'école.

Beauté ! Comment imaginer qu'un jeune homme de 17 ans à peine puisse écrire de si sublimes poèmes ? Relire Rimbaud, se plonger dans sa bio et venir découvrir ce seul en scène. Voilà qui fera un très beau de cadeau de Noël !

C'est de saison et ça se passe donc à l'Essaïon. Le comédien prend corps et nous invite au voyage pendant plus d'une heure. "Il s'en va, seul, les poings sur son guidon à défaut de ne pas avoir de cheval …". Et il raconte l'histoire d'un homme "brûlé" par un métier qui ne le passionne plus et qui, soudain, décide de tout quitter. Appart, boulot, pour suivre les traces de ce poète incroyablement doué que fut Arthur Rimbaud.

Isabelle Lauriou
25/03/2024
Spectacle à la Une

"Le consentement" Monologue intense pour une tentative de récit libératoire

Le livre avait défrayé la chronique à sa sortie en levant le voile sur les relations pédophiles subies par Vanessa Springora, couvertes par un milieu culturel et par une époque permissive où ce délit n'était pas considéré comme tel, même quand celui-ci était connu, car déclaré publiquement par son agresseur sexuel, un écrivain connu. Sébastien Davis nous en montre les ressorts autant intimes qu'extimes où, sous les traits de Ludivine Sagnier, la protagoniste nous en fait le récit.

© Christophe Raynaud de Lage.
Côté cour, Ludivine Sagnier attend à côté de Pierre Belleville le démarrage du spectacle, avant qu'elle n'investisse le plateau. Puis, pleine lumière où V. (Ludivine Sagnier) apparaît habillée en bas de jogging et des baskets avec un haut-le-corps. Elle commence son récit avec le visage fatigué et les traits tirés. En arrière-scène, un voile translucide ferme le plateau où parfois V. plante ses mains en étirant son corps après chaque séquence. Dans ces instants, c'est presque une ombre que l'on devine avec une voix, continuant sa narration, un peu en écho, comme à la fois proche, par le volume sonore, et distante par la modification de timbre qui en est effectuée.

Dans cet entre-deux où le spectacle n'a pas encore débuté, c'est autant la comédienne que l'on voit qu'une inconnue, puisqu'en dehors du plateau et se tenant à l'ombre, comme mise de côté sur une scène pourtant déjà éclairée avec un public pas très attentif de ce qui se passe.

Safidin Alouache
21/03/2024
Spectacle à la Une

"Un prince"… Seul en scène riche et pluriel !

Dans une mise en scène de Marie-Christine Orry et un texte d'Émilie Frèche, Sami Bouajila incarne, dans un monologue, avec superbe et talent, un personnage dont on ignore à peu près tout, dans un prisme qui brasse différents espaces-temps.

© Olivier Werner.
Lumière sur un monticule qui recouvre en grande partie le plateau, puis le protagoniste du spectacle apparaît fébrilement, titubant un peu et en dépliant maladroitement, à dessein, son petit tabouret de camping. Le corps est chancelant, presque fragile, puis sa voix se fait entendre pour commencer un monologue qui a autant des allures de récit que de narration.

Dans ce monologue dans lequel alternent passé et présent, souvenirs et réalité, Sami Bouajila déploie une gamme d'émotions très étendue allant d'une voix tâtonnante, hésitante pour ensuite se retrouver dans un beau costume, dans une autre scène, sous un autre éclairage, le buste droit, les jambes bien plantées au sol, avec un volume sonore fort et bien dosé. La voix et le corps sont les deux piliers qui donnent tout le volume théâtral au caractère. L'évidence même pour tout comédien, sauf qu'avec Sami Bouajila, cette évidence est poussée à la perfection.

Toute la puissance créative du comédien déborde de sincérité et de vérité avec ces deux éléments. Nul besoin d'une couronne ou d'un crucifix pour interpréter un roi ou Jésus, il nous le montre en utilisant un large spectre vocal et corporel pour incarner son propre personnage. Son rapport à l'espace est dans un périmètre de jeu réduit sur toute la longueur de l'avant-scène.

Safidin Alouache
12/03/2024