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Le Théâtre des Déchargeurs sacrifié sur l'autel des profits ?  30/08/2023

Au cœur de l'été, nous apprenions sur la page Facebook du Théâtre des Déchargeurs la volonté de son actuel directeur, Adrien Grassard, de fermer ce lieu, au motif d'une trésorerie insuffisante pour assurer l'avenir de la structure, le tout sur fond de vente des murs par l'ancien propriétaire. De théâtre (créé en 1982 par Vicky Messica, acteur, interprète de poésie et metteur en scène, NDLR) ayant permis l'émergence de nombreuses compagnies, le site, qui se trouve dans un secteur dont le prix au mètre carré est supérieur à 10 000 €, est en passe d'être transformé en hôtel, dont on peut aisément deviner qu'à l'approche des Jeux Olympiques, sa rentabilité sera facilement assurée.

Dans cette juteuse opération immobilière, les grands gagnants sont incontestablement la holding qui a racheté les murs, ainsi que l'actuel directeur, dont on ne peut que supposer qu'il n'a pas accepté sans contrepartie que son bail, initialement de cinq ans, soit amputé de deux années. Et qui perd sur l'autel de cette course à la spéculation ? Les treize salariés(es) - permanents(es) et intermittents(es) - auxquels s'ajoutent les très nombreuses et nombreux salariés(es) de la quarantaine de compagnies qui devaient être accueillies dans les mois à venir.

Le Synptac-CGT et la Fédération CGT Spectacle leur adressent tout leur soutien et demandent :

- que les contrats de travail des salariés(es) du lieu soient honorés jusqu'au 31 décembre 2023, conformément aux plannings qui leur ont été remis ;

- que les contrats de cession des compagnies soient honorés. Cette fermeture soudaine menace les engagements conclus avec les artistes qui ont bloqué de longue date leur planning de travail pour jouer au Théâtre des Déchargeurs à la rentrée et ne pourront dans ce délai retrouver d'autres heures de travail ;

- que le ministère de la Culture s'oppose à la reconversion de cette salle telle que l'ordonnance de 1945 lui permet, ordonnance qui prévoit qu'aucune salle de spectacle ne peut être démolie ou reconvertie vers une autre activité sans l'accord du ou de la ministre, et qui fixe des procédures contraignantes en cas de cession de bail.

Pour la défense de ce lieu d'émergence artistique, pour la défense des emplois des salariés(es), le Synptac-CGT et la Fédération CGT Spectacle appellent à participer au rassemblement qui aura lieu le vendredi 1er septembre 2023 à 18 h devant le Théâtre des Déchargeurs(3 rue des Déchargeurs Paris 01, M° Châtelet).

Paris, le 29/08/2023
Fédération Nationale des Syndicats du Spectacle, du Cinéma, de l'Audiovisuel et de l'Action Culturelle Cgt, 14-16, rue des Lilas, Paris 19e
Tél. : 01 48 03 87 60.

>> fnsac-cgt.com
cgtspectacle@fnsac-cgt.com
La Rédaction

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"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
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© Philippe Hanula.
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Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

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09/10/2024
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"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

Brigitte Corrigou
12/04/2025
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"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024