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Avignon Off... l'heure des bilans chiffrés !  29/07/2011

Indéniablement Avignon Off 2011 est un vrai succès tant en termes de spectacles proposés que de fréquentation du public. Il est évident que le festival est bien plus qu'une foire ou un marché du théâtre, il est devenu un authentique phénomène de société. Et, en cette année pré-électorale, les politiques ne s'y sont pas trompés...

Que ce soit la venue de Frédéric Mitterrand, ministre de la culture, ouvrant le festival, ou les visites de Martine Aubry, Manuel Valls, François Hollande ou Arnaud Montebourg, tous ont voulu prendre la température de ce terreau de démocratie, de palabre culturel et social qu'est depuis toujours le spectacle vivant... et tous les arts de la scène.

Ce succès s'est traduit cette année par une offre de plus de 1 143 spectacles donnant un total cumulé de 26 000 représentations sur 116 lieux différents. Ceux-ci ont été proposés par 969 compagnies dont 93 étrangères (venant de 20 pays). Parmi ces spectacles 147 été plus particulièrement destinés au jeune public et 144 entrent dans la catégorie Humour (de café-théâtre et de boulevards). On peut noter que les textes de 870 auteurs du XXe siècle ont été joués durant cette édition. 60 rencontres, débats ou expositions ont eu lieu dans le Village du OFF, des dizaines dans les autres lieux.

La présence des professionnels est évidemment essentielle pour les compagnies, à la fois dans la perspective d'une programmation "après-festival" dans une salle et/ou du montage d'une tournée, que dans leur quête d'articles de presse, leur permettant d'avoir un retour critique sur leur travail, et de pouvoir les utiliser pour monter leur dossier de vente ou de demande de subventions. Ceux-ci étaient au nombre de 3 593 (dont 369 étrangers) contre 3003 en 2010, soit une augmentation de plus de 19 %. Ils se répartissent ainsi : 1 453 programmateurs, 1 316 prescripteurs, 529 journalistes, 295 Institutionnels.

Cette augmentation du nombre de spectacles et de professionnels sur Avignon, régulière depuis depuis plusieurs années, est en corrélation avec la hausse de fréquentation du public. En effet, pour 2011, c'est 48 000 cartes Off qui ont été vendues, soit exactement 20 % de plus que l’année dernière. Selon les enquêtes effectuées par l'association Avignon Festival & Compagnies, ces abonnés restent 4 jours et voient 4 pièces par jour. Cela donne 120 000 entrées de plus cette année.

Quarante-cinq ans après le geste fondateur d’André Benedetto, le Off a démontré qu’il répond à une irrésistible nécessité. Traversant crises et métamorphoses, cet évènement en évolution constante, capable de réunir plus de 7 000 membres d’équipes artistiques de toutes disciplines, et de générer chaque jour plusieurs dizaines de milliers d’entrées, puise indéniablement sa vitalité dans les sources profondes de notre société. Il pose directement la question de la relation entre les populations de notre pays, les spectacles qui les représentent, les imaginaires qui les traversent, les créateurs qui leur donnent incarnation. Par suite de cette proximité entre la société "ordinaire" et les artistes, le Off, est devenu le plus important festival de création contemporaine, et aussi un lieu de libres débats où le public vient s’exprimer, au risque de la maladresse, et non pour recevoir passivement une parole magistrale.

Photo : Place du Palais, animation de rue, Avignon Off 2011 © Gil Chauveau.

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La Rédaction

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"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
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"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

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12/04/2025
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"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024