La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Pitchouns

Une farce de Pathelin contemporaine en version drôle et doucement folle

"La Farce de Maître Pathelin", Le Grand Parquet, Paris

Richard Demarcy, homme de lien social et de théâtre, est associé à l’aventure du Grand Parquet depuis 2005. Ce lieu dirigé par François Grosjean, moins intimidant qu’un théâtre, a vocation à rencontrer les habitants des quartiers populaires en limite du dix-huitième et dix-neuvième arrondissement de Paris.



© Victor Tonelli.
© Victor Tonelli.
En inauguration de la saison, il y présente "La Farce de Maître Pathelin", pièce d’un anonyme du 15ème siècle*. Celle-ci est immergée dans le quotidien d’une troupe de saltimbanques, comédiens de foire, un peu italiens, un peu bricolos, rigolos. Elle présente un petit monde précaire et fragile.

Il est celui de Pathelin, avocat sans cause ou bien comédien sans engagement (on ne sait pas trop). Pathelin vivant d’expédients se fait appeler Maitre Pathelin et se montre urbain, se montre patelin. Il vit de farces… et attrape qui pourra.

Un peu de grivèleries, un peu de plaidoirie, quelques pirouettes et vers de mirlitons, et la vie impécunieuse et faussement insouciante avec sa compagne va jusqu’à trouver plus rusé que soi...

© Victor Tonelli.
© Victor Tonelli.
L’œuvre semble avoir été écrite de la veille.

La troupe enjouée tisse avec drôlerie et vivacité des liens de proximité et de tendresse avec un public qui n’en revient pas de rire à ce monument du patrimoine.

Assurément, les enfants et leurs parents adorent la douce folie qui se dégage de la version proposée. Cela est de bon augure pour la suite de la saison qui se révèle riche.

*Au moyen âge, lors des grandes fêtes religieuses, des tréteaux de théâtres s’installaient sur les parvis des églises cathédrales. Des intermèdes comiques alternaient avec les scènes éducatives et religieuses. Reflets bon enfant de la population, elles farcissaient de rires l’ensemble.

La farce de Maitre Pathelin, retranscrite au quinzième siècle par un auteur anonyme (peut-être lui-même spectateur), est entrée dans le patrimoine : Elle montre un marchand drapier (élite de la bourgeoisie) berné par un avocat quelque peu corrompu et lui-même, au final, victime de la qualité de sa plaidoirie par un rural berger plus rusé que lui. À l’époque elle fit scandale.


Probablement parce qu’au-delà des portraits très réalistes, la pièce fait apparaitre un comédien conscient de lui-même et de la distance qui existe entre l’interprète, le personnage et le public. Pathelin est une manière d’Arlequin qui endosse toutes les fictions et fait miroiter toutes les réalités. En cela, de manière très contemporaine, Pathelin franchit le mur en direction du réel comme bien plus tard Don Juan.

"La Farce de Maître Pathelin"

© Victor Tonelli.
© Victor Tonelli.
Spectacle Jeune Public/Tout Public de 6 à 106 ans.
Version contemporaine de Richard Demarcy (éditée à l'Avant-Scène) d'après un anonyme du XVe siècle.
Mise en scène : Richard Demarcy.
Avec les acteurs-musiciens : Antonio Da Silva, Guy Lafrance, Leontina Fall, Nicolas Le Bosse et Jean-Lacroix Kamga.
Par le Naïf Théâtre.

Spectacle du 5 octobre au 28 octobre 2012
Vendredi et samedi à 20 h, mercredi et dimanche à 15 h.
Le Grand Parquet, Paris 18e, 01 40 05 01 50.
>> legrandparquet.net

Jean Grapin
Lundi 15 Octobre 2012

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter




Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024