La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
CédéDévédé

Tricot Machine... Un univers coloré et déluré venu de la Belle Province

Archives Sorties CD début 2011

Intrigant, "La prochaine étape", le nouvel album de Tricot machine (Catherine Leduc et Matthieu Beaumont), l'est indéniablement. Ce groupe québécois, qui voit le jour en 2005, sort en 2007 un premier disque éponyme qui se révèle un succès autant critique que populaire. Tricot Machine obtiendra avec celui-ci les Félix de la pochette et de la révélation de l’année 2007, le Prix Écho de la chanson de la Socan, le prix Dédé Fortin de la SPACQ et le Prix Miroir du Festival d’Été de Québec.



Tricot Machine... Un univers coloré et déluré venu de la Belle Province
"La prochaine étape" est le troisième album du duo montréalais et, bien qu’empreintes d’une réelle maturité acquise au fil des nombreuses tournées au Québec et en France, les nouvelles chansons n’en font qu’à leur tête et sortent avec jubilation des sentiers battus.

Elles nous transportent au beau milieu d’un univers déluré où se côtoient quelques notions de survie en forêt et un certain goût pour la liberté. Imprégné de leur "québécitude", Tricot Machine nous sert des textes à la fois simples et évocateurs, où se glissent quelques discrètes références, opposés à des arrangements efficaces et riches. Ils se sont à nouveau entourés de leurs précieux collaborateurs, David Brunet et Daniel Beaumont.

"Je suis la prochaine étape/Ne vois-tu rien venir/Sens-tu monter le trac/entre chacun de tes respirs (...) Je donne le vertige/Même aux étoiles filantes (...) Quelque part les bernaches/Dans leur manteau de laine/Sont parties à la chasse/En attendant que tu reviennes " : démarrage comme un douce allusion à un certain groupe... et à son phoque fétiche ; tendre autodérision avec un piano très présent, ambiance folk et harmonica en sus pour "La prochaine étape" qui donne le titre à l'album.

Frais et jovial, ce n'est rien de le dire... Banjo (dans "Un bout ensemble"), chœurs énergiques mais aériens (dans "Défier les rites"), percussions décomplexées, Tricot Machine joue la profondeur dans les textes mais les porte musicalement dans une rythmique très efficace... Parfois speed et très swinguante, presque dans l'urgence avec "30 ans hier". Les orchestrations sont foisonnantes, percutantes mais souvent subtilement entrecoupées de respirations chorales ou pianistiques.

Les ballades sont là aussi, guillerettes et terriblement québécoises, avec "Un bout ensemble" et "Radar" notamment : "J'arrive à la sauvette/Et les mains dans les poches/Tout va tellement plus drette/Quand c'est un peu tout croche", avec un tapis de synthé comme on n'en fait plus... Parfois dans une ballade, "Dans la mire" ou "J'ai des allumettes", le piano se suffit à lui-même, côtoyant à peine quelques légères percussions jazzy. Ici, Catherine Leduc et Matthieu Beaumont ne boudent pas des arrangements qui ne déplairaient pas à un certain Michel Rivard !

Entre le pessimiste "C'est dur de dire Je t'aime/Quand plus personne t'écoute" de "Avalanche" et l'optimiste "T'as réveillé ce qui dormait en dedans/Bien caché sous des peut-être/Des en attendant" de "Comme un accident", Tricot machine nous conte des histoires simples, "nature" mais terriblement évocatrices, en passant par un folk forestier, "Une bûche après l'autre", qui fleure bon le feu de cheminée et la veillée au son du banjo... sauf que l'électricité est passée par là... Ou par une dérision lucide avec "La meilleure équipe" : "(...) On n'est peut-être pas des robots/mais on fonctionne/On fait pas tout comme il faut/On n'a sûrement pas tout faux/On prend nos béciks/et puis on avance". Cet opus se finit sur un superbe morceau orchestral, "À l'autre bout / 2e rang" qui nous convainc définitivement du réel talent de Tricot Machine et nous prouve que la chanson québécoise ne se limite pas à la "Variété" (souvent entendu sur nos radios périphériques) mais qu'elle est encore le terreau fertile d'une vraie création, porteuse d'originalité tout en ayant digéré des références, encore très présentes.

Soucieux également d’innover en matière de concepts visuels, Tricot machine a fait équipe avec le graphiste Atanas Mihaltchev pour réaliser la pochette de "La prochaine étape". Ensemble, ils ont développé une collection de figurines de papier à confectionner étape par étape, qui constituent la pochette, et par lesquelles sont représentées chacune des chansons du nouveau disque. Une véritable petite œuvre d’art !

● CD Tricot Machine "La prochaine étape". Sortie en France le 31/01/2011.
Label Sober & Gentle/Grosse Boîte.

>> Lire aussi l'interview de Tricot Machine.

Gil Chauveau
Jeudi 3 Février 2011

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter




Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024