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Concerts

Folies baroques et éléments déchaînés pour les 40 ans du Festival de Sablé

La 40e édition anniversaire du Festival de Sablé s'est follement fêtée avec de nombreux événements inédits placés sous le signe du spectaculaire et de l'extravagance baroques. Avec de surcroît une programmation musicale vouée aux catastrophes des éléments, séismes naturels ou déchaînements divins et autres miracles de magicien(ne)s, la manifestation a su encore séduire un très large public.



Grand Bal, Cie de Danse l'Éventail - Folie Françoise © Festival de Sablé.
Grand Bal, Cie de Danse l'Éventail - Folie Françoise © Festival de Sablé.
Le Festival de Sablé a été un des premiers à mettre à l'honneur les délices de l'univers baroque. Quatre décades consacrées à la connaissance et à la transmission des prestiges de ce monde de féeries, c'est une histoire déjà longue dédiée aussi à la création et à la formation - avec des académies réputées de danse et de musique pour les jeunes talents.

Ces derniers ont été également bien représentés cette année avec le claveciniste Justin Taylor, les chanteurs Eugénie Lefebvre (primée au Concours Corneille des voix) et Paul-Antoine Bénos-Djian (ancien élève à Sablé), entre autres. Pour la création, le grand opéra à machines a particulièrement brillé avec la production de "Rinaldo" de Haendel grâce aux monstres articulés de Claire Dancoisne et aux musiciens du Caravansérail, accompagnés par un plateau vocal somptueux (P.A. Bénos-Djian, Lucile Richardot, Emmanuelle de Negri, Thomas Dolié).

Les concerts n'ont pas été en reste avec l'évocation des forces naturelles (destructrices ou consolatrices) en vogue dans ce cosmos baroque grâce à des artistes tels que ceux de L'Arpeggiata ("Mediterraneo"), du Consort ("Tourbillons"), du Poème Harmonique ("Il Terremoto") ou encore de l'Ensemble Les Surprises ("Les Éléments"), entre nombreux autres rendez-vous indispensables.

© Christine Ducq.
© Christine Ducq.
Les cinq jours du festival ont également été l'occasion d'inviter chacun à une série de rendez-vous (très courus) : expositions, conférences, visites, déjeuners sur l'herbe et promenades contées dans différents lieux de Sablé - avec son exceptionnel patrimoine (du Moyen-Âge au Grand Siècle) à admirer au hasard des méandres de la Sarthe.

Pour clore en beauté cette édition anniversaire le samedi 25, Yannick Javaudin (directeur de l'Entracte, scène conventionnée de Sablé-sur-Sarthe) et Alice Orange (directrice artistique du festival et des académies) et leurs équipes ont conçu un dernier acte populaire et festif.

Investissant la ville de Sablé (Place Dom Guéranger), les scénettes dansées (baroques) par la Compagnie de Danse L'Eventail ("L'Amour et la Folie"), les ateliers pratiques "Contredanse" dans le Parc du Château (pour s'entraîner pour le Grand Bal nocturne), les ateliers de maquillage et coiffure baroques offrant aux amateurs de devenir d'extravagantes et superbes créatures tout droit sorties du film de Kubrick "Barry Lyndon" (attirant naturellement un public fasciné), un dîner sur l'herbe après trois spectacles gratuits (danse, théâtre et musique) ont attiré un public varié. D'autant plus qu'un feu d'artifice sur le modèle de ceux donnés à la cour du Roi Soleil était très attendu en conclusion de cette fête.

La Simphonie du Marais dirigée par Hugo Reyne (également au fifre, aux flûtes et au hautbois) a offert un programme consacré au répertoire de la Grande Écurie de Versailles avec des œuvres de Lully et Philidor. Le sympathique chef, commentant avec beaucoup d'humour ce concert intitulé "Plaisir du Roi, Malheur de la guerre" avec force anecdotes sur les œuvres et leurs circonstances historiques, a ravi mélomanes et curieux.

Plaisir du roi, Simphonie du Marais © Festival de Sablé.
Plaisir du roi, Simphonie du Marais © Festival de Sablé.
Plus tard, c'est l'Ensemble Amarillis (dirigé par la flûtiste Héloïse Gaillard et la claveciniste Violaine Cochard) qui a livré un concert dédié aux concertos pour cordes et vents de Telemann et Bach pour une "Effervescence concertante". Une manifestation inventive donc pour un jeune festival de quarante ans, dont on se souviendra en attendant la 41e édition.

S'est déroulé du 21 au 25 août 2018.
Festival de Sablé - Édition anniversaire des 40 ans.

>> festivaldesable.fr

Concerts à retrouver sur la chaîne Culturebox et sur France Musique.

Mediterraneo, L'Arpeggiata © Festival de Sablé.
Mediterraneo, L'Arpeggiata © Festival de Sablé.

Christine Ducq
Vendredi 31 Août 2018

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Concerts | Lyrique







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"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
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"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
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"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

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Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

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