La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Danse

"Déesses et démones"… la danse au-delà des frontières

Blanca Li et Maria Alexandrova se retrouvent sur scène dans un spectacle où les danses, aux gestes amples et bien découpées, se moquent éperdument des frontières… Dans une approche où la grâce des mouvements se lie avec la poésie des corps.



© Nico Bustos.
© Nico Bustos.
Maria Alexandrova, danseuse étoile au Bolchoï, et Blanca Li, danseuse et chorégraphe de renom, sur la même scène, c'est comme avoir le soleil et la lune dans son viseur ou une grosse part de bûche de Noël à table. Que du bonheur !

Chacune a son style. Celui de Maria Alexandrova est tout en grâce, fluidité, avec une allure élancée. Pour Blanca Li, l'approche est légèrement plus en force avec une gestuelle où le rapport à l'espace est plus marqué. Quand l'une glisse sur scène comme un macaron fondant dans la bouche, l'autre est dans une démarche souple, féline comme aux aguets. Cet espace, qu'elles partagent, n'est pas investi de la même manière par les deux danseuses même si les mouvements sont identiques ou complémentaires, les uns étant souvent miroirs des autres.

Les chorégraphies sont composées de mouvements amples où la gestuelle prend à témoin le temps. Ils sont décomposés gracieusement tout en étant fluides avec des arrêts où la posture des corps est dans une représentation presque de mannequins. Ils sont aussi syncopés avec parfois les bustes qui se balancent de l'avant vers l'arrière pour revenir en position droite.

© Nico Bustos.
© Nico Bustos.
La fluidité est mère de tous les mouvements avec une mobilité des mains qui scelle une série d'ondulations sur tout le corps. Leurs membres supérieurs s'étendent pour laisser des bustes oscillant sur leurs points d'équilibre, les jambes se déployant autour d'eux. Ainsi bras et jambes sont comme des éléments de vie, toujours en gestation, se greffant sur les troncs, presque immobiles, pour socles d'équilibre.

Les couleurs des costumes plantent une opposition qui ne se voit pas dans les chorégraphies. Les deux danseuses sont sur les mêmes tempos, le même rythme. L'opposition entre démones et déesses ne se laisse pas deviner sauf à penser que diable et dieux sont copains comme cochons. Mais peu importe à vrai dire, l'essentiel est dans cette légèreté, presque aérienne, que Blanca Li et Maria Alexandrova déploient avec une fixité dans les mouvements qui contrebalancent celle-ci.

Le spectacle est composé de douze séquences chorégraphiques ayant chacune son décor, sa lumière et sa scénographie. Celle-ci est de très bel acabit dans laquelle noir et blanc, ombres et lumières se marient pour servir diablement les dieux de la danse.

"Déesses et Démones"

© Nico Bustos.
© Nico Bustos.
Direction artistique et chorégraphie : Blanca Li.
Avec : Blanca Li et Maria Alexandrova.
Musique : Tao Gutierrez, incluant les arrangements psychoaccoustiques de
"La Danse Macabre" de Camille Saint-Saëns, le Concerto n° 1 pour Piano et Orchestre de Chopin, la "Serenata arabe" d'Albeniz (enregistrées par l'orchestre Mad4Strings).
Scénographie : Pierre Attrait.
Vidéo : Charles Carcopino.
Lumières : Caty Olive.
Costumes : Azzedine Alaïa, Jean-Paul Gaultier, Stella McCartney et Sophie Théallet.
Accessoires et bijoux de cheveux : Maison John Nollet Paris.
Designer accessoires : Erik Halley.
Durée : 1 h 20 sans entracte.

Du 22 décembre 2015 au 3 janvier 2016.
Du lundi au jeudi à 20 h, samedi 2 et dimanche 3 janvier à 17 h et 20 h.
Théâtre des Champs-Élysées, Paris 8e, 01 49 52 50 50.
>> theatrechampselysees.fr

Safidin Alouache
Mercredi 30 Décembre 2015

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter | Avignon 2025







À Découvrir

"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024