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Cirque & Rue

Cirque ultra électrisé et déjanté pour cabaret en mode 69 auto-reverse !

"Cabaret décadent Revue électrique n°69", Cirque Électrique, Paris

"I'm a boy, I'm a girl, I'm a queer... Fuck you !"… Quelques mots percutants en forme d'adresse provocatrice pour introduire deux heures d'un cabaret enflammé, endiablé, épicé, sensuel et insolemment travesti… Quand le 6 devient 9, le 9 devient 6, le travestissement met le cirque à l'envers et invertit les polarités électriques, le plus devient moins, l'homme devient femme et vice-versa… Bienvenue dans la "Revue électrique n° 69" !



© Hervé Photograff.
© Hervé Photograff.
Le cirque électrique n'est pas un cirque comme les autres, ni classique ni nouveau, mais ailleurs... insolent, déjanté, rock, punk et jubilatoire. On n'y va pas que pour la performance technique des numéros présentés au fil d'un programme de cabaret endiablé... non pas que ces acrobates, jongleurs, fil de ferriste et autres équilibristes ne soient pas de talentueux circassiens - bien au contraire -, mais on y va aussi pour leur jeu décalé, leur incroyable polyvalence et pour la virtuosité des enchaînements qui rend ce cabaret décadent, musical et terriblement original.

Qui dit cabaret dit dîner. Ici, la proposition est bien réelle et l'espace réservé à la restauration est devenu plus important (par rapport à de précédents spectacles que nous avions vus), dans une mise en espace réussie, conviviale mais sans exagération, permettant d'assister au spectacle dans d'excellentes conditions même si l'on peut être secoué par le show lui-même, notamment au niveau de nos récepteurs auditifs, la puissance de la sono n'ayant rien à envier à celle de certains concerts de "rock métal" !

© Hervé Photograff.
© Hervé Photograff.
Mets appréciés et assimilés, liquides alcoolisées - ou non ! - absorbées à la discrétion des intéressés, la soirée démarre avec une tonitruante mise en route du maître de cérémonie Otomo De Manuel qui use d'une puissance de feu verbale assez délirante et arrive à chauffer à blanc rapidement le public, avec le soutien d'une musique rock bien charnue aux accents électro-punk assumés.

La manière dont la salle est stimulée maintient le public dans une tension festive survoltée, dans une ambiance rock'n'roll déjantée, décadente, bigenre, où se pavanent nobles travelos allumés allumeurs colorés, avec une petite pointe de référence aux cabarets berlinois des années trente et à l'esprit irrévérencieux d'un Karl Valentin utilisant le contraste comme ressort comique ou de provocation… Le côté clownesque décalé du longiligne Otomo en est le parfait exemple.

Dans un style où ils excellent - bigarré, pailleté et plumé -, les artistes masculins sont majoritairement costumés façon drag queens. Les girls optent pour une féminité façon cabaret burlesque où les paillettes s'associent à l'esprit cuir. Femme-homme ou homme-femme, tout ici est travestissement, tant de la bien-pensance, que des modes genrés ou des normes artistiques codifiées.

© Hervé Photograff.
© Hervé Photograff.
À l'invitation d'Otomo, les circassiens investissent la piste, se succédant entre chaque saillie orale du mister Loyal local. Sans tous les nommer et sans respect chronologique, retenons Marie Le Corre, fil de ferriste fauve agile, qui danse, sautille sur une rythmique soutenue, en position assise, puis sauts debout, accroupis sur le filin, glissade en marche arrière "à l'aveugle".

Amélie Kourim se distingue au trapèze, sans filet, sans sécu, figures simples en mode balançoire mais joliment exécutées, avec beaucoup de fluidité et d'aisance. La musique, actrice à part entière, est toujours à la hauteur de la performance. Constance Bugnon, gymnaste aux élégantes contorsions ensorcelle le public. De chacune de ces séquences émane beaucoup de sensualité.

Antoine Redon à la roue Cyr, tout de résille rouge le corps habillé fait tourner les têtes et nous prouvera plus tard sa capacité à apprivoiser le feu et à jongler avec. Performance de jonglage réussie également avec François Borie, maître chapelier pour la circonstance usant de trois, puis quatre chapeaux.

© Hervé Photograff.
© Hervé Photograff.
Enfin, chaque semaine, la distribution artistique s'augmentant d'une ou d'un invité(e) surprise, celle de la semaine où nous avons assisté au spectacle fut une "star" représentative de la scène "burlesque", la féline fatale Tronicat La Miez qui nous émoustilla avec une séquence effeuillage plus que suggestive.

Bref, pour se refaire une santé printanière, se réveiller les neurones, se sortir des sentiers bien-pensants de la quotidienneté confortable de la bohème parisienne ou pour sortir de sa zone de confort et se rappeler que la tolérance, la curiosité et l'ouverture d'esprit ne sont pas que des mots sous blister, allez, que ce soit pour ce spectacle ou un autre (quasiment tous valent le déplacement), vous dévergonder, vous aérer les neurones, vous rincer les oreilles et vous illuminer les yeux au Cirque Électrique !

"Cabaret décadent Revue électrique n°69"

© Hervé Photograff.
© Hervé Photograff.
Avec : Amélie Kourim (marche au plafond & trapèze), François Borie (jonglage), Constance Bugnon (mât chinois & acro-danse), Antoine Redon (feu & roue cyr), Marie Le Corre (équilibre sur bouteilles & fil de fer) Mathieu Hedan (équilibre et acro-danse), Pierre Pleven (pôle dance & effeuillage), Guillaume Leclercq (fakir & pierrot lunaire), Otomo De Manuel (maître de cérémonie).
Musiciens : Jean-Baptiste Very, Hervé Vallée, Maria Fernanda Ruette, Adrian Gandour…
Et un invité surprise chaque semaine !
Durée : 2 h (avec un entracte).

Du 13 février au 30 mars 2019.
Du mercredi au samedi à 21 h.
Ouverture des portes à 19 h.
Possibilité de dîner autour de la piste. Réservation indispensable.
Cirque électrique, Paris 20e, 09 54 54 47 24. reservation@cirque-electrique.com
>> cirque-electrique.com

Gil Chauveau
Lundi 25 Mars 2019

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© Ève Pinel.
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Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

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© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024