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Théâtre

"Moi, Colette"... La trajectoire éminemment féminine d'une femme libre...

"Moi, Colette", Théâtre Maxim's, Paris

1935, paquebot transatlantique Normandie, intérieur cabine - luxueuse, of course ! -, retour de voyage inaugural, parfum féminin à bord... De celle qui incarna la féminité "nature" dans toute son insolente splendeur... Prénom et nom* : Colette... Pour cause de causerie, retour en arrière sur la trajectoire éminemment féminine d'une femme libre... par elle-même !



© DR.
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7 juin 1935, le Normandie quitte New York pour sa traversée inaugurale retour avec, à son bord, Colette. Elle vient d'épouser son troisième mari : Maurice Goudeket, de 15 ans plus jeune qu'elle. À l'occasion de ce voyage retour, le commandant du navire lui demande de préparer une causerie sur sa vie afin "d'animer" l'une des soirées de cette croisière exceptionnelle.

Colette s'exécute... L'occasion est trop belle de se remémorer tous ces personnages et ces événements qui ont marqués sa carrière, sa vie. Souvenirs mouvementés, étonnants, détonants traversant son œuvre, ponctués de rencontres - maris, amants, amis - et de situations hors du commun. Malheureusement, il n'existe pas de traces écrites ou enregistrées de cette conférence. Mais c'est cette situation originale qui donna l'idée à Pierre-André Hélène, historien d'art, écrivain et comédien, de réinventer le discours de Colette, dans le respect de "ses mots".

© DR.
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Nous assistons alors, dans le petit écrin "Art Déco" qu'est le Théâtre Maxim's, à une reconstitution joyeuse et généreuse de ces moments où Colette se raconte avec gourmandise et lucidité. Écrivain, journaliste, comédienne, mime, librettiste, conférencière, dialoguiste, Colette a incontestablement marqué le XXe siècle d'une empreinte originale, celle d'une femme naturelle/nature, indépendante, parfois provocante mais incontestablement libre et douée pour l'art de vivre.

Le monologue écrit par Pierre-André Hélène "colle" parfaitement à ce que l'on peut avoir en mémoire de la langue de Colette, de son phrasé, de sa façon d'aborder les sujets les plus "historiques" comme les plus cocasses, sensuels ou libertins. Et l'interprétation de Véronique Fourcaud est convaincante (doublée d'une troublante ressemblance), à la hauteur de l'enjeu extrêmement difficile d'incarner une femme qui, par ses écrits, ses idées, tout comme ses excès et son infinie liberté, reste l'une des premières femmes légendaires du XXe siècle.

Dans la minuscule scène de ce théâtre de poche, Théodora Mytakis vient poser une scénographie précieuse et fine, au diapason de ce luxe artistique que véhiculait alors un paquebot d'exception tel que le Normandie ; et elle nous offre une mise en scène sobre et subtile laissant intelligemment la liberté nécessaire à la composition à la fois dense et aérienne de Véronique Fourcaud.
Un jolie moment de théâtre à passer en compagnie d'une Colette imaginée avec beaucoup d'âme et de générosité... Le seul regret étant que la pièce ne se joue que le dimanche après-midi.

*Née Sidonie-Gabrielle Colette.

"Moi, Colette"

© DR.
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"Moi, Colette"
Texte : Pierre-André Hélène.
Mise en scène : Théodora Mytakis.
Avec : Véronique Fourcaud .

Depuis le 19 janvier 2014.
Dimanche à 16 h 30.
Théâtre Maxim's, Paris 8e, 01 42 65 30 47.

Gil Chauveau
Jeudi 13 Mars 2014

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© François Vila.
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