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Avignon 2024

•Off 2024• "Colette l'Indomptable" Vagabonder sur les routes intensément sinueuses mais déterminées de la célèbre artiste

En 1908, après sa rupture avec son mari et mentor Willy, Colette traverse une période de doutes. Pour gagner sa vie, elle se fait mime et part en tournée théâtrale. Mais comment tenir sa revendication d'indépendance, sa soif d'émancipation face aux tentations que lui offre sa compagne, l'aristocrate Missy ? Et face aussi à la folle passion amoureuse qui la pousse à rejoindre incognito son nouveau mari sur le front de Verdun ? En l'espace de quelques années, Colette se reconstruit, se découvre, désormais prête à écrire les grands romans de la maturité.



© Élisabeth Renault-Geslin.
© Élisabeth Renault-Geslin.
C'est une période plutôt courte (1908-1914), mais néanmoins cruciale dans la vie de Colette, que Gaël Lepingle au livret et Julien Joubert aux arrangement musicaux ont décidé de choisir pour cette nouvelle création sur la célèbre Colette.

Tout n'avait donc pas déjà été dit sur cette femme hors du commun dont on pense pourtant connaître les grands pans de sa vie (journaliste, vedette de music-hall, actrice, romancière, deuxième femme élue à l'Académie Goncourt en 1945, bisexuelle, et dont les funérailles nationales ont marqué le peuple français).

C'est à partir de deux recueils d'articles sur Colette, "L'Envers du music-hall" (sur l'univers du music-hall) et "Les Heures longues" (sur la Première Guerre mondiale) que la dramaturgie de ce spectacle a été conçue.

L'ensemble est séduisant et bien joliment interprété par les deux comédiennes et le comédien qui endossent tour à tour plusieurs rôles (un journaliste, le mime Wague, un bandit maître-chanteur, une petite danseuse, une amante, une aristocrate russe déchue, etc). Ariane Carmin, Mia Delmaë et David Koënig enchaînent avec élégance leurs interprétations respectives.

© Élisabeth Renault-Geslin.
© Élisabeth Renault-Geslin.
Découpé en deux actes qui couvrent deux temps particuliers de la vie de la célèbre actrice, le spectacle peine toutefois à s'instaurer dans la deuxième partie où l'on retrouve Colette sur le front de Verdun, partie retrouver son amant, le journaliste Henri de Jouvenel. Le propos aurait mérité d'être plus fluide entre l'évocation du féminisme ostentatoire de Colette, son désir physique irrépressible, sa soif d'indépendance et son désir de soumission érotique.

Mais, au Théâtre Montmartre-Galabru, en ce lundi 18 mars, c'est à la première que nous avons assisté et gageons que le jeu des trois interprètes s'affinera sans aucun doute au fil des représentations, car leurs talents notoires respectifs et expérimentés sont évidents. La multiplication des rôles endossés semble, par moments, perdre un peu le public qui est peut-être un peu trop ballotté entre les différents personnages convoqués.

Mais il ne fait aucun doute que c'est tout à l'honneur de Gaël Lepingle d'avoir souhaité représenter ce que la vie indomptable et foisonnante de Colette avait comme écho pour lui…
Quand on aime, bien souvent, on ne compte pas ! Choisir, c'est renoncer, dit-on souvent, notamment en matière de création artistique et plus particulièrement théâtrale…

"Colette l'Indomptable" reste néanmoins une pièce musicale divertissante, instructive et très agréablement interprétée au chant par les comédiennes et le comédien. Une mention spéciale à Mia Delmaë dont la voix mélodieuse et cristalline embarque le public avec émotions. Ariane Carmin et David Koënig ne sont pas en reste et leur charisme chatoyant séduit les spectateurs en portant justement leurs interprétations chantées, narratives et très évocatrices. N'oublions pas la composition musicale raffinée du compositeur Julien Joubert, au panel artistique à la fois remarquable et inclassable.

"Je vagabonde entre les courants", a dit Colette.
Dans ce spectacle, le public vagabonde, lui aussi, avec grand plaisir sur les routes intensément sinueuses, mais déterminées de la célèbre artiste pendant six années de sa vie, sans doute moins connues que certaines autres.

"Colette, l'Indomptable"

Texte : Gaël Lepingle.
Mise en scène : Gaël Lepingle.
Avec : Ariane Carmin, Mia Delmaë, David Koenig.
Musique : Julien Joubert.
Scénographie et costumes : Ludovic Meunier et Paula Dartigues.
Durée : 1 h 30.

•Avignon Off 2024•
Du 29 juin au 21 juillet 2024.
Tous les jours à 20 h 45. Relâche le jeudi.
B.A Théâtre, 25, rue Saint-Jean-le-Vieux (Place Pie), Avignon.
Réservations : 06 60 96 84 82 - 04 65 87 88 88.

Brigitte Corrigou
Vendredi 3 Mai 2024

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À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024