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Théâtre

N°1 : Les bons conseils de Mickaël Duplessis

Pendant toute la durée du Festival d’Avignon, nous allons suivre les pas de notre cher rédacteur, Mickaël Duplessis, présent les trois semaines du Festival et déjà sur place. Une aventure qui démarre et un rendez-vous à ne pas manquer !



Dans la jungle du Off… : les théâtres.

N°1 : Les bons conseils de Mickaël Duplessis
Ca y est ! Dans la nuit du 3 au 4 juillet, respectant l’arrêté préfectoral, la "ville de province" s’est transformée en "ville du festival", se couvrant soudainement de milliers et de milliers d’affiches. Avignon va être l’objet de tous les regards pendant la durée de ce festival que le monde entier nous envie... Chaque année, le "record" de spectacles présentés est battu. Chaque année, la question est la même : comment s’y retrouver dans cette… jungle ?

Quel festivalier êtes-vous ? Du genre ultra-prévoyant ? Je viens trois jours seulement, j’ai reçu le bottin, pardon, le programme, par la poste, je sais déjà tout ce que je dois voir et mes journées sont chronométrées? Ou plutôt du genre dilettante ? J’ai tenté de feuilleter le programme, qui m’est tombé des mains, du coup je flâne dans les rues en préférant profiter de l’atmosphère et me laisser séduire par une affiche ou un tract ? Dans ce cas comme dans l'autre, un festival d’Avignon, ça se prépare un peu. Ne serait-ce qu’à cause du prix des places, il faut savoir quel budget on se donne ! Alors, comment choisir, comment ne pas se tromper ? à quoi se fier ? à quel saint se vouer ?

La chose la plus importante est de faire confiance aux lieux. Mais fuyons absolument tout ce qui est Paris, Palace, Forum, Capitole, etc. qui sont des temples de la vulgarité, des usines à fric et à mauvais goût. Pour vous donner un aperçu, petit florilège de leur programmation régulière : Ma femme s’appelle Maurice, Ma femme me prend pour un sextoy, Ma voisine ne suce pas que de la glace, Ma colocataire est une garce, Ma sœur est un boulet, et j’en passe… Faut-il en rire ou en pleurer ?

Fuyons aussi tous ces garages minuscules, vaguement aménagés et qui n’ouvrent qu’au mois de juillet pour louer leurs créneaux une fortune. Ce n’est heureusement pas toujours vrai, mais la jauge d’une salle peut aussi parfois vous renseigner sur son sérieux. Patrice Chéreau pourrait-il faire des miracles sur une scène de trois mètres d’ouverture et de deux mètres de hauteur ? Enfin, fuyons et maudissons les restaurants, les bars ou même les dojos (!) qui se transforment en théâtres afin de faire en un mois leur chiffre d’affaires de l’année ! Les Attila Théâtre, Maison des fondues et autre Atelier 44… Citons aussi l’usine révoltante que constitue Le Collège de la salle, proposant près de 60 spectacles par jour dans 5 salles différentes et dont les conditions d’accueil des compagnies et du public sont loin d’êtres glorieuses…

A contrario, privilégions les vraies "scènes permanentes d’Avignon", qui ont une programmation à l’année de qualité et qui ne considèrent pas uniquement le mois de juillet comme une façon de s’en mettre plein les poches. La plupart, en effet, prennent un risque en ne proposant que des co-réalisations aux compagnies et non des locations. Vous trouverez assurément de la qualité au Théâtre des Halles, du Balcon, du Chêne Noir, du Chien qui fume et des Carmes. Mais aussi au Golovine, à la Fabrik’Théâtre, au Théâtre de l’Oulle, à la Condition des soies… Saluons aussi la programmation du Buffon, des Trois Soleils, de la Caserne des pompiers, de l’Entrepôt, des Hivernales, du Petit Chien, du Petit Louvre… Tant de lieux vraiment connus des avignonnais et qui font passer l’art avant l’argent.

Bon courage dans la lecture du programme, et bonne chasse aux pépites !

Le programme est disponible sur le site du Festival, à l'adresse suivante :
http://www.avignonleoff.com

Mickaël Duplessis
Mardi 5 Juillet 2011

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"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
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Qu'il est hallucinant de risquer encore plus sa vie à vélo sur une piste cyclable !
Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

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Isabelle Lauriou
15/05/2025
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© Philippe Hanula.
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