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"Les Ombres heureuses" ou l'histoire des organistes français de la fin du XVIIIe

Le dernier enregistrement du claveciniste et organiste Olivier Baumont, sorti au début de l'hiver 2014, est consacré à une histoire méconnue de l'orgue français à la fin du Siècle des Lumières. "Les Ombres heureuses" ressuscitent les mânes de compositeurs souvent décriés à tort parce qu'ils succédaient à de grands maîtres tels François Couperin ou Jean-Sébastien Bach.



Olivier Baumont, soliste, érudit et écrivain, continue donc son travail d'exhumation de partitions méconnues du grand public. Il signe avec ce nouvel enregistrement "Les Ombres heureuses" ce qu'il appelle "un journal d'orgue" consacré à la fin du XVIIIe siècle français. Une véritable déclaration d'amour à un répertoire et à des instruments d'exception qui lui sont contemporains.

Une majeure partie du programme est consacrée à des œuvres d'organistes tels Claude Balbastre (1724-1799), titulaire du Concert Spirituel aux Tuileries puis à Notre-Dame de Paris, comme Armand Louis Couperin (le petit-cousin du grand François) ou encore Michel Corrette (1707-1795) à qui le CD emprunte le titre de deux petites Marches pour orgue ou clavecin. On y découvre aussi avec gourmandise quatre pièces de Josse François Joseph Benaut, guillotiné sous la Terreur, ou encore de Guillaume Lasceux qui vécut jusqu'à la première année du règne de Louis-Philippe en 1831.

L'événement réside aussi surtout dans le fait qu'Olivier Baumont rappelle à la vie ce répertoire sur un orgue d'époque - un vrai rescapé -, celui de François Dom Bedos, un célèbre facteur moine bénédictin. L'enregistrement rend justice à merveille à cet orgue de 1748 restauré par Pascal Quoirin et qui se trouve dans l'Église Sainte-Croix de Bordeaux, une ancienne abbatiale. Le soliste a par ailleurs choisi d'enregistrer, à la Cité de la Musique, deux fugues de Jean-Jacques Beauvarlet-Charpentier (1734-1794) et six pièces de C. Balbastre extraites de son "Recueil" sur un Piano-forte organisé Erard de 1791, propriété du Musée de la Musique.

Les timbres si expressifs (et oubliés) du piano-forte se marient ici aux couleurs brillantes de l'orgue grâce au jeu virtuose d'Olivier Baumont. Son patient artisanat musicologique et son expertise d'interprète font merveille avec ces "Ombres heureuses" - après ses intégrales Rameau et F. Couperin sur disque. Beau résultat d'une quête dont le soliste notait lui-même dans son journal (rédigé pendant sa résidence au Château de Chambord en 2013-2014) : "On met des années à chercher une belle sonorité et à trouver son propre Art de toucher le clavecin" et d'autres instruments (à vent comme l'orgue).

● Olivier Baumont "Les Ombres heureuses".
"Les organistes français de la fin de l'Ancien Régime".
Collection "Tempéraments".
Sorti : novembre 2014.
Label : Radio France Éditions.
Distribution : harmonia mundi.
Durée : 63' 31''.

Christine Ducq
Jeudi 22 Janvier 2015

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